Cinéma

Les 40 ans d’un Eté meurtrier

Isabelle Adjani césarisée pour son rôle dans "L’été meurtrier"

© SNC

Par Nicolas Buytaers

Sorti le 11 mai 1983, il y a 40 ans, balancé entre le drame rural, le thriller érotique et le film de vengeance, avec ses acteurs incroyables et ses 4 César, "L’été meurtrier" a tout ce qu’il faut pour être considéré aujourd’hui comme un classique du Cinéma français. Hommage…

Voilà pourquoi je ne pouvais me passer d’elle… Elle donnait à la vie des coups d’accélérateur !

Il a raison Pin-Pon. Et comme il est mécanicien, il s’y connaît en coups d’accélérateur. Notez que le jeune homme est aussi pompier volontaire. Et il fallait bien toute sa candeur pour tenter d’éteindre cet incendie nommé Eliane…

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Mais reprenons tout depuis le début. Quand Florimond, dit Pin-Pon, croise le regard d’Eliane, son sang ne fait qu’un tour. Il en tombe immédiatement amoureux. Son charme ravageur rend les hommes bêtes et sa liberté (celle de vivre comme elle l’entend, et celle d’aimer aussi) agace les femmes qui en deviennent jalouses. Donc oui, personne ne peut rester de marbre face à la demoiselle qui, elle aussi, craque pour Pin-Pon. Mieux encore, ces deux-là se marient. Mais derrière cette romance se cache un terrible secret. Eliane est née suite au viol de sa mère par trois inconnus… ou presque car parmi eux il y aurait le père du jeune homme. En réalité, voilà des années qu’elle cherche à se venger. Et tout le village pourrait payer cette infamie…

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Sorti le 11 mai 1983, il y a 40 ans jour pour jour, nous devons le film "L’été meurtrier" au réalisateur Jean Becker, le fils de Jacques Becker, le réalisateur de "Touchez pas au grisbi" avec Jean Gabin, "Casque d’or" avec Simone Signoret ou "Ali Baba et les 40 voleurs" avec Fernandel. Jean a connu un étonnant début de carrière. Il commence comme assistant-réalisateur pour son père puis met en scène ses propres films comme "Un nommé La Rocca" avec Jean-Paul Belmondo. Nous sommes en 1961. Bébel, il le retrouve un peu plus tard dans "Tendre voyou" (1966). Et puis… plus rien jusqu’en 1983 où il revient avec "L’été meurtrier". Bon d’accord entre les deux, il a réalisé pas mal d’épisodes de la série télé "Les Saintes chéries" et de nombreuses publicités. Après cet "Eté", il fera encore une longue pause cinématographique pour ne revenir qu’en 1995 avec "Elisa", emmené par une magnifique Vanessa Paradis. Depuis, il enchaîne les sorties tous les 2 ans, plus ou moins, avec des films comme "Un crime au Paradis", "Dialogue avec mon jardinier" ou "Deux jours à tuer".

Adjani et Souchon, les stars de cet "Eté meurtrier"
Adjani et Souchon, les stars de cet "Eté meurtrier" © SNC

"L’été meurtrier" n’est autre que l’adaptation sur grand écran du roman éponyme de l’écrivain français Sébastien Japrisot publié en 1977. Un romancier dont les œuvres ont quasi toutes été transposées au cinéma. "Compartiment tueurs" de Costa-Gavras avec Simone Signoret et Yves Montand, "Piège pour Cendrillon" avec Dany Carrel, "La dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil" avec Benjamin Biolay ou "Un long dimanche de fiançailles" avec Audrey Tautou, tout ça, c’est lui. Il faut dire qu’il a le sens de l’intrigue et qu’il dépeint en quelques mots les premiers et seconds rôles comme personne. Voilà autant de qualités que nous retrouvons dans "L’été meurtrier" de Becker.

Adjani enflamme cet "Eté meurtrier"
Adjani enflamme cet "Eté meurtrier" © SNC

Cet "Eté meurtrier" mérite plus que jamais votre attention, voire une nouvelle vision. Si vous aimez les drames, les thrillers et les répliques bien balancées, vous serez comblés. Rajoutez à cela d’excellents personnages… troubles, troublants et troublés. Le tout interprété par des acteurs au talent indéniable à commencer par Isabelle Adjani qui enflamme littéralement l’écran. Eliane est aussi belle que douce, aussi déterminée que passionnée, ardente, bouillante, fiévreuse… folle, diront certains ? Peut-être ! Un rôle qui fit de l’actrice un sex-symbol, une star, une icône. En tout cas, possédant le même caractère libre que son personnage, quand Adjani refusa de monter les marches du palais des Festivals à Cannes en 1983 pour soutenir le film, les photographes de la Croisette lui en ont voulu et en guise de mécontentement, ils avaient posé à terre leurs appareils ! Une bouderie qui n’a pas empêché le film de recevoir l’année suivante 4 César dont celui de la Meilleure actrice pour Adjani et celui du meilleur scénario.

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Et comme je vous l’écrivais plus haut, pour contrebalancer cette fougue, il fallait bien toute la naïveté d’Alain Souchon, parfait dans le rôle de Pin-Pon. Et dire qu’au départ la production avait casté Gérard Depardieu et Patrick Dewaere (décédé juste avant le tournage). Les seconds rôles de cette histoire sont aussi parfaits comme Suzanne Flon, la grand-mère du pompier volontaire, rebaptisée "Sono cassée", ou bien encore François Cluzet, le jeune frère du sapeur mais aussi cycliste malchanceux. Sans oublier Michel Galabru et Roger Carel qui a cette réplique…

Si t’avais des chalumeaux à la place des yeux, la pauvre demoiselle ne pourrait plus s’asseoir pour un moment !

Il suffit d’un regard pour qu’Eliane enflamme cette partie du sud de la France (le film a été tourné à Gordes). Il suffit d’un de vos regards pour que ce drame aride, cette vengeance brûlante, échauffe vos esprits. Bref, il suffit d’une étincelle pour faire de cet "Eté meurtrier" un classique parmi les classiques, chaleureusement recommandé, à (re)voir avec ferveur !

Souchon sans Voulzy mais avec Adjani, ça change mais ça rime toujours
Souchon sans Voulzy mais avec Adjani, ça change mais ça rime toujours © SNC

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