Une défaite loin d’être anodine pour Medvedev. Désabusé en conférence de presse post finale, le Russe y allait d’une confession. "Je vais essayer de faire court, mais je vais vous raconter une histoire. C’est l’histoire d’un jeune gamin qui rêvait de faire de grandes choses dans le tennis. Quand j’ai pris une raquette pour la première fois, j’avais six ans. Le temps passe vite. Quand j’avais 12 ans, je jouais des petits tournois russes, et je regardais les Grands Chelems à la télé bien sûr, avec les grandes stars qui jouaient, soutenues par les fans. Vous rêvez d’en faire partie". Avant de poursuivre. "Je vais juste vous donner un petit exemple. Avant que Rafa ne serve dans le 5e set, s’il y avait une personne qui criait 'Allez Daniil', ensuite un millier d’autres faisait 'Tsss'. C’est décevant et irrespectueux. Je ne suis pas sûr que je voudrai jouer au tennis à 30 ans passés. Le gosse qui rêvait en moi n’existe plus aujourd’hui. Ce sera plus dur de continuer le tennis dans ces conditions".
Le Russe est clair : le manque d’amour et de soutien du public l’a plus marqué que sa cruelle défaite en cinq sets. "Quand j’ai commencé à être un petit peu mieux classé, top 20, top 30, j’ai commencé à jouer Roger, Novak, Rafa. Nous avons eu des matches durs, mais je ne les avais pas encore battus à l’époque. Et je me souviens qu’on parlait beaucoup de la jeune génération qui devrait faire mieux. Des gens disaient qu’ils voulaient vraiment que la jeune génération aille chercher le Big 3, qu’elle s’améliore, soit plus forte. Ça m’a motivé, je me suis dit : 'Oui, rendons-leur la vie difficile.' Mais j’ai l’impression que ces gens mentaient, parce qu’à chaque fois que je suis rentré sur le court dans ces grands matches, je n’ai pas vu grand monde qui voulait que je gagne".
Avant d’assurer que cette finale perdue est un tournant dans sa carrière. "A partir de maintenant, je joue pour moi, pour ma famille, pour l’aider financièrement, pour les gens qui me font confiance et bien sûr pour les Russes qui me soutiennent beaucoup. S’il y a un tournoi sur dur à Moscou, avant Roland-Garros ou Wimbledon, j’irai même si je dois manquer Wimbledon ou Roland-Garros".
Souvent critiqué pour son caractère bien trempé sur le court, parfois même borderline avec le public, Medvedev estimait alors que son manque de popularité était également dû à sa nationalité. "Je pense que la nationalité joue. Pendant un certain temps, le tennis russe était un petit peu dans un creux. Il y a beaucoup plus de buzz autour du tennis en Russie désormais avec Andrey Rublev, Karen Khachanov, Aslan Karatsev et moi qui faisons de grandes choses. C’est super. On espère que plus de gens nous soutiendront. Mais oui, quand on joue quelqu’un d’un autre pays, je constate vraiment que les gens le préfèrent ou quelque chose comme ça."
Une déclaration presque prémonitoire, faite quelques semaines avant le début de l’invasion russe en Ukraine. Et qu’on le veuille ou non, le fait d’être Russe a marqué un tournant dans la suite de la saison du natif de Moscou.