La féminité est un "nom de code" pour l’hétérosexualité
Alors, pourquoi une telle difficulté à s’assumer comme lesbienne, dans des milieux qui revendiquent une ouverture d’esprit ? Tout simplement parce que, même sportive, une femme se doit de rester féminine, comme en témoignent, entre autres, les maillots des beach-handballeuses.
►►► A lire aussi : Beach handball : polémique autour des bikinis obligatoires
Et qui dit féminité, dit souvent hétérosexualité. Pour Pat Griffin, chercheuse américaine qui a étudié les discriminations subies par les sportives, la féminité est même un "nom de code" pour l’hétérosexualité. Elle explique : "La crainte sous-jacente n'est pas qu'une athlète ou une entraîneuse paraisse trop ordinaire ou démodée, la crainte réelle est qu'elle ait l'air d'une gouine ou, pire encore, qu'elle en soit une. Ce mélange intense de normes homophobes et sexistes d'attractivité féminine rappelle aux femmes dans le sport que pour être acceptable, nous devons surveiller notre comportement et notre apparence à tout moment".
Certaines femmes adoptent ainsi des comportements d'hyper-féminisation afin d’éviter que leur féminité ne soit remise en cause… et leur hétérosexualité aussi !
De plus, mettre en parallèle l’orientation sexuelle d’une sportive et sa prétendue féminité sous-entend que l’homosexualité se doit d'être visible. Ces stéréotypes enferment les lesbiennes dans une image de femme hypermasculine.
Ce mélange intense de normes homophobes et sexistes d'attractivité féminine rappelle aux femmes dans le sport que pour être acceptable, nous devons surveiller notre comportement et notre apparence à tout moment
Le présentateur de la VRT, quand il parle des Belgian Cats en se moquant de leur orientation sexuelle et de leur physique, amène à l’antenne le parfait exemple de la décrédibilisation des sportives en jugeant leur féminité.
►►► A lire aussi : Déclarations sexistes d’un journaliste à propos des Belgian Cats : la VRT prend ses distances, les basketteuses veulent "plus que des excuses"
“Avoir des références, des rôles modèles, ça aide”
Une des pistes de solution pour réussir à se réapproprier les stéréotypes de façon positive et qu’ils ne servent plus d’insulte ou de levier pour des violences, est l’affirmation de sa sexualité. Et de ce côté, les choses commencent à bouger doucement. Cet été à Tokyo, 185 athlètes, ouvertement LGBTQIA+, ont participé aux Jeux Olympiques, et 32 aux Jeux Paralympiques, selon le décompte du site indépendant Outsports. C’est trois fois plus qu’à Rio en 2016.
Le coming-out des athlètes offre une représentation et une diffusion de messages d’inclusivité, comme en témoigne les remerciements publics à sa petite amie de la polonaise Katarzyna Zillmann, après avoir remporté une médaille d’argent en aviron. Son pays connaît une vague de répression à l’encontre des droits des personnes LGBTQIA+, avec notamment l’instauration, depuis 2019, de zones "anti-idéologie LGBT".
►►► Retrouvez en cliquant ici tous les articles des Grenades, le média de la RTBF qui dégoupille l’actualité d’un point de vue féministe
Pour les personnalités publiques qui en ont l’occasion, le coming-out devient un enjeu politique permettant de contrer l’hétéronormativité, encore trop présente dans les milieux sportifs.
Plusieurs sportives l’ont compris. C’est le cas de Megan Rapinoe, footballeuse américaine, militante et icône LGBTQIA+. Dans son livre, One Life, elle explique : “Faire mon coming out était plus important, plus essentiel et me définissait davantage que tout ce qui se passait côté sport [...] J’avais l’impression d’appartenir à un mouvement bien plus vaste que ma petite personne [...] Tant que cela reste une étape compliquée pour les gays, non, on ne peut pas “juste” vivre sa vie. Et plus les gens parlent de leur homosexualité, plus nous brisons les stéréotypes associés aux gays”.