Très vite un professeur de Liège, Damien Ernst, lui aussi ouvertement défenseur du nucléaire, prend la balle au bond et parle de liberté académique menacée par des intégristes antinucléaires, de journalistes qui ont peur de parler et d’un Conseil supérieur de la Santé qui s’est couvert de disgrâce avec un rapport indigent. Il est environ 11 du matin, et on n’a toujours pas discuté de ce qu’il y a dans le rapport.
Plusieurs élus du MR jusqu’au président, reprennent ces tweets, en s’indignant, en dénonçant une instrumentalisation à des fins partisanes. Le président du MR jugeait donc qu’on ne pouvait considérer ce rapport comme une base de décision. Il est environ 14h et on n’a toujours pas discuté de ce qu’il y avait dans le rapport.
Trois signatures
Qu’est-ce qui s’est passé ? Pourquoi trois scientifiques ont-ils retiré leur signature ? Ce sont trois scientifiques du centre de recherche nucléaire de Mol. Ils ne sont pas d’accord avec le rapport. D’après les autres experts signataires, ils ont au dernier moment retiré leur signature. Un revirement qui a surpris les autres experts qui nient toute pression. Ils ont bien cherché à rallier leurs collègues à leurs arguments, mais sans plus. Il n’y aurait pas eu de tête de cheval déposée dans leur lit. À ce stade les raisons profondes sont difficiles à établir. Mais il y a eu controverse tardive au sein du Conseil. Ce n’est pas rare que des experts se retirent, ou qu’ils signent une motion minoritaire. Sur Twitter on n’a toujours pas parlé de ce qui avait dans ce rapport. Et c’est ce qui se passe depuis hier, un gigantesque écran de fumée parti d’un petit tweet d’un journaliste du Tijd.
Un rapport qui ne tranche pas
J’y ai passé plusieurs heures hier. Et je suis bien incapable de critiquer en bien ou en mal la scientificité de ce rapport. Il me semble très étayé sur 142 pages, plusieurs experts sont des sommités mondiales dans leur domaine, en particulier en matière de sûreté nucléaire ou d’effet des rayonnements ionisants sur la santé. En réalité, une critique honnête de cette étude prendrait à un scientifique, un politique ou un journaliste plusieurs jours de travail.
Le rapport est beaucoup moins évident que ce que les titres d'articles de presses ont pu laisser penser. En fait, il ne tranche pas pour ou contre la sortie du nucléaire, mais montre que plusieurs points posent question en matière de développement durable, notamment les déchets.
Et voici une des conclusions du rapport : "Concernant les modalités du stop nucléaire, le CSS conclut qu’il y a des arguments pour et contre la prolongation éventuelle de 2 réacteurs nucléaires au-delà de 2025, mais qu’il n’y a pas d’éléments marquants qui "imposeraient" " un choix dans un sens ou dans l’autre. Chaque option présente des risques, mais des risques de nature différente et comportant des implications différentes d’ordre éthique, environnementales, sanitaires, économiques et de sécurité d’approvisionnement énergétique." Quel intégrisme, on se pince!
Tous ceux qui ont passé leur journée à disqualifier le Conseil supérieur de la Santé ont agi comme des vulgaires lobbyistes du tabac. Ils ont créé du doute pour éviter le débat. La nuance et la complexité leur fait peur. Et on ne peut en conclure qu’une chose au fond, ils ne veulent pas de débat.