En annonçant la distribution de 4 millions de carol'ors à ses citoyens, Charleroi a frappé très fort. Il faut savoir que la plus importante monnaie locale jusqu'ici en Wallonie c'était le val'heureux liégeois avec un peu plus de 100.000 euros en circulation.
"C'est clair qu'avec le projet de Charleroi on change d'échelle, constate Nicolas Franka, du réseau Financité. Même les plus gros projets européens, comme l'Eusko au Pays-Basque, n'atteignent pas ces montants." Chaque habitant va recevoir un billet de 20 carol'ors (qui vaut 20 euros) à dépenser dans un commerce sur le territoire de la commune. En principe, l'opération sera lancée à la mi-septembre.
L'orno plutôt que l'euro
La commune de Gembloux, elle, n'a pas attendu la fin des vacances pour passer à l'action en imaginant l'opération "19 ornos". L'orno est la monnaie locale de Gembloux et Sombreffe qui circule discrètement depuis son lancement en 2018.
Pourquoi 19 ornos ? "C'est un clin d'oeil au Covid 19, explique l'échevin Gauthier Lebussy. Le principe c'est que chaque Gembloutois peut venir retirer à la maison communale un billet de 19 ornos en payant 10 euros. Ainsi, chacun fait sa part pour soutenir nos commerçants ." Si les 26.000 habitants utilisent ce billet de 19 ornos, c'est 500.000 euros qui seront injectés dans l'économie locale.
Mieux qu'un simple bon d'achat
Mais à la différence d'un simple bon d'achat, la monnaie locale ne sert pas qu'une seule fois. Elle a vocation à circuler dans l'économie locale. "Un commerçant qui est payé avec un billet de 19 ornos peut le réutiliser chez un autre commerçant de la commune, explique Gauthier Lebussy. Et ainsi de suite. La valeur injectée dans l'économie locale peut ainsi être multipliée par trois, quatre, cinq..."
C'est en tout cas comme ça que fonctionne les monnaies locales qui sont bien implantées dans un tissu économique, quand beaucoup de commerçants jouent le jeu et que les consommateurs sont nombreux à l'utiliser. "Je ne demande qu'à le croire, nous confie un commerçant de Gembloux. Mais moi, mes fournisseurs ne sont pas du coin, je ne peux pas les payer en ornos. Donc dès que j'aurai quelques billets dans ma caisse, j'irai les changer à la commune contre des euros."
D'autres sont plus enthousiastes : "Je compte réutiliser au moins une partie des ornos dans les commerces voisins, pour aller au restaurant par exemple ou acheter des chaussures, déclare Ingrid, qui tient une maroquinerie dans le centre de Gembloux.
Deux autres communes wallonnes emboîtent le pas à Charleroi et Gembloux en 'appuyant sur une monnaie locale pour aider les commerçants : Ath (le solatoi) et Wellin (l'ardoise). "Mais beaucoup d'autres vont suivre, estime Nicolas Franka (Financité). Nous préparons le terrain avec une vingtaine de communes différentes actuellement, et notamment les autres grandes villes wallonnes : Liège, Mons et Namur."