Sculpteur et céramiste belge à la renommée internationale, Johan Creten est né à Tirlemont en 1963. Il a été pensionnaire de l’Académie de France de Rome - Villa Médicis - en 1996. Il travaille ensuite à Miami et au Mexique et présente son oeuvre aux quatre coins du monde. Il est le premier artiste à effectuer une résidence à la Manufacture de Sèvres entre 2004 et 2007. En 2005, il expose dans les salles Renaissance du Louvre. En 2020, une grande exposition lui est consacrée à la Villa Médicis. Johan Creten illustre magistralement le renouveau de la céramique, une pratique décriée dans les années 1980, qui aujourd’hui occupe une place singulière dans l’art contemporain.
Un bestiaire humain
La Piscine à Roubaix présente des sculptures emblématiques de Johan Creten. A l’extérieur du bâtiment, La Chauve-Souris, un bronze réalisé avant la pandémie de Covid-19, peut accueillir le visiteur entre les ailes déployées du chiroptère. A l’intérieur du musée, une salle expose Bestiarium, un bestiaire constitué de dix-sept sculptures en céramique émaillée. L’ensemble réunit La Mouche Morte, L’Hippocampe secret, L’Escargot Lent, L’Araignée Morte, l’Agneau, le Lièvre, … Des animaux de la fable existentielle ! Des êtres de grès blanc chamotté dialoguent avec le spectateur et interrogent la condition humaine. Une charge de mélancolie trouble le regard attentif qui parvient à séparer les couleurs vives des céramiques de l’ombre projetée par l’inquiétante étrangeté d’un bestiaire aussi humain. Un livre-catalogue Bestiarium est édité par Gallimard
Un art guérisseur
Une salle consacrée à l’histoire culturelle et sociale de Roubaix montre une œuvre à portée politique. C’est dans ma nature (2001) de Johan Creten est un projet collaboratif mené avec des jeunes d’une école d’art d’Aulnay-sous-Bois. Les logements sociaux de la commune présentent des façades abîmées. L’objectif est la rénovation des bâtiments en incorporant des céramiques au béton des HLM. La conception utopique d’un art guérisseur offrant une cicatrisation à la blessure sociale n’est pas partagée par les politiques. Le projet fait long feu. Les 65 reliefs en céramique sont collés sur des supports de murs en briquettes factices. L’ensemble est constitué de 10 panneaux mobiles. Les murs peuvent bouger. L’utopie se déplace. Les terres cuites émaillées représentent des insectes. Les collégiens ont projeté leurs émotions sur la gente des puces, sauterelles et autres fourmis. C’est dans ma nature rappelle la fable Le scorpion et la grenouille de Jean de La Fontaine dans laquelle le batracien accepte de transporter le dangereux passager sur l’autre rive de la rivière. Au milieu du passage, le sorpion lui injecte son venin en répliquant à sa victime Piquer est ma nature. Johan Creten refuse la morale de la fable et, à l’instar de Joseph Beuys, mise sur la guérison par l’art.
Johan Creten au micro de Pascal Goffaux.