Lutgen, la pelle du 19 juin

Philippe Walkowiak

© RTBF

Lundi 19 juin 2017

… 365 jours plus tard que reste-t-il de ce lundi midi où le président du cdH a pris de court les rédactions, son allié politique et aussi une très grande partie des cadres de son parti ?

Déflagration

Même s’il y avait des tensions, un malaise, personne n’a vu l’orage venir. C’est même inédit dans l’histoire politique belge, pourtant fertiles en coups bizarres en tout genre.

Constat du président du cdH : force est de constater qu’après 30 ans de pouvoir ininterrompu, le PS porte une responsabilité écrasante dans l’ampleur et la répétition des scandales. La rupture est nécessaire. Elle doit être immédiate. La situation du cdH est aussi compliquée : il est alors sous la barre des 10% des intentions de vote et en passe de disparaître à Bruxelles. Benoît Lutgen se devait d’agir. Toutefois, il est rapidement apparu que la manœuvre s’est déroulée dans une improvisation qui risque de s’avérer in fine contre-productive. Le coup de sang plus que l’opération politique d’envergure.

Le PS lui dit merci (enfin presque)

Sans cette défénestration, le PS serait toujours au pouvoir en Wallonie, Paul Magnette serait toujours ministre-président et sans doute Elio Di Rupo toujours président du PS et bourgmestre de Mons prêt à se succéder à lui-même. Avant le 18 juin 2017, le PS évoquait déjà le décumul intégral et même s’il a dû revoir sa copie devant la pression de ses cadres, il revu son fonctionnement plus vite que ses 10 dernières années. A l’heure du scrutin, il aura beaucoup moins à assumer le bilan de 30 ans de socialisme wallon et il en a profité pour resserrer les rangs et se mettre en position de contenir le PTB. De plus, la nouvelle majorité démontre qu’elle est tout aussi impuissante que la précédente face au management de Nethys.

Les autres aussi …

Benoît Lutgen peut en vouloir à Olivier Maingain (qui a été mis devant le fait accompli), il est devenu depuis un an son meilleur impresario ! Le président de DéFI figure désormais parmi les personnalités politiques préférées des Wallons et son parti devrait faire son entrée dans plusieurs conseils communaux du sud du pays, tout en renforçant ses positions bruxelloises.

Le MR a reçu sa Saint-Nicolas en plein été et ses ministres incarnent la nouvelle action gouvernementale sans doute bien plus que leurs homologues centristes. Cela n’empêche pas toutefois les libéraux de rester méfiants vis-à-vis de leurs nouveaux partenaires.

Enfin, la manœuvre de Benoît Lutgen aura validé définitivement la démarche d’ECOLO qui plaide depuis toujours pour une gouvernance plus éthique, plus transparente.

Paradoxalement, le cdH retire peu de choses de l’audace de son président. Le parti reste lié au PS à Bruxelles et en Fédération Wallonie-Bruxelles. Selon les sondages, le cdH ne paraît plus en mesure de peser dans une coalition.

Les communales devraient permettre aux démocrates-humanistes de sauver les meubles, en ne se présentant d’ailleurs que sporadiquement sous l’étiquette-mère.

Avec un allié empêtré dans les affaires et son propre parti en capilotade, Benoît Lutgen a alors abattu son dernier atout. Sans véritable effet bénéfique pour lui et les siens. Pour l’instant. Coup politique salvateur ou gadin magistral ? Rendez-vous le soir du 26 mai 2019.

@PhWalkowiak

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