Des cagoules de toutes les tailles, un gratte-dos, et même des "décorations pour arbre"… Voici les produits les plus populaires en ce moment sur la plate-forme Wish. Ce site de vente en ligne est devenu un peu plus difficile d’accès en France cette semaine. Les services français de la répression des fraudes ont en effet demandé le déréférencement de la plateforme.
En clair : un internaute français qui tape "wish" dans un moteur de recherche ne trouvera bientôt plus le lien direct du site en question. Par contre, il pourra toujours accéder à la plateforme en tapant "wish.com" dans la barre de son navigateur. L’application devrait aussi disparaître des magasins d’applications pour téléphones portables. Aucune mesure similaire n’est pour le moment à l’ordre du jour en Belgique.
La maison-mère de Wish a annoncé ce mercredi après-midi qu'elle entamait "un recours juridique" contre cette décision française. Dans un communiqué partagé par la chaîne BFM Business, l'entreprise déclare : "Nous avons essayé à plusieurs reprises d’engager le dialogue de manière constructive avec la DGCCRF [la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, NDLR]. Nous entamons maintenant un recours juridique pour contester ce que nous considérons comme une action illégale et disproportionnée." Début novembre, la plateforme avait déjà annoncé son intention d'améliorer la qualité des produits vendus par son intermédiaire.
"Il faut que notre riposte soit graduée"
Citée par Le Parisien, une source au ministère de l’Economie et des Finances reconnaît que "le blocage du nom de domaine, c’est-à-dire empêcher l’accès total au site sur le web français, ce serait la sanction ultime. Mais il faut que notre riposte soit graduée. Pour le moment, Wish répond encore un peu à nos demandes".
Sur France Info, Bruno Lemaire, le ministre français de l’Economie menace : "Soit Wish se conforme aux règles de protection des consommateurs soit nous irons plus loin et nous passerons du déréférencement à l’interdiction du site sur le territoire français."
Wish, qui a été créé en 2010 par un ancien ingénieur de Google, appartient aujourd'hui à la société ContextLogic. L’entreprise basée à San Francisco revendique quelque 100 millions d’utilisateurs actifs, et est entrée en Bourse à Wall Street en décembre 2020. Le site de vente en ligne agit en fait comme un intermédiaire entre des vendeurs et les consommateurs. La plateforme sert de vitrine et gère les paiements, mais ne stocke pas elle-même la marchandise.
Danger pour les consommateurs
Si Wish est dans le viseur des autorités françaises, c’est notamment parce que le site est accusé de proposer à la vente des produits de mauvaise qualité. "Nous avons prélevé 140 produits sur le site et la plupart étaient non conformes, voire dangereux", indique la DGCCRF dans Le Parisien.
Ainsi, 90% des appareils électriques analysés étaient considérés comme dangereux, tout comme 62% des bijoux fantaisie et 45% des jouets. Après avoir notifié la plateforme de la présence de ces produits illicites, la DGCCRF a constaté que, même une fois retirés, ils réapparaissaient souvent sous un autre nom. Elle a donc sommé Wish de se mettre en conformité et estime n’avoir depuis pas reçu de "réponse satisfaisante", d’où sa décision. La sanction devrait durer jusqu’à ce que Wish se remette en conformité avec la loi.
En novembre 2020, cette même DGCCRF pointait dans le chef de Wish "des pratiques commerciales trompeuses" telles que des réductions de prix "dénuées de toute réalité économiques", la mise en avant de produits "de forte notoriété dont certains ne sont pas disponibles sur la plateforme" ou encore la vente de produits portant des logos de marques déposées "de nature à induire en erreur le consommateur".
Une solution plus structurelle à une problématique qui dépasse de loin le cas de Wish
Les objets vendus sur Wish mais aussi sur d’autres plateformes telles que AliExpress, LightInTheBox, eBay et Amazon font aussi l’objet de critiques. Plusieurs organisations de protections des consommateurs européennes, dont Test-Achats, ont mené une enquête entre janvier 2019 et janvier 2020. Au total, 250 produits achetés sur ces sites et répartis en 18 catégories ont été testés.
Résultat : plus de six sur 10 d’entre eux présentaient un risque pour la santé. Risque de choc électrique, de court-circuit ou d’incendie pour des chargeurs USB, d’irritation des gencives pour des produits de blanchiment des dents, d’irritation cutanée suite à la présence de nickel dans certains bijoux ou encore asphyxie causée par des éléments fragiles de certains jouets… Autant de dangers identifiés sur les produits achetés lors de ce test.
"Les produits dangereux ont été signalés aux plateformes de vente en ligne avec la demande urgente de les retirer de la vente. Dans certains cas, le signalement a été rapidement suivi d’effet et les produits ont été retirés de la vente. Dans d’autres cas, la plateforme a répondu qu’elle ne voyait pas le problème ou n’a tout simplement pas donné de suite à l’alerte donnée par les organisations de consommateurs", écrit Test-Achats sur son site internet.
Dans le cas de la décision prise par la France concernant Wish, Julie Frère, porte-parole de Test-Achats pointe "une mesure ponctuelle par rapport à un problème beaucoup plus global". Et d’ajouter au micro de la RTBF : "Il y a en cours de discussion au niveau européen une législation qui vise à renforcer la responsabilité des plateformes dans les cas où on constate qu’il y a des objets dangereux pour la santé des consommateurs et que malgré les signalements, la plateforme ne prend pas de mesures raisonnables pour agir. Dans ce type de cas de figure, la plateforme pourrait être directement tenue responsable pour les produits qui sont vendus via son intermédiaire. Je pense que c’est une solution plus structurelle à une problématique qui dépasse de loin le cas de Wish."