A Verviers, c’est peut-être le début de la fin de la saga politique de l’été, celle de l’éviction de la bourgmestre socialiste Muriel Targnion. Victime collatérale de cette affaire, le code de la démocratie locale. Explications.
Un accord est intervenu sur la répartition des postes entre les futurs partenaires du nouveau pacte de majorité à savoir le PS et le cartel composé du MR, de la liste Nouveau Verviers et du cdH. Sans entrer dans les détails, un poste d’échevin a été coupé en deux. La moitié du mandat pour le PS, l’autre pour le cartel. C’est un point qui devrait débloquer donc la situation politique, figée depuis plusieurs semaines.
A première vue, bon pas de quoi fouetter un chat. C’est un rififi local comme on en connaît çà et là. Une mésentente entre une bourgmestre (Muriel Targnion) et un membre de la majorité, du même parti le PS, le président du CPAS (Hassan Aydin). Cela arrive de temps à autre que des rivalités soient tellement fortes que la majorité soit remaniée.
Pas de nouvel Emir Kir
Mais il y a plus que ça donc qui se joue à Verviers. Cette affaire est singulière, à plus d’un titre. Retenons deux dimensions. D’abord la manière dont le PS a réglé cette affaire. Avec l’envoi de deux émissaires du Boulevard de l’empereur, deux proches de Paul Magnette, avec une mise sous tutelle très autoritaire de la section locale du parti. Comment l’expliquer ?
Muriel Targnion était une proche de Stéphane Moreau, en froid avec le parti depuis sa présidence très accommodante chez l’ex Publifin. C’est une conséquence très indirecte de l’affaire. Et puis Muriel Targnon a eu la mauvaise idée de désobéir aux consignes et de faire éclater au grand jour les fractures du PS, en particulier à Verviers la fracture communautaire. Après l’affaire Emir Kir à Bruxelles, le PS voulait à tout prix garder une cohésion et ne pas perdre Hassan Aydin (2388 voix). Résultat, l’exclusion de Muriel Targnon.
Cette intervention radicale de Paul Magnette a été diversement appréciée. Des élus dont Marc Goblet et André Frédéric, ont écrit à la tutelle, comprenez à Paul Magnette, pour se plaindre, entre autres du non-respect des statuts du parti. Manifestement, il y a un acte d’autorité du nouveau président du PS qui se jouait derrière tout ça. Et la fin justifiait visiblement des moyens peu orthodoxes.
Code de la démocratie locale
C’est la deuxième leçon à tirer de toute cette affaire. Le code de la démocratie locale, qui fixe les règles de désignation des bourgmestres et échevins en Wallonie n’a pas résisté aux vicissitudes de la vie partisane. L’idée de ce code était de donner plus de pouvoir aux citoyens. Quand un pacte de majorité est conclu, le bourgmestre est celui qui à le plus de voix sur la liste la plus importante. A Verviers, le PS et en l’occurrence Muriel Targnion.
Au bout du compte. Pour épargner toutes les sensibilités, c’est Jean François Istasse qui sera désigné bourgmestre. Soit le 7e score de la liste. 539 voix, contre 2999 à Muriel Targnion, 2388 à Hassan Hadyn, 1085 à Malik Ben Hachour. Jean Francois Istasse aura moins de voix que plusieurs de ses futurs échevins. C’est exactement ce que voulait éviter le code de la démocratie locale.
Plusieurs élus ont dû se désister pour laisser passer Jean François Istasse. Or le code prévoit qu’ils ne peuvent plus siéger comme échevin ou président de CPAS. Justement pour éviter les arrangements partisans et renforcer le choix du citoyen. Oui mais, justifie le PS, ceci ne vaut que pour les désistements volontaires. Si le désistement est contraint, alors la règle du code ne vaut pas.
C’est un vide juridique disent plusieurs juristes. Peut-être, mais si la lettre est respectée, l’esprit du code de la démocratie locale lui n’a en tout cas pas survécu à cet épisode verviétois. C’est la deuxième fois. Le code avait déjà été maltraité pour permettre une solution politique à Charleroi. Pour reprendre l’expression du Premier ministre Leo Tindemans en 1978 à propos de la constitution belge, le code de la démocratie locale est un chiffon de papier.