"Nous sommes dans un état d'urgence. Nous prenons plusieurs dispositions pour éviter des attaques des islamistes", a expliqué Madani Mniang, premier adjoint au maire (échevin) de Ségou (650 km au nord-est de Bamako). "J'ai interdit aux familles religieuses d'organiser le Maouloud sur la voie publique, je leur ai demandé de se cantonner aux mosquées ou bien aux cours et jardins intérieurs des maisons".
Les intégristes islamistes, notamment salafistes, dénoncent le Maouloud comme une innovation s'apparentant à la célébration chrétienne de la naissance de Jésus, rappelle-t-il.
Depuis les frappes aériennes françaises contre Diabali le 14 janvier, à quelque 100 km au nord, les islamistes ont fui et se sont disséminés dans la région.
"Ces islamistes sont contre le prophète", estime l'adjoint. "Ce sont des trafiquants d'hommes, d'armes, de drogue. Or la religion condamne tout cela".
Dès la tombée du jour, les rues de Ségou plongées dans le noir restent désertes. Les habitants rentrent tôt chez eux, restaurants et night-clubs ne font guère d'affaires.
A l'embarcadère du fleuve Niger, les traversées des deux bacs doivent s'arrêter impérativement à 18h00. Les nombreux ânes qui transportent inlassablement marchandises et personnes se reposent plus tôt que d'habitude, seuls quelques militaires nonchalants prennent la relève.
"Ils ont demandé aux pêcheurs de faire attention, de ne pas prendre n'importe qui à bord pour traverser le fleuve. D'ordinaire, la traversée est très facile", raconte un hôtelier dont l'établissement se situe à proximité du Niger.
Des soldats patrouillent les rives du fleuve, affirme l'adjoint au maire, mais ils sont peu visibles.
Selon Madani Mniang, quelques islamistes se sont infiltrés dans Ségou, ville essentiellement bambara (ethnie noire majoritaire) du Mali peuplée de 130.000 habitants, très étendue avec beaucoup de grands espaces cultivés, impossibles à contrôler.
"Trois d'entre eux, en tenue civile, mais avec des armes ont été arrêtés, ils ont été remis à la disposition du procureur", affirme-t-il.
Difficile d'apprécier exactement les risques d'infiltrations. Parmi les jihadistes, beaucoup étaient de jeunes noirs maliens qui ont trouvé l'occasion de gagner soudain beaucoup d'argent, selon un journaliste malien originaire du nord, Sedi. Ceux-là peuvent rapidement se fondre parmi la population et se chercher un nouveau destin.
La police de Ségou a diffusé plusieurs numéros de téléphone que les habitants peuvent appeler, s'ils repèrent des suspects.
Mais un turban de touareg ou d'arabe (deux communautés dont sont issus la majorité des islamistes armés), une "peau blanche", peuvent être vite assimilés à un jihadiste par une population choquée par les exactions des islamistes (lapidations, amputations) à l'encontre des habitants de Gao et Tombouctou, deux des grandes villes du nord.
C'est à Ségou que doivent se déployer en début de semaine prochaine deux hélicoptères Agusta A109 médicalisés que la Belgique a mis à la disposition de l'opération française Serval.
Belga