Treize États membres de l’Union européenne ont dénoncé ce mardi, à l’initiative de la Belgique, l’adoption par la Hongrie de nouvelles dispositions légales discriminant les personnes LGBTQI, et ont exhorté la Commission européenne à saisir la Cour de justice de l’UE.
"Nous exprimons notre profonde inquiétude quant à l’adoption, par le Parlement hongrois, d’amendements discriminatoires à l’égard des personnes LGBTQI et violant le droit à la liberté d’expression sous prétexte de protéger les enfants", affirme cette déclaration initiée par la ministre belge des Affaires étrangères et européennes, Sophie Wilmès, pour le Benelux qu’elle préside actuellement.
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"Ces amendements à un certain nombre de lois hongroises (loi sur la protection de l’enfance, loi sur l’activité publicitaire des entreprises, loi sur les médias, loi sur la protection de la famille et loi sur l’éducation publique) introduisent une interdiction de la 'représentation et de la promotion d’une identité de genre différente du sexe à la naissance, du changement de sexe et de l’homosexualité' pour les personnes de moins de 18 ans", dénonce cette déclaration.
"Une forme flagrante de discrimination"
Pour les 13 pays signataires, cette loi promue par le gouvernement nationaliste-conservateur du populiste Viktor Orban "représente une forme flagrante de discrimination fondée sur l’orientation, l’identité et l’expression sexuelles et mérite donc d’être condamnée. L’inclusion, la dignité humaine et l’égalité sont des valeurs fondamentales de notre Union européenne, et nous ne pouvons pas transiger sur ces principes."
"Ces amendements violent également la liberté d’expression, en limitant la liberté d’avoir des opinions et de recevoir et de communiquer des informations sans ingérence de l’autorité publique, comme le prévoit la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. La stigmatisation des personnes LGBTQI constitue une violation manifeste de leur droit fondamental à la dignité, tel que prévu par la Charte de l’Union européenne et le droit international", poursuit la déclaration.
Une Europe qui n’est pas à la carte
"Nous devons rappeler que l’Europe n’est pas à la carte", a commenté à Belga la ministre belge des Affaires étrangères et européennes, Sophie Wilmès, qui a porté ce texte devant le Conseil des Affaires générales de l’Union européenne, réuni ce mardi à Luxembourg. "Nous avons des traités qui garantissent que l’Union est fondée sur des valeurs. Cette loi est en contradiction frontale avec ces valeurs", a ajouté la cheffe de la diplomatie belge, pointant du doigt la terminologie "extrêmement préoccupante" de la loi hongroise.
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Cette loi est "indigne de l’Europe", a fustigé le ministre luxembourgeois Jean Asselborn. "Les gens ont le droit de vivre comme ils veulent, on n’est plus au Moyen Âge", a-t-il ajouté. La loi hongroise "viole clairement les valeurs de l’UE", a renchéri le ministre délégué allemand aux Affaires européennes Michael Roth, précisant que son pays se joignait à l’initiative du Benelux. Idem pour l’Irlande, dont le ministre des Affaires européennes Thomas Byrne s’est déclaré "très préoccupé" par l’adoption d’une législation qui constitue un "moment très dangereux pour la Hongrie ainsi que pour l’Union". La France, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, la Lituanie, l’Espagne, la Suède et la Lettonie sont les autres pays signataires.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait fait part de sa préoccupation la semaine dernière, ajoutant que l’exécutif européen était en train d’examiner si cette loi "enfreint la législation européenne".
"Des fake news"
Ces accusations ont été rejetées mardi à Luxembourg par le ministre hongrois des Affaires étrangères Peter Szijjarto, qui a dénoncé des "fake news" et fait valoir "une compétence nationale qui ne devrait pas être remise en question".
Le Parlement européen, de son côté, critique depuis longtemps l’incapacité du Conseil (États membres) à faire avancer, ne fût-ce que dans son volet préventif, le processus dit "article 7" (risque de violation ou violation des valeurs fondatrices de l’UE) contre les gouvernements de Pologne et de Hongrie, régulièrement pointés du doigt pour atteintes à l’État de droit.
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L’assemblée européenne dénonce aussi l’incapacité de la Commission européenne à avancer sur le nouveau mécanisme conditionnant les subsides européens au respect de l’État de droit. L’exécutif européen a en effet accepté un compromis entre États membres qui, pour dépasser la menace de blocage du plan de relance et du budget de l’UE par Varsovie et Budapest, l’engageait à ne pas utiliser le nouveau mécanisme tant qu’il n’aura pas été validé par la CJUE.