Faut-il limiter le covid Save Ticket aux seules personnes vaccinées? L’idée est portée par le ministre de la santé Frank Vandenbroucke. Mais cette idée suscite des problèmes d’ordre éthique, juridique et politique.
Ethique et passe vaccinal
Commençons par l’Éthique. Est-il juste de réserver l’accès à tout une série de services, de lieux culturels, d’hôpitaux, de centres sportifs aux seules personnes vaccinées ?
A cette question Frank Vandenbroucke répond "oui". Voici sa déclaration : Un certificat de vaccination, ça veut dire que les gens qui prennent un grave risque pour eux-mêmes et donc aussi pour le secteur de la santé et les gens de leur entourage, ne bénéficieront plus de certaines possibilités que d’autres personnes garderont. Je n’ai aucune difficulté avec ce principe. Et il assume c’est dit-il une autre manière de rendre la vaccination obligatoire.
Or cette position n’est pas du tout évidente à défendre. Le comité consultatif le rappelle dans une note qui tombe à point nommé. Le CST constitue une importante limitation des libertés individuelles dans le cadre d’une vaccination proportionnée à l’objectif de réduction de risque pour la société. Il faudrait donc prouver, sur base scientifique, que seule désormais la vaccination participe à la réduction de risque, et plus l’immunité acquise après une infection et plus un test PCR négatif.
Le comité de bioéthique, rappelle que le CST est un dispositif transitoire qui ne peut par des voies détournées rendre la vaccination obligatoire.
Ethique et vaccination obligatoire
Le comité de bioéthique ouvre la voie à la vaccination obligatoire : afin de faire prévaloir la solidarité sur la liberté individuelle en raison du bénéfice sanitaire essentiel attendu en termes de réduction des risques.
Mais ça ne peut se faire dans l’urgence, certainement pas pour lutter contre l’arrivée d’Omicron, il faut un large débat public dit le comité. Ça ne peut se faire non plus sans lever les incertitudes scientifiques qui restent : par exemple l’efficacité des vaccins actuels contre omicron, le schéma vaccinal (combien de doses ?), etc.. Les incertitudes ne concerne pas la balance bénéfice risque qui n’est pas contestée. Il s’agit plutôt d’incertitudes à propos de l’équilibre à trouver dans la réduction de risques entre la vaccination et les autres moyens, préventifs ou curatifs (par exemple les nouveaux traitements). C’est une question de stratégie sanitaire qui est posée là.
Problèmes juridiques et politiques
Le Pass vaccinal pose donc des problèmes éthiques, mais disions-nous également juridiques et politiques. Au niveau juridique, le covid safe Ticket s’est pris une volée de plomb en Wallonie, une réduction du périmètre, un durcissement, donc du dispositif n’augure rien de bon en justice.
Mais le vrai problème est politique, car comme l’assume Frank Vandenbroucke, il s’agit d’une obligation déguisée. Or les gouvernants ont passé une sorte de contrat avec la population. On peut le résumer comme suit : libre à chacun de se faire vacciner, mais en contrepartie il faut accepter une limitation de nos libertés individuelles liées à d’autres moyens de réduction de risque comme le CST.
Si on limite le CST aux vaccinés, ce contrat sera rompu de manière insidieuse, avec le risque d’une méfiance accrue. Si le contrat ne suffit plus face à l’épidémie, il faut le dire. Peut-être passer à l’obligation, ou pas. Si on choisit l’obligation c’est un nouveau contrat. Les autorités, sur bases d’avis scientifiques doivent dire pourquoi il faut un nouveau contrat. Il faut débattre, expliquer, justifier en toute transparence. Utiliser des voies détournées pour y arriver serait faire injure à l’intelligence de citoyens vaccinés et non vaccinés.