Laurent Colemonts, un nom bien connu des amateurs de football.
Le Bruxellois a en effet officié comme arbitre en D1 belge jusqu'en 2016. Et s’il occupe encore des fonctions au sein de l’arbitrage belge, il est aussi le patron des arbitres en... hockey. Un transfert qui pourrait étonner.
" Mais je fréquente le monde du hockey depuis plus de 25 ans via mon ex-épouse ", précise Laurent Colemonts. " J’ai coaché, j’ai arbitré des petits matchs pour rendre service et j’ai également eu des fonctions dans un club bruxellois. Ensuite, il y a 2 ans, fort sans doute de ma double expérience dans le foot et le hockey, la fédération belge de hockey m’ a proposé de reprendre le poste de patron, même si je n’aime pas le terme, des arbitres de hockey. Et je n’ai pas pu dire non. C’était grisant et je suis quelqu’un qui aime les défis. "
Un cas assez rare entre deux sports et tout ne fut pas simple au début. Certaines personnes ne voyant pas d’un bon œil l’arrivée d’un arbitre de foot dans le monde du hockey.
" Ce ne fut, en effet, pas simple. ", reconnait le Bruxellois. " Certains ont sans doute craint de gros changements. Mais la plus grosse erreur aurait été d’arriver avec mes gros sabots et de tout révolutionner. Néanmoins, nous tentons de bouger les lignes petit à petit. Cela prend du temps, sans compter que la crise sanitaire, arrivée six mois après ma prise de fonction, n’a pas aidé. "
Autre paramètre : les habitudes ou les us et coutumes parfois bien ancrées dans le monde de la petite balle blanche. Selon Laurent Colemonts, le hockey belge est parfois resté à l’époque où il était largement confidentiel. " Par certains aspects, l’arbitrage belge en hockey est resté bloqué à l’époque où celui-ci n’était pratiqué que par 10 000 personnes. A l’époque, les arbitres connaissaient pratiquement tous les joueurs. Ce n’est plus le cas aujourd’hui avec plus de 50 000 membres. Et pourtant, il n’y a toujours pas de contrôle d’identité avant le match par exemple. On est le seul sport où demander une carte d’identité à un joueur choque. "
Entre temps, le hockey a en effet connu un véritable boom. Le niveau du championnat belge a également particulièrement augmenté. Peuplé de ses champions du monde et olympiques, la division d’Honneur belge (DH) est devenue l’une des plus performantes au monde. " Mais l’arbitrage n’a pas vraiment suivi cette courbe en termes de préparation des arbitres ", regrette l’ancien arbitre de D1. " On n’est pas encore dans cette logique de préparation d’un match pour les arbitres. On siffle des gars qui sont dans le top mondial. Les rencontres sont régulièrement télévisées. Mais tous les arbitres ne sont pas encore prêts à certains sacrifices pour se mettre à leur niveau. Néanmoins, je peux comprendre que pour les arbitres plus anciens, et ils sont nombreux, qui ont toujours fonctionné comme cela, ce changement peut être compliqué. On travaille donc aussi sur la nouvelle génération afin de leur inculquer directement les bonnes habitudes en termes de préparation physique par exemple ".
Un décalage entre des joueurs, surentrainés, et des arbitres encore amateurs qui posent de plus en plus de problèmes. Il n’est pas (plus) rare d’entendre des acteurs – parfois avec une certaine virulence - se plaindre de cet écart dans la préparation.
Des tensions entre joueurs, public et arbitres qui ont parfois dépassé les limites, poussant certains d’entre eux, parfois du top, à stopper purement et simplement l’arbitrage ces derniers mois. Des altercations qui sont aussi le revers de la médaille du succès du hockey où les enjeux sportifs et financiers sont de plus en plus importants. " Mais on doit vraiment prendre le problème au sérieux. ", prévient Laurent Colemonts. " On doit protéger nos arbitres. D’autant plus, qu’au hockey, il n’y a pas de réel stade où les arbitres sont séparés du public par exemple. Ils sortent du terrain et sont directement au contact des joueurs et du public.
De plus, si on ne fait rien, on va se retrouver dans la situation du football au début des années 2010. A l’époque, on avait perdu un nombre d’arbitres incalculable à la suite de comportements inadéquats sur et en dehors du terrain. On doit y être attentif. J’ai assisté à une rencontre, il y a quelques semaines, où le coach a insulté un jeune arbitre. C’est inacceptable et cela me touche parce que j’ai vécu cela à l’époque. Je n’ai pas envie qu’un jeune soit démotivé à cause de ce genre de comportement. ".
Une motivation pas simple à conserver et ce n’est pas l’aspect financier qui pourrait les retenir. En effet, pour un match de Division d’honneur, un arbitre gagne 56 euros par rencontre (hors frais de déplacement). Un montant très faible quand on compte le temps réel (+/- 4h) passé sur une journée et les entrainements en semaine.
" C’est clair que c’est un problème. Mais on ne va pas pouvoir, du jour au lendemain, augmenter ces défrayements par cinq. Néanmoins, on travaille sur une augmentation des rémunérations pour les arbitres du top à qui on demande une plus grande implication. Il est urgent parce que les tensions entre joueurs, aux rémunérations de plus en plus importantes et qui s’entrainent beaucoup, et les arbitres se multiplient ces derniers temps. Et l’argument du manque de préparation est souvent avancé par les équipes. "
Le défi de Laurent Colemonts est donc de taille : permettre à l’arbitrage belge de suivre la courbe et le succès de son sport en évitant les erreurs et les problèmes que le monde du football a connu avant lui.