Alexandre Tcherkassov et ses collaborateurs ont travaillé à documenter les plusieurs centaines voire milliers de victimes de la Russie, suite aux différents conflits post-soviétiques, dont le premier éclate en 1994 avec la première guerre de Tchétchénie. Ils ont compilé leurs recherches dans un rapport intitulé Une chaîne de guerres, une chaîne de crimes, une chaîne d’impunités. Pour l’ONG, le déclenchement de la guerre en Ukraine doit être analysé dans le temps long : "Cette impunité était le mécanisme de reproduction des crimes et des guerres qui nous a amenés à la situation actuelle".
Car la deuxième guerre de Tchétchénie, la guerre en Syrie et la guerre Ukraine, c’est Poutine qui était aux commandes. "Le fondement du pouvoir de Poutine, c’était la deuxième guerre tchétchène. Il commençait par la propagande, le sang, les falsifications. Aujourd’hui, cela se répète en Ukraine" observe Tcherkassov.
Pour notamment garantir auparavant cette impunité, le vocable utilisé par Vladimir Poutine pour qualifier ses guerres a toujours été construit de manière à se dresser en défenseur de sa patrie : "La première guerre en Tchétchénie, c’était l’opération contre les bandits : l’opération de reconstruction de l’ordre constitutionnel. Ce n’était pas la guerre. La deuxième guerre, c’était l’opération contre-terroriste à la guerre en Géorgie : c’était l’opération de l’établissement de la paix. Aujourd’hui, c’est l’opération spéciale militaire et pas la guerre. Mais on peut comparer la première guerre tchétchène à la guerre en Ukraine, parce que, par exemple, à Grozny, on a tué de 25 à 29.000 civils. Aujourd’hui, à Marioupol, il y a 20.000 civils (décédés). Nous pouvons comparer (ces chiffres). Et en général, la première guerre tchétchène nous donne les pertes humaines de populations civiles de Tchétchénie de 30 à 50.000. C’est beaucoup et encore l’impunité (pour la Russie). Au début de la Russie indépendante, les années de Boris Eltsine, ce n’était pas le paradis. Dans quelques aspects, on peut comparer cela au temps actuel, au temps de Poutine, après 23 ans de pouvoir".