Exposition

La Vie Matérielle à la Centrale - 12 artistes donnent corps à la matière

Glass Gate, Loredana Longo - 2021

© Xavier Ess

La Centrale, centre d'art contemporain bruxellois, présente l’exposition La Vie matérielle, un dialogue entre 12 créatrices, italiennes et belges, autour du lien entre l’art et la vie. La construction de l'œuvre au travers de la matière; la construction de soi comme matière à expression. Le titre de l'exposition, La Vie matérielle, renvoie au livre éponyme de Marguerite Duras écrit à la fin de sa vie. Une lecture rétrospective sur différents aspects de son existence, en tant qu’écrivaine et en tant que femme. 

Maestà (Pala della Madonna della Neve , Stefano di Giovanni) - Trash Series, Serena Fineschi - 2021
Maestà (Pala della Madonna della Neve , Stefano di Giovanni) - Trash Series, Serena Fineschi - 2021 © Xavier Ess

Cette exposition, créée en Italie sous le commissariat de Marina Dacci, a été repensée pour La Centrale en collaboration avec sa directrice artistique Carine Fol. Pour la curatrice italienne, le point de départ est la volonté de briser les frontières entre l’art populaire et les beaux-arts. Les 12 artistes utilisent des matières organiques et des objets usuels sans valeur détournés de leur usage habituel. Ce sont des plantes, des feuilles mortes, de la   terre cuite, de la laine, du verre, des bouteilles, du métal, des papiers d'orange, du tissu, de la résille, des feutres et même des emballages de Ferrero Rocher formant un monochrome éblouissant qui ouvre l'exposition. Une oeuvre (Maestà - Trash Series) de Serena Fineschi, à la fois hommage aux tableaux dorés à la feuille d'or et désacralisation de l'histoire de l'art. Marina Dacci a défini différents thèmes, comme "Ce que ma forme raconte" autour du corps, "Paysage mental", "Esthétiques de la destruction et de la reconstruction" ou "Matériaux pauvres" où Serena Fineschi résonne avec la belge Arlette Vermeiren, née en 1937, et qui noue de manière compulsive différents matériaux comme des papiers d'emballage, des tissus, des étiquettes de vêtements qu'elle récolte inlassablement. L'œuvre d'une vie. Elle présente un fascinant assemblage coloré en tulle. Intense, compulsif, léger. 

Détail de l'installation en tulle noué d' Arlette Vermeiren
Détail de l'installation en tulle noué d' Arlette Vermeiren © Vincen Beeckman
Détail de l'installation de Ludovica Gioscia
Détail de l'installation de Ludovica Gioscia © Xavier Ess

L'intime, stéréotype féminin

Le récit de soi comme matière de l'œuvre colle à la peau des femmes artistes (Sophie Calle, Tracey Emin, Christine Angot, Marguerite Duras...) et apparaît aussi dans La Vie matérielle, de façon allusive comme "L'exercice du lointain" de la libanaise Elena El Asmar installée à Sienne qui présente le paysage d'une ville orientale  formé de volumes de verre recouverts de résille - image fantôme et sensuelle, menaçante et endeuillée- ou de manière frontale comme l'installation faite d'objets quotidiens de Ludovica Gioscia qui "raconte" sa vie avec son chat Arturo (qui y a laissé des poils d'ailleurs). Pour autant, La Vie matérielle est-elle une exposition d'art féminin ? au féminin ? féministe ? Pour Carine Fol, cette caractérisation genrée est dépassée. "il y a une très grande diversité et on ne peut pas dire c’est typiquement une expression féminine. [Mais], ce n’est pas du tout une exposition féministe combative. C’est une exposition qui a une très grande poésie et une très grande sensibilité et même une forme d’esthétique; ce qui n’est pas un mot tabou" précise Carine Fol. 

L'exercice du lointain, Elena El Asmar - 2010-2021
L'exercice du lointain, Elena El Asmar - 2010-2021 © Xavier Ess

Le corps en fil rouge 

Que l'on travaille directement à la matière, lourde, coupante et fragile en même temps comme Gwendolyn Robin qui découpe le verre et les plaques de métal - un combat avec la matière- ou que l'on évoque l'image du corps à travers les témoignages d'internautes imprimés sur des bandes de tissu (Claudia Losi), le corps comme porteur d'énergie vitale est constamment de la partie. On est accaparé par les œuvres de Lieve Van Stappen - faites de feuilles mortes, de mousse, de laine, d'algues, de verre de Bohème et d'arbre à clous - sur le cycle des saisons, le passage du temps et la renaissance. La métaphore de la vie et de la mort. Des images qui semblent véritablement surgir des mains de l'artiste.

Ariadnes' Yarn, Lieve Van Stappen - 2003-2005
Ariadnes' Yarn, Lieve Van Stappen - 2003-2005 © Lieve Van Stappen
détail de l'animation video Les Feuilles Mortes, Lieve Van Stappen
détail de l'animation video Les Feuilles Mortes, Lieve Van Stappen © Xavier Ess

Les pratiques artistiques de ces 12 créatrices façonnant la matière physique et affective nous renvoient "à la manière dont nous façonnons notre existence" et précise Carine Fol, "je crois que ça c’est autant présent chez les hommes que chez les femmes. Je ne pense pas que cela soit genré.

Tirapugni champagne, Loredana+Longo - 2017
Untitled, Alice Cattaneo 2019 Courtesy of the+artist and Marie-Laure Fleisch Gallery Brussels

En pratique : 

La Vie matérielle

Du 09.12.2021 au 13.03.2022

La Centrale - 1000 Bruxelles

ReadyMaking 3, Gwendoline Robin - 2021
ReadyMaking 3, Gwendoline Robin - 2021 © Julia Cremers
Sous les lunes de Jupiter, Gwendoline Robin - 2021
Sous les lunes de Jupiter, Gwendoline Robin - 2021 © Xavier Ess

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