Ne leur parlez surtout pas de "sanctions" pour des travailleurs malades. Le gouvernement met davantage en avant un "Trajet Retour au travail". Objet de plusieurs débats depuis de nombreux mois, un avant-projet de loi sur l’intégration des malades de longue durée sera adopté par le conseil des ministres ce vendredi matin. Une conférence de presse est annoncée dans la foulée. Cela ne signera pas forcément la fin de la polémique.
Il y a aujourd’hui en Belgique, plus de personnes qui souffrent de maladie de longue durée que de personnes au chômage. Comment réintégrer mieux et plus vite ces 500.000 travailleurs écartés pour cause de maladie ? Le gouvernement mise sur des "coordinateurs" censés épauler les médecins-conseils actuels. En cas de refus de rencontrer le "coach" ou de remplir un formulaire, les autorités sortent le bâton.
Quelle sera la procédure ?
Après 10 semaines d’incapacité, le travailleur devra remplir un questionnaire dans lequel seront examinés les facteurs qui peuvent favoriser ou empêcher la reprise de travail. Le travailleur aura deux semaines pour le compléter correctement.
Si le médecin-conseil ne reçoit pas le questionnaire dans les délais, il convoquera le travailleur pour un examen médical. En cas d’absence ou de refus de compléter le document, une sanction financière sera appliquée. Le travailleur pourra perdre jusqu’à 2,5% de son allocation. C’est cette sanction qui, depuis octobre, suscite de vives réactions sur les bancs de l’opposition au sein du parlement.
En fonction de ce questionnaire, et d’un éventuel examen médical, le médecin jugera de l’opportunité d’une reprise du travail. En cas de feu vert, c’est le " coordinateur " qui prendra le relais lors d’un premier contact. C’est le début du " Trajet Retour au travail ".
Quel retour pour quel travail ?
Actuellement, seuls 10% des malades de longue durée sont capables de reprendre le travail et à l’intérieur de ce groupe, environ la moitié retrouve le chemin du travail par ses propres moyens. Pour le ministre de la Santé Frank Vandenbroecke, le "Trajet", présenté par le gouvernement fédéral, doit servir de coup de pouce :" il n’y a aucune obligation pour quelqu’un qui est malade de longue durée d’accepter un emploi, ce qu’on demande c’est que les gens aident à recueillir toutes les informations nécessaires pour examiner les possibilités qui existent ".
Différents rapports ont illustré le manque d’efficacité des dispositifs actuels.
Les textes de l’avant-projet précisent que l’objectif est de retrouver "une occupation adaptée aux possibilités et aux besoins" : cela peut être un travail rémunéré, mais aussi un "emploi dans l’économie sociale, le bénévolat ou d’autres formes d’activités".
Des sanctions aussi pour les entreprises
Si le ministre de la Santé entend responsabiliser davantage les travailleurs, ce sera le cas aussi pour les employeurs. Les entreprises de plus de 50 collaborateurs qui ont trop de malades de longue durée ou qui n’aident pas suffisamment à remettre au travail sont également visées : " on va créer un système de clignoteurs qui va indiquer aux entreprises de plus de 50 personnes s’ils dépassent un seuil critique de renvois de leur personnel en maladie de longue durée". Viendra d'abord un avertissement en forme de conseil : "s’ils dépassent ce seuil, ils vont recevoir d’abord une information sur le mode 'attention vous êtes un peu exceptionnel quand même, vos collègues font mieux’ et si la déviation persiste, il y aura une sanction financière". Et le ministre d’ajouter que le but n’est pas de collecter des amendes mais de sensibiliser les entreprises à ce qui est leur responsabilité.
Les partenaires sociaux aux barricades
Dans un récent avis, le Conseil national du travail a mis en garde le gouvernement contre les dérives du mécanisme de sanction. Les partenaires sociaux soulignent "la nécessité d’une approche positive et globale". Syndicats et patrons estiment que le parcours de réintégration n’aura pas suffisamment d’impact pour réduire drastiquement le nombre de personnes en incapacité de travail. Ils plaident pour davantage de mesures préventives pour endiguer la problématique.