Lorsqu’on évoque les puits de carbone naturels qui permettent d’absorber les émissions de CO2 et de ralentir le bouleversement climatique, on parle généralement des océans et des forêts. Mais un organisme, tapi en sous-sol, est organisé en super-réseau pour séquestrer des milliards de tonnes de dioxyde de carbone, sans qu’on n’y prête suffisamment d’attention.
Négliger ce réseau invisible, c’est compter sans Toby Kiers, professeure à la Vrije Universiteit d’Amsterdam et biologiste évolutionniste. Elle s’intéresse à ce monde "underground" capable de séquestrer chaque année au moins 5 milliards de tonnes de dioxyde de carbone, soit une quantité à peu près équivalente à celle émise chaque année par les Etats-Unis.
Le temps du champignon
C’est une opinion émise par ses soins dans le quotidien britannique The Gardian, en collaboration avec le biologiste Merlin Sheldrake, qui a attiré notre attention sur ce sujet. Pour les auteurs, ces champignons, qu’on appelle mycorhiziens, organisés en réseau sous terre, sont la "tache aveugle" mondiale de la lutte face à la crise climatique. Avec d’autres scientifiques, Toby Kiers a fondé une initiative baptisée SPUN pour "Society for the Protection of Underground Networks", afin de cartographier, conserver et protéger ces réseaux de champignons sous-terrains et protéger ainsi leur capacité de séquestrer le carbone.
"Dans le passé, toutes ces stratégies du changement climatique étaient vraiment focalisées sur les écosystèmes au-dessus du sol", nous explique Toby Kiers. "Notre initiative est un appel au réveil des consciences, à l’adresse du public et des gouvernants : il faut commencer à se concentrer sur le sous-sol. On estime qu’environ 25% de toutes les espèces vivent sous la terre. Et donc, essayer de les cartographier et les protéger est un impératif."