Environnement

Le chat, cet adorable "petit tueur", classé espèce invasive en Pologne et source de prédation importante en Belgique

© Getty Images

Par Estelle De Houck via

Élégant, joueur, câlin… Les amateurs de chats ne manquent pas d’éloges pour décrire leur boule de poils préférée. Pourtant, sous ses airs attendrissants, le félin ne serait pas sans danger pour la biodiversité. En Pologne, un institut scientifique national a même décidé de le classer parmi les espèces exotiques invasives.

A côté des 1786 animaux classés comme espèces exotiques envahissantes en Pologne, se trouve désormais… Le Felis Catus. Comprenez : le chat domestique. En effet, d’après l’Académie polonaise des sciences, le félin représenterait un danger pour les oiseaux ainsi que pour d’autres mammifères. Quant à l’adjectif "exotique", le chat le doit à l’endroit où il fut domestiqué il y a 10.000 ans : le Moyen-Orient ancien.

Le chat correspond à 100% aux critères d’une espèce exotique envahissante

"Le chat correspond à 100% aux critères d’une espèce exotique envahissante", en conclut Wojciech Solarz, le biologiste à l’origine de cette décision, auprès de l’Associated Press.

Cette décision a beaucoup fait parler d’elle en Pologne, suscitant de nombreuses réactions négatives. Le scientifique a d’ailleurs dû se défendre et assurer qu’il ne souhaitait pas faire de mal aux chats : l’institut recommande simplement aux propriétaires de garder leur animal à l’intérieur le plus possible durant la saison de reproduction des oiseaux. Ni plus ni moins.

Ce verdict n’a pourtant rien de surprenant, comme l’explique Thierry Hance, professeur à l’Ecole de biologie de l’UClouvain, spécialisé en gestion des bioagresseurs. En effet, "l’Union internationale pour la conservation de la nature classe déjà le chat parmi les espèces invasives.” La décision polonaise n’a donc rien d’une première.

Des chasseurs confirmés

Il faut dire que les Felis Catus ont conservé leur instinct de chasseur : "les chats tuent, même s’ils sont nourris", explique le spécialiste. "Et dans leurs proies, 52% ne sont pas consommées."

"Un chat est très autonome : il rentre et sort seul de la maison. Il visite donc un environnement relativement grand autour de lui. Et donc s’il y a un chat dans la plupart des maisons d’un quartier en campagne, ça fait des dégâts."

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Par conséquent, le chat est le principal responsable de la mortalité des oiseaux des jardins. Et son menu ne se limite pas aux volatiles : souris, mulots, orvets, campagnols, musaraigne, grenouilles, lézards, jeunes lapins ou écureuils… La liste est longue. "Il est très généraliste, c’est surtout la taille qui est une limitation pour lui."

Quid en Belgique ?

Chez nous aussi, l’animal peut faire des dégâts. D’autant plus que sa densité est importante en Belgique : nous serions à plus de deux millions de chats recensés, selon Bruxelles Environnement et ce chiffre augmenterait en moyenne de 6% chaque année. Et les chats se reproduisent à grande vitesse, comme l’explique le site Wallonie.be, "un couple de chats non stérilisés peut entraîner une descendance de 6000 chats en seulement cinq ans."

Pour éviter leur prolifération, la stérilisation est d’ailleurs obligatoire depuis 2017 en Wallonie, et 2018 à Bruxelles.

Une vétérinaire de la SPA La Louvière poussait récemment un coup de gueule pour que les propriétaires de chats effectuent bien cette stérilisation : "Chaque année c’est le même massacre ; le même crève-cœur. Non on ne fait aucune euthanasie de convenance je préfère encore les garder dans ma salle de bains ou en avoir 42 au cabinet que d’envisager cette solution. Mais chaque année le surnombre entraîne des épidémies et le typhus nous les emporte presque tous."

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Des astuces pour sensibiliser les propriétaires

Par ailleurs, il existe un certain nombre d’astuces pour favoriser la cohabitation entre les chats et son environnement. Natagora conseille par exemple aux propriétaires de chats de les faire vacciner – pour "éviter la transmission de maladies à la faune sauvage".

Autre possibilité : placer les nichoirs et mangeoires dans des endroits inatteignables pour le chat. Par ailleurs, Natagora recommande également – comme en Pologne – de "limiter le temps de chasse au jardin en le maintenant à l’intérieur, principalement en période de nidification”.

Enfin, Thierry Hance recommande de mettre une clochette au cou des chats. "Il sera repéré beaucoup plus facilement par les autres animaux", explique le professeur à l’École de biologie de l’UClouvain.

Certes, "les chats exercent une pression de prédation importante… Mais tout n’est pas négatif", relativise le spécialiste. "Le chat a eu un rôle très important au sein des fermes parce qu’il protégeait les stocks de céréales des rats et des souris. C’est d’ailleurs pour cela qu’il a été domestiqué à l’origine."

"Et quelque part, c’est comme ça aussi qu’on a conservé son instinct de chasseur", conclut Thierry Hance.

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