Pour le professeur d’économie digitale à la Brussels Solvay School, c’est là la vraie question qu’il faut se poser. Comment faire en sorte que notre modèle fiscal s’adapte à cette nouvelle réalité ? "La nouvelle réalité, c’est qu’en fait, la part de l’emploi, c’est-à-dire des salaires dans la richesse nationale, diminue dans l’ensemble des pays développés depuis maintenant une trentaine ou une quarantaine d’années, alors que c’est une valeur qui est normalement extrêmement stable historiquement."
Ce constat est extrêmement préoccupant à double titre, explique-t-il. "D’abord parce que ça veut dire qu’effectivement la valeur est de plus en plus le fait des machines et donc du capital, on va dire, et de moins en moins le fait du travail. Probablement parce que les humains, de plus en plus, sont dans des rôles de contrôle de ce que font les machines plutôt que de véritables productions." Cela pose, au niveau fiscal, un énorme défi "parce que toute notre fiscalité reposait sur le travail et très, très peu sur le capital."
Pour Nicolas van Zeebroeck le véritable enjeu de la fiscalité de demain, est de déterminer comment déplacer davantage la fiscalité du travail vers le capital "qui n’est pas du tout assez accès taxé chez nous." L’idée serait de plus de taxer les revenus produits par la machine, et mieux encore que les revenus, ce sont les profits taxés par la machine, explique-t-il.
"Ce qui est risqué, c’est de taxer en fait un outil indépendamment de son utilisation et de la valeur qu’il crée. Or, Comeos (la fédération qui représente les supermarchés, ndlr) a un point quand ils disent qu’ils sont un secteur dans lequel les marges bénéficiaires nettes sont assez faibles, on est à 2 ou 3% de marge en moyenne dans la grande distribution. Alors dans notre secteur d’activité, on est à 20, 25 ou 30%. Et donc, si l’enjeu c’est d’aller chercher de l’argent là où il y en a, comme le disait Catherine Moureaux, allons le chercher dans les secteurs qui font vraiment de très grosses marges et où ça fait sens de taxer les gains en capital."
Ce spécialiste préférerait : "qu’on taxe les gains en capital, c’est-à-dire le flux, la valeur que génèrent les machines, plutôt que de taxer la machine elle-même qui est plus un frein à l’innovation." Et il donne l’exemple du seul pays qui l’a vraiment fait à grande échelle qui est la Corée du Sud. "La Corée du Sud l’a vraiment fait explicitement comme un moyen de ralentir l’innovation. Pour eux, l’innovation est en train d’aller un peu trop vite et donc ils se sont dit, on va mettre une taxe sur les robots parce qu’on va ralentir, on va freiner l’innovation.'
Le secteur ne représente que 2 ou 3% du marché. Mais si on taxait les machines pour un autre secteur, peut-être plus financier, là, ça fonctionnerait mieux ? Oui et non, estime Nicolas van Zeebroeck, "parce que de nouveau, la question c’est qu’est-ce qu’on veut taxer ? Est-ce qu’on veut taxer encore une fois, juste un actif ou est-ce qu’on veut taxer des revenus ?"