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Maghla, Shironamie, Baghera Jones : les streameuses toujours autant objectifiées et harcelées sur Twitch

Maghla, Baghera Jones, Shironamie ou encore Ava Mind ont faire connaître leur colère et leur impuissance face à ces vagues de menaces et de harcèlement |

© Justin Paget / Getty Images

Ces dernières 48 heures, la parole s’est encore plus libérée sur les réseaux et notamment Twitter. Une fois de plus, les streameuses ont témoigné de leurs conditions de travail et du manque de sécurité qu’elles ressentent et vivent au quotidien. En effet : messages violents à caractère sexuel, menaces de violences, de doxing (divulguer l’adresse postale, le numéro de téléphone) voire de meurtre et des appels téléphoniques incessants.

Voilà le quotidien des streameuses d’aujourd’hui (et de ces dernières années, en vérité). On fait le point.

Un ras-le-bol qui dure depuis des années

Le cri du cœur qui a eu le plus de visibilité est celui de Maghla, streameuse française, qui n’en peut plus des spectateurs qui réalisent des clips d’elle lorsqu’elle ose porter un débardeur. Le titre du clip se nomme "décolleté seins luisant MIAM", autant dire que la couleur est annoncée. Ce genre de clips apparait quotidiennement sur les réseaux sociaux, visant le plus souvent les streameuses, pour assouvir des fantasmes clairement lubriques.

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Concernant Maghla, la streameuse avait récemment témoigné et obtenu justice suite au harcèlement d’un individu sur les réseaux (et surtout Instagram). L’internaute, âgé de 27 ans, a été condamné à un an de prison et ne pourra pas exercer le métier de streameur pendant cinq ans. Si cette affaire a été classée, bon nombre d’autres internautes harceleurs et pervers reste toujours dans la nature.

Maghla a donc pour sa part rédigé un thread (une suite de tweets) qui explique pourquoi elle décide de porter des vêtements larges la plupart du temps. Elle montre également comment des internautes, sur divers réseaux (reddit, discord) créent des deepfakes d’elle en appliquant son visage sur celui d'actrices pornos. Et lorsqu'il ne s’agit pas de montages, ce sont ces mêmes internautes qui envoient des dickpics (des photos de leur pénis) directement en message privé aux streameuses.

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Ces harcèlements s’observent encore plus quand ces streameuses communiquent sur le sujet du harcèlement. Elle évitent même la plupart du temps de trop en parler afin de ne pas recevoir des messages violents : "elle l’avait bien cherché", "tu n’as qu’à pas montrer tes seins", "c’est la rançon de la gloire".

Baghera, une autre streameuse, a également tweeté sur le sujet : "si on se tait, c’est pour éviter ces pluies d’insultes".

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Qu’elles parlent ou non, le résultat est le même. Et ce que vivent ainsi Maghla et Baghera, c’est le quotidien de toutes les streameuses.

Et l’horreur va toujours plus loin

Les méthodes de ces harceleurs vont toujours plus loin : notamment se faire passer pour un livreur Amazon ou UberEats afin d'obtenir le numéro de téléphone et l’adresse postale des streameuses. C’est ce qui est arrivé à Shironamie.

Alors qu’elle était en plein stream, elle reçoit un premier appel téléphonique d’une personne se déclarant "dérangée mentalement" et qui serait prête à lui vouloir le pire. Cette personne était présente sur le live de la streameuse.

L’individu a oublié de masquer son numéro et a donc demandé à la streameuse de ne pas porter plainte, avant de se rétracter :

Si tu portes plainte, je viendrai chez toi et je te violerai.

Cette partie n’avait pas été enregistrée sur le live. Cependant, afin d’avoir des preuves tangibles à présenter aux autorités, la streameuse demande à l’individu de la rappeler. Ce qu’il fait et s’ensuit le clip ci-dessous.

Attention, les propos déclarés dans la vidéo sont violents : menaces de viol et de meurtre.

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Face à cet appel téléphonique, la streameuse garde son sang-froid et prend le réflexe d’enregistrer les preuves via son stream. La streameuse Ava Mind a eu affaire au même individu et dans des circonstances identiques : elle était en stream, reçoit un appel de cette personne et décide de l’enregistrer également.

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La route vers le commissariat afin de déposer plainte reste néanmoins longue : sur le net, les méfaits de harcèlements et de menaces ne sont, soit pas pris au sérieux, soit classés sans suite.

Il arrive également que les autorités n’aient pas reçu de formation en ce qui concerne le cyberharcèlement ou encore sur la façon d’appréhender un individu accusé de menaces, violences ou harcèlement.

Le cas de Maghla dont nous parlions précédemment est une exception dans le domaine. Car si sa plainte a abouti à une condamnation de son harceleur, les méandres de la justice et de son administration sont longs et fatigants pour les victimes qui doivent revivre leur trauma, voire parfois se retrouver face à leur agresseur au tribunal.

750€ d’amende, c’est tout ?

Face à ces violences subies quotidiennement, les streameuses ne lâcheront pas : elles continueront d’assurer leur lives, quand bien même des harceleurs sont présents sur leurs streams.

Pour rappel, en France, l’outrage sexiste ou sexuel est une infraction qui peut être puni d’une amende pouvant aller jusqu’à 750 €. Selon le site du Service Public français, "l’outrage sexiste consiste à imposer à une personne un propos ou un comportement à connotation sexuelle ou sexiste, qui lui porte préjudice. L’acte doit porter atteinte à la dignité de la victime, en raison de son caractère dégradant ou humiliant, ou l’exposer à une situation intimidante hostile ou offensante."

On est clairement dedans. Et 750€ d’amende ne suffiront certainement pas à arrêter les cyberharceleurs.

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