Né à Blankenberge en 1889 et décédé en 1972, Frans Masereel est considéré comme un des pères du roman graphique, dont Art Spiegelman a reconnu l’influence. Maître de la xylogravure (la gravure sur bois), il a développé un langage visuel unique, expressionniste, presque cinématographique, où se côtoient et s’affrontent le noir et blanc de manière radicale.
Quand la première guerre mondiale éclate, Frans Masereel s’installe en Suisse, où il fait la connaissance des écrivains Stefan Zweig et Romain Rolland. Avec eux, il partage de profondes convictions pacifistes et humanistes.
C’est en là qu’en 2019, il publie à compte d’auteur son premier recueil de 167 images dessinées puis gravées sur bois : "Mon livre d’heures".
J’ai voulu faire une espèce de confession, qui est loin d’être véridique, dans laquelle il y a une partie d’invention naturellement. J’ai voulu raconter un petit peu, en images encore une fois, ce que j’étais et ce que j’aurais voulu être. C’est en somme une espèce de petite conception — ma conception philosophique — que j’ai essayé de traduire dans des images gravées sur bois.
Ce "roman en images", comme l’appelle son auteur, permet au lecteur de broder lui-même sur les images : "Le lecteur peut bâtir son propre roman sur mes images ; il peut l’interpréter même, à sa façon, sur une certaine base naturellement, à laquelle il est difficile d’échapper."
"Mon livre d’heure" est aujourd’hui considéré comme un chef-d’œuvre précurseur. Il s’agit du premier roman réalisé en images et sans parole, un format novateur imprimé à plus de 100.000 exemplaires en Allemagne dans les années 20. Pendant la guerre, les supports en bois originaux à partir desquels les gravures ont été réalisées, stockés chez l’imprimeur de Masereel, ont ensuite tous été saisis et détruits par les nazis.
Tous les dessins préparatoires, eux, ont survécu, et sont à voir dans l’exposition Frans Masereel à Gand. On peut également y découvrir un grand nombre de gravures en grand format, regroupés par thèmes. Une exposition qui se tient au musée des Beaux-Arts de Gand jusqu’au 5 juin.