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L’Union européenne et la neutralité carbone en 2050 : il faudra plus que des prières pour y arriver

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Par Olivier Hanrion via

À force de le répéter en boucle comme un mantra depuis 3 ans et demi, la prière de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen commence à prendre forme. Cette semaine, les députés européens ont enterré le bon vieux moteur à combustion de nos bagnoles. Ne vous précipitez pas au cimetière, la cérémonie n’aura pas lieu avant 2035. Mais c’est un pas important vers cette neutralité carbone. Le transport routier représente aujourd’hui 20% des émissions globales de CO2.

Ainsi, en 2035, il n’y aura plus que des voitures électriques chez les concessionnaires automobiles. Et c’est là que commencent les difficultés. Parce qu’on ne va pas sauver le climat d’un coup de baguette magique en remplaçant tous les moteurs à combustion par des moteurs électriques.

D’abord parce que toutes les voitures électriques ne sont pas si propres que ça. Pour être propres, il faut que la capacité des batteries de ces voitures soit raisonnable. Et ce n’est pas du tout le chemin que prennent les constructeurs européens aujourd’hui. Au contraire, leurs véhicules sont de plus en plus gros. En 10 ans, les grosses voitures ont pris plus 300 kilos tous modèles confondus.

Les voitures électriques ont suivi cette même tendance à l’obésité. Sauf que plus une voiture est lourde, plus il lui faut de l’énergie pour se déplacer. Et donc des batteries plus grosses. Et donc plus polluantes. Parce que dans les batteries il y a des composants comme le cobalt et le lithium dont la production est très polluante.

Il y a aussi le prix de ces véhicules électriques. Le prix de la batterie, c’est environ 40% du prix de la voiture. Plus la batterie est importante, plus elle est chère, avec un double risque à la clé : celui de faire porter sur le dos des plus pauvres le coût de cette transition. Comme tout le monde ne pourra pas se payer une voiture électrique, les moins fortunés continueront à rouler avec des voitures d’occasion… à moteur thermique qui seront sans doute plus taxées que les autres.

L’autre risque est lui industriel. Aujourd’hui ce sont les constructeurs chinois qui se positionnent sur des voitures plus petites, moins gourmandes et donc moins chères. Si rien ne change, cette fin du moteur thermique signera peut-être aussi la fin des constructeurs européens…

Ce n’est pas très réjouissant comme perspective. Et ce n’est pas tout. Il y a aussi le problème des recharges. Aujourd’hui tous les ingénieurs vous le diront : le réseau n’est pas suffisamment dense, surtout à Bruxelles et en Wallonie. Il n’y a pas assez de bornes intelligentes, celles qui s’adaptent à l’électricité disponible sur le réseau. Et ensuite, le réseau en lui-même n’est sans doute pas en mesure de supporter que tous les automobilistes rechargent leur véhicule au même moment.

Bref, la marche forcée vers le tout électrique, n’est pas la solution miracle pour faire baisser nos émissions de CO2. C’est un passage obligé mais si on veut vraiment faire baisser nos émissions de gaz à effet de serre dans le transport, c’est toute la mobilité qui va devoir changer.

C’est déjà doucement en train de se faire. Dans les villes notamment. Le nombre de déplacements à vélo a explosé. Les trottinettes font désormais partie du paysage. Même les trains de nuit ont repris du service… Mais il faut maintenant passer à la vitesse supérieure et repenser la place de la voiture dans notre société. Admettre que posséder une voiture, ce ne sera sans doute plus évident dans les années qui viennent. Et là c’est nettement plus difficile. Qu’elle soit électrique ou thermique, toucher à la bagnole, c’est comme toucher au grisbi, ça fait vite des dégâts.

Il est sans doute plus facile de voter la fin du moteur à combustion que de dire aux Européens que leur mode de vie va devoir changer.

Pourtant pour arriver à cette neutralité carbone, ce ne sont pas juste les voitures qui vont devoir changer, c’est toute la société qui va devoir se réorganiser. Et pour ça, il faut plus que des prières pour y arriver.

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