Près de 120 millions d’enfants dans 37 pays risquent de ne pas être vaccinés contre la rougeole cette année. Une conséquence indirecte de la pandémie de coronavirus, qui complique l’accès aux infrastructures de santé, les déplacements et la disponibilité sur le terrain des professionnels de santé, notamment. Or, selon les scientifiques, une diminution de 15% de la vaccination de routine pourrait conduire à près de 250.000 décès d’enfants dans les pays pauvres.
Des chiffres brandis comme un cri d’alarme dans une étude publiée dans Science et qui a été menée par l’UCLouvain, en collaboration avec l’Université de Stanford, la Harvard Medical School et l’Organisation mondiale de la santé.
Aujourd’hui, dans la plupart des pays pauvres, le risque lié à la rougeole, en particulier pour les enfants, est plus grand que la mortalité due au Covid 19 lui-même. "Aujourd’hui, des milliers de petits enfants meurent de la rougeole, c’est certain, pour le Covid c’est une probabilité", pointe Debarati Guha-Sapir, directrice du centre de recherche sur l’épidémiologie des désastres (UCLouvain).
On risque d’être pris par un tsunami du Covid et on laisse tomber certaines choses importantes qui vont revenir après, parce qu’on les avait mises aux oubliettes. La rougeole, il ne faut pas postposer : c’est très transmissible, très endémique, il faut trouver des moyens de continuer les campagnes.
La rougeole est très contagieuse et pour être efficace en termes de santé publique, le vaccin doit être largement utilisé : "Il faut une couverture vaccinale très élevée : 95 à 98% doivent être vaccinés. Si vous êtes en dessous vous créez un groupe de personnes susceptibles d’amorcer une épidémie".
Le risque est encore plus préoccupant dans les pays ou les zones touchés par des conflits, qui rendent les enfants et leurs mères encore plus vulnérables.
Et les conséquences pourraient se prolonger dans le temps : "La réponse immunitaire offerte par le vaccin de la rougeole est meilleure entre les 9 mois et les 18 mois d’un enfant", explique Debarati Guha-Sapir. "A ce moment, l’enfant fait une réponse immunitaire solide et permanente. En dehors de cette fenêtre, il aura beaucoup plus besoin d’une deuxième dose, et dans les pays pauvres vacciner une deuxième fois est un défi".