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L’Allemagne fait dérailler l’accord sur la fin des voitures diesel ou essence : une grosse claque pour le processus législatif européen

L'oeil sur l'Europe

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Coup de théâtre dans l’UE cette semaine ! L’Allemagne a claqué le beignet à toute l’Union européenne en disant non à la fin programmée du moteur thermique en Europe en 2035.

En soi, l’Allemagne a le droit de dire non. Mais c’est le moment choisi pour marquer son opposition qui dérange. Parce qu’en octobre dernier, les Etats membres et le Parlement européen avaient déjà topé pour enterrer le moteur à combustion. Et là l’Allemagne ne s’y était pas opposée. Cette semaine, les 27 devaient juste entériner cet accord. Ce ne devait être qu’une formalité et c’est là, à la 25ème heure que le FDP, le parti libéral allemand qui fait partie de la coalition au pouvoir à Berlin, décide de dire nein, on arrête tout. A ce niveau-là c’est exceptionnel.

A qui profite le crime ?

Officiellement, ce brusque retournement fait écho aux inquiétudes de l'industrie automobile allemande. Un géant économique : 800.000 emplois, plus de 400 milliards d'euros de chiffre d'affaires, la moitié des voitures qui roulent en Europe sont des voitures allemandes. Das Auto est devenu le symbole de la réussite économique du pays. Un symbole qui certes, appréhende le passage au tout électrique, mais c’est aussi un secteur qui n’aime pas l’incertitude. Bon gré, mal gré, les constructeurs automobiles ont compris qu’ils allaient devoir négocier le virage de la transition énergétique. Ils ont déjà intégré l’échéance de 2035. Et 2035 c’est demain. L'industrie a déjà mis ses chaines de production en ordre de marche. En clair, cette remise en question ne fait pas forcément leurs affaires.

Par contre, sur le plan politique, le FDP espère bien en retirer quelque chose. Aujourd'hui le parti libéral allemand est à la ramasse. Ces derniers mois, il se prend gamelle électorale sur gamelle électorale. A force, ça doit lui donner envie de cogner. C’est ce qu’il a fait en brandissant ce veto de dernière minute. Le FDP devient ainsi le héros du moteur à piston, le défenseur des intérêts du pays. Il espère surtout que cette stratégie va lui ramener quelques voix dans les urnes.

Pour exister en Allemagne, le FDP cogne à Bruxelles

Ce n’est pas la première fois que des intérêts domestiques prennent le débat européen en otage. Sauf que jusqu’à présent ces méthodes de voyou c’était plutôt la Pologne ou la Hongrie qui les utilisaient. Pas le meilleur élève de la classe. Et généralement ce chantage s’effectue pendant le processus législatif. Pas une fois que tout le monde a dit banco. Pas après que les députés ont voté le texte. Vous comprenez maintenant pourquoi ce non allemand est un véritable uppercut dans le ventre du processus législatif de l’UE

Trois conséquences à prévoir

La première, c’est le risque que cette grosse mornifle ne donne envie aux autres Etats de montrer les muscles. Si tout le monde se comporte comme l’Allemagne, c’est la bagarre générale. Il n’y a plus d’accord possible en Europe me confiait un ténor du parlement européen.

La seconde, c’est que la parole de l’Allemagne autour de la table du Conseil vient de perdre en crédibilité. Là encore sans confiance entre les 27, pas d’accord possible en Europe.

La troisième enfin c’est que le Pacte Vert de Ursula von der Leyen est aujourd’hui complètement sonné. Cette fin du moteur thermique, c’était le premier gros texte qui devait concrétiser les engagements des Européens à devenir neutres en carbone d'ici 2050. Le reporter aux calendes grecques, c’est un très mauvais signal pour la transition écologique.

Comment recoudre les morceaux ?

Recoller les morceaux ne sera pas tâche facile. D’autant que comme Olaf Scholz n’a aucune envie de faire exploser sa coalition, la position du FDP est devenue la position allemande.

Berlin ne va pas bouger. Privilège allemand, c’est aux autres de s’adapter. La Commission cherche un compromis. Il passera sans doute par une révision du texte. Ca veut dire mettre à la poubelle tout ce qui a déjà été fait. Et recommencer à zéro. Ca va être du sport. Avec la perspective des élections européennes l’année prochaine, la politique européenne risque de devenir un gigantesque ring de MMA d’où personne ne sortira gagnant...

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