Selon le Procureur fédéral, la Belgique ne peut pas être qualifiée de narco-Etat, même si des activités criminelles liées au trafic de drogue s’y développent. Pour le Procureur fédéral, SKY ECC est un "succès": plus de 1300 personnes ont été arrêtées et "20 pays regardent dans la banque de données". Cela "montre que nous ne sommes pas un narco-Etat, parce que nous parvenons à enrayer cette évolution", réagit Frédéric Van Leeuw.
Mais le Procureur fédéral invite cependant à la vigilance. Alors qu’on se sent concerné par le risque terroriste, on est moins sensibilisé au risque de la criminalité organisée. "Or, chez nous, la criminalité organisée est beaucoup plus systémique que le terrorisme parce que cela touche vraiment à notre économie, il y a des sommes gigantesques qui sont blanchies et réinvesties dans notre économie", explique Frédéric Van Leeuw. Pour lui, il faut veiller à ne pas "laisser cela aller trop loin" car, "à un certain moment, cela va faire très mal, y compris à des gens qui n’ont rien à voir", précise le Procureur fédéral.
Le démantèlement du réseau SKY ECC a permis de mettre en évidence l’usage de cryptomonnaies et d’importants montants d’argent liquide. "L’argent n’est parfois pas blanchi, il est réutilisé directement dans les actions criminelles", explique Frédéric Van Leeuw.
Ce dossier d’ampleur a également permis de mesurer l’ampleur de la corruption. "Nous avons aussi eu un nombre assez impressionnant de dossiers de corruption, poursuit le Procureur. Il y a l’appât du gain : quand on vous propose 50.000 euros pour déplacer un container, ça tente. Il y a aussi la corruption forcée parce qu’on menace votre famille ou qu’on vous envoie une photo de votre enfant à la sortie de l’école et ce serait très compliqué d’y résister."
L’opération SKY ECC a constitué une vraie contre-offensive contre ce milieu de la drogue. "En arrêtant beaucoup de personnes, on les a beaucoup dérangés", explique notre interlocuteur. Il y a eu des arrestations dans d’autres pays que la Belgique. Mais ces arrestations ont aussi créé des vides. "D’autres organisations criminelles veulent avoir ce budget juteux et comme les équilibres ne sont plus là, elles se heurtent les unes aux autres", ajoute Frédéric Van Leeuw, ce qui expliquerait la survenance d’un certain nombre d’incidents à Anvers, Bruxelles ou Malmö.