Le PTB aura bientôt un nouveau président. Peter Mertens, l’actuel patron du PTB, souhaite passer la main. C’est un moment clef pour le parti Marxiste.
Grand bond en avant
Il faut rappeler aux francophones, que Raoul Hedebouw n’est pas le président du PTB (il le sera peut-être dans quelques semaines). Depuis 13 ans c’était l’Anversois Peter Mertens qui est à la tête du parti. C’est lui qui incarne le grand bond en avant du PTB, le virage qui a progressivement fait passer le PTB de groupuscule en décomposition à celui de principal parti d’opposition côté francophone.
Peter Mertens, prend donc la tête du parti en 2008, et succède au leader historique, Ludo Martens, stalinien vieille école qui prônait, entre autres, la guerre civile permanente. En restant fidèle au principe de base du parti, il fait évoluer lentement la doctrine, il change les codes de communication, la gestion interne, il ouvre lentement les structures.
Le résultat est là. Depuis 2008, le PTB a multiplié par 10 le nombre de ses membres, ils sont 20.000 aujourd’hui. Il a multiplié par 10 le nombre de sections (800) et est passé de zéro élu direct dans les parlements à 38, dont 12 au parlement fédéral en 2019. Unitariste, il constitue un groupe parlementaire qui dépasse Vooruit (9) égale le VLD (12) ou le CD&V (12), et qui tallone le MR (14).
Si Peter Mertens était patron d’une petite PME il serait un exemple pour la FEB et certainement nominé pour le prix de l’entreprise de l’année.
Révolution
Est-ce que Peter Mertens a changé la ligne stalinienne du PTB ? C’est souvent ce qu’on lui reproche, avoir changé la com, mais pas le message. Il est vrai qu’il n’y a pas eu de révolution, sans mauvais jeux de mots, par rapport à la doctrine Stalinienne et Maoïste. Mais plutôt une évolution.
Dans les évolutions poussées par Peter Mertens, l’idée de pratiquer une forme de populisme de gauche. Plutôt que de prêcher Marx ou la lutte des classes, l'idée est d'essayer de faire consensus autour de quelques thèmes qui ont déjà un large écho dans l’opinion. Taxer les riches, faire payer les multinationales, baisser la TVA sur l’énergie, dénoncer une élite coupée de la réalité de terrain. Plus récemment le PTB à prôné l’unité de la Belgique à force de drapeau Belge en pleine coupe d’Europe de Foot. Bien sûr ces "petits consensus" doivent servir à créer du conflit. Ce n’est pas un paradoxe, les marxistes sont par essence des dialecticiens (dépassement des contraires). L’objectif est bien d’unifier politiquement ces différentes causes sous la bannière marxiste de la lutte des classes. Les travailleurs contre les patrons, le peuple contre les élites ou les Belges contre les séparatistes. Cette unité est loin d’être acquise aujourd’hui.
Autre élément particulièrement développé sous Peter Mertens, l’entrisme dans les syndicats FGTB ou la CSC et la présence de terrain. Le PTB est présent dans beaucoup de mobilisations sociales, même très réduites, là ou les autres, et le PS surtout n’est pas.
Démocratie
La question principale c’est qu’est-ce que le PTB va faire de cette lutte des classes ? C’est là que le message du PTB n’est pas toujours très limpide. Il semble entre deux eaux. Quel est son rapport au pouvoir et à la démocratie ? Reprenons le prédécesseur de Peter Mertens, Ludo Martens, en 1989, lors de la chute du mur, est le seul parmi les leaders des partis de gauche à se désoler des élections libres. Nous sommes pour les élections libres, mais avec tous les partis qui acceptent les principes de base de la société socialiste. Si l’impérialisme veut introduire des partis qui travaillent pour la restauration du capitalisme et les multinationales nous ne sommes pas pour cette liberté-là.
Le PTB de Ludo Martens était réfractaire au pluralisme, condition essentielle de la démocratie dite "bourgeoise". Aujourd’hui le PTB semble avoir beaucoup moins d’objections à participer à des élections libres et de côtoyer sur les bancs parlementaires des partis capitalistes. Son rapport à la démocratie a incontestablement évolué. Mais ce qui reste en héritage c’est que le PTB a bien des difficultés à considérer qu’il peut gouverner avec des partis qui n’acceptent pas les principes de base de ce que le PTB considère comme une société socialiste. Le PTB ne considère comme impossible de gouverner avec des partis qui ne pensent pas comme lui.
D’où une difficulté. Si le PTB n’accepte pas de partager le pouvoir avec d’autres partis que lui, il risque de s’essouffler et de rester une petite PME. Si le PTB accepte de partager le pouvoir, il risque de s’écrouler. Désormais les voies de la croissance s'annoncent plus compliquée. Le PTB a trouvé la recette du succès, mais que veut-il en faire ? La PME PTB est donc à la croisée des chemins.