Les critiques d'Hugues Dayez

Les critiques d’Hugues Dayez : "Revoir Paris", le temps de la maturité pour Virginie Efira

Virginie Efira dans "Revoir Paris"

© DR

Par Hugues Dayez via

Très prisée par le cinéma français depuis cinq ans (depuis le film "Victoria" de Justine Triet), Virginie Efira tourne beaucoup – tantôt avec bonheur ("Adieu les cons" d’Albert Dupontel), tantôt pas (le calamiteux "Benedetta" de Paul Verhoeven). En cette rentrée, deux rôles forts dans des drames qui sortent coup sur coup ("Revoir Paris" présenté à Cannes et "Les enfants des autres" en compétition à Venise, qui sort mercredi prochain) montrent une nouvelle facette de la comédienne franco-belge.

Revoir Paris

L'affiche de "Revoir Paris"

Dans " Revoir Paris ", Virginie Efira incarne Mia, une quadragénaire qui se retrouve un jour au cœur d’un attentat dans une brasserie parisienne. Elle en réchappe, mais trois mois plus tard, c’est encore le trou noir ; elle ne se souvient de la tragédie que par bribes. Et s’interroge : quel fut son comportement lors de la fusillade ? A-t-elle juste cherché à sauver sa peau ou a-t-elle fait preuve de solidarité avec les autres victimes ? Comme un doute subsiste, Mia va mener son enquête pour tenter de se réconcilier avec son passé… Et avec elle-même.

La réalisatrice Alice Winocour traite ici d’une thématique qui la concerne ; son frère faisait partie des spectateurs lors de l’attentat du Bataclan, et elle est restée en contact avec lui par SMS toute la funeste soirée. Dans le rôle délicat d’une femme qui se pose plein de questions, Virginie Efira fait preuve d’une sobriété très adéquate. Dommage que la cinéaste ait jugé bon de greffer l’ébauche d’une histoire d’amour avec une autre victime de l’attentat (incarnée par Benoît Magimel), pas vraiment indispensable. Il n’en reste pas moins que "Revoir Paris" traite avec une vraie sensibilité – et un vrai point de vue – d’un drame resté gravé dans toutes les mémoires, ce qui n’est pas très fréquent dans le cinéma français.

REVOIR PARIS

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Trois mille ans à t’attendre

L'affiche de "3000 ans à t'attendre"

Alithea Binnie (Tilda Swinton), célibataire, docte chercheuse en mythologies, est invitée à prononcer une conférence à Istanbul. Se promenant dans le bazar de la ville, elle achète une vieille lampe. De retour dans sa chambre d’hôtel, quelle n’est pas sa surprise de voir surgir de sa lampe un djinn (Idris Elba) qui, comme tout bon génie qui se respecte, lui propose d’exaucer trois vœux… Mais Alithea, en fine connaisseuse, n’entend pas se ruer sur sa proposition sans réfléchir. S’engage alors un dialogue avec le djinn, qui lui raconte ses existences successives à chaque fois qu’on le fit jaillir de sa bouteille…

Les cinéphiles savent que le cinéaste australien George Miller a deux visages. Côté pile, c’est l’auteur de la mythique saga "Mad Max". Côté face, c’est le créateur de surprenants divertissements pour enfants, "Babe" le cochon et "Happy Feet", le pingouin amateur de claquettes… Son nouveau film se situe un peu à mi-chemin de ces deux tendances, voulant sans doute à la fois toucher les adultes et le jeune public, en adaptant une nouvelle de l’écrivaine anglaise A. S. Byatt (auteur de "Angels and insects", également adapté au cinéma). Le résultat est assez hybride car, même si le film recèle quelques séquences inventives dans les flash-back racontés par le génie, "Trois mille ans à t’attendre" hésite entre le conte pour enfants au premier degré et la réflexion philosophique au second degré sur le désir et la quête de bonheur. Cette hésitation laisse le spectateur un peu perplexe tout au long de la projection : trop complexe pour les enfants, trop sage pour les adultes, le film de Miller souffre de ne pas choisir son camp.

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Coup de théâtre (See how they run)

"Coup de théâtre"

Londres, années 50. Dans le West End, le quartier des théâtres, une pièce policière fait un malheur : "The mousetrap (La souricière)" d’Agatha Christie. Le succès est tel que des producteurs songent à l’adapter au cinéma… Mais rien ne va plus lorsque le réalisateur pressenti est sauvagement assassiné dans les coulisses du théâtre. Pour mener l’enquête, l’inspecteur Stoppard (Sam Rockwell, affublé d’un vieil imper et d’une grosse moustache), un tantinet blasé, est flanquée d’une jeune recrue, l’agent Stalker (Saoirse Ronan, pétillante), particulièrement motivée…

Le réalisateur Tom George, qui a fait ses classes en réalisant des séries pour la BBC, signe ici à la fois un hommage et un pastiche des "whodunit", les romans policiers à énigme popularisés par Agatha Christie. Le film respecte les règles du genre – un huis clos où tous les protagonistes deviennent, chacun à leur tour, des suspects – et en même temps, multiplie les clins d’œil et revisite les clichés souvent utilisés par "La reine du crime". La reconstitution d’époque est séduisante, le casting (où l’on retrouve aussi Adrian Brody et Ruth "The affair" Wilson) est réjouissant… Seule la mise en scène est parfois un peu trop appliquée et manque un peu de souffle. Mais l’ensemble est suffisamment facétieux pour générer un divertissement tout à fait recommandable.

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Canailles

L'affiche de "Canailles"

Suite à un casse qui tourne mal, Antoine, truand blessé à la jambe, parvient à se réfugier en banlieue dans la villa d’Elias, timide et solitaire professeur d’histoire. Tandis qu’une étrange relation, mélange de domination et de complicité, s’instaure entre les deux hommes, une femme flic, Lucie, mène son enquête sur le braquage…

Le réalisateur Christophe Offenstein adapte ici un roman noir américain, "Une canaille et demie" de Iain Levison. L’origine anglo-saxonne du scénario est tangible ; il y a ici un humour noir, et un trio de personnages un peu paumés qui rappelle la tonalité de l’inoubliable "Fargo" de Joel et Ethan Coen.

François Cluzet (Antoine) surjoue moins que dans ses précédents films, José Garcia (Elias) est très touchant dans ce contre-emploi de personnage introverti, et Dora Tillier fait preuve d’un abattage très séduisant. La réalisation d’Offenstein se met au service du trio, mais manque un peu d’invention ; dommage car voilà un film qui tranche salutairement avec les grosses comédies françaises.

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Chronique d’une liaison passagère

"Chronique d'une liaison passagère"

Simon, homme marié (Vincent Macaigne) et Charlotte, mère célibataire (Sandrine Kiberlain) se rencontrent, se plaisent, deviennent amants… Mais ils veulent que leur liaison reste légère, une suite de moments suspendus où les sentiments profonds et durables n’ont pas leur place. Joli projet, mais est-ce réellement possible de contrôler l’évolution de ses sentiments.

De film en film, Emmanuel Mouret, cinéaste discret mais pugnace, continue d’explorer ce qu’il est convenu d’appeler la "Carte du Tendre". En disciple d’Eric Rohmer, il signe une nouvelle fois un film très dialogué, à la fois raffiné et désuet. Kiberlain et Macaigne forment un couple dont l’alchimie semble un peu improbable – c’est le talon d’Achille du film. "Chronique d’une liaison passagère" est une variation sur un thème connu, par un cinéaste qui ne surprend plus. Mais qui, comme Rohmer, a son fan-club.

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Speak no evil

"Speak No Evil"

En vacances en Toscane, une famille danoise se lie d’amitié avec une famille hollandaise. Quelques mois plus tard, elle est invitée à passer un week-end dans leur maison aux Pays-Bas. Passé un moment d’hésitation, Bjorn et Louise décident d’accepter la proposition et prennent la route avec leur petite fille. Arrivés sur place, Bjorn et Louise, couple assez introverti, va aller de surprise en surprise

Ces dernières années, le cinéma scandinave a su souvent renouveler les genres du thriller et du film fantastique. Le réalisateur Christian Tafdrup, sans effets de manche, parvient à créer un climat de plus en plus malsain avec la chronique de ce week-end batave qui vire au cauchemar. Si le final verse dans une violence sans doute excessive, Tafdrup fait preuve d’un réel talent pour créer un climat de tension feutrée très prenant… Vous voilà prévenus.

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