Justice

La rénovation de la prison de Namur est terminée : est-elle devenue agréable à vivre pour les détenus ?

Deux détenus dans leur cellule de la prison de Namur

©Melanie Joris

Par Melanie Joris du service judiciaire

Après 5 ans de bruit et de poussière, ça y est, les travaux à la prison de Namur sont terminés. Aucune rénovation d’ampleur n’avait été entreprise depuis l’ouverture de la prison en 1874. Cette prison d’une capacité de 250 places dispose désormais de cellules propres et de sanitaires dignes de ce nom. Budget : 20 millions d’euros. Détenus et personnel apprécient ce nouvel environnement de vie, mais cela ne veut pas dire pour autant que la situation est toute rose. Immersion.

Il n’a pas été possible de pousser les murs, les cellules font toujours 9 mètres carrés, mais celles-ci sont désormais beaucoup plus lumineuses. Pour ce faire, les ingénieurs et architectes sont repartis de zéro. "Il ne restait que les murs", se souvient Antoine Pirlot, ingénieur à la régie des bâtiments (la structure en charge des prisons). "On a agrandi les fenêtres. Avant, il n’y avait que la partie supérieure à plus de 70 cm de haut. Les détenus ne voyaient pas l’extérieur", se souvient l’ingénieur. Le coin sanitaire a également été revu dans les cellules duo. La toilette et l’évier sont séparés du reste de la pièce par une cloison qui offre un peu d’intimité.

Les travaux à la prison de Namur sont désormais terminés
Les travaux à la prison de Namur sont désormais terminés ©Melanie Joris

De l’avis de ses occupants, il est désormais beaucoup plus agréable de vivre à la prison de Namur. Armen est un détenu de 71 ans. Il a connu les anciennes cellules : "C’était beaucoup plus vieillot, ça datait des années 1800. Maintenant, c’est moderne donc c’est agréable même si ça ne doit peut-être pas l’être…", glisse-t-il. Et de nous faire le tour du propriétaire : "Le carrelage est plus clair. Il y a plus de prises dans la cellule, on peut brancher notre télé qui a une soixantaine de chaînes. Le frigo est plus grand qu’avant aussi. Il y a juste l’évier qui est un peu limite pour faire la vaisselle".

Même satisfaction du côté d’un autre détenu, Akil. Il n’a pas connu la prison de Namur avant les travaux, mais est passé par celle de Gand. "Là-bas, c’est moins beau. Ici, on ne peut pas se plaindre. On peut cuisiner dans la cellule, les toilettes sont isolées". Et d’observer : "Les gens se sentent mieux parce que c’est tout nouveau".

De 8 à 47 douches

L’autre grande évolution est à trouver du côté des sanitaires. Avant la rénovation, il y avait 8 douches pour 250 détenus. Désormais, il y en a 47. Peter Vergeijlen, expert technique de la prison de Namur : "Les détenus peuvent venir prendre leur douche tous les jours à leur demande. Certains la prennent le matin, d’autres le soir. Avant, ils ne pouvaient prendre une douche qu’un jour sur deux".

L’emplacement des douches a également été repensé comme le précise Peter Vergeijlen : "Avant les douches étaient situées au niveau du noyau central. Il y avait donc de longs déplacements. Maintenant, elles sont situées dans chaque aile. C’est plus facile à gérer d’un point de vue du temps et de la sécurité".

Est-ce pour autant la panacée ?

La prison de Namur est donc désormais rénovée, les murs sont blancs, les douches sont propres. Mais est-ce pour autant la panacée ? La réponse est nuancée. Pour Pascal Barry, assistant de surveillance pénitentiaire, il est bien sûr plus agréable de vivre et de travailler dans une prison qui ne souffre plus de problèmes d’insalubrité. "Quand vous rénovez des bâtiments, le personnel se sent mieux et les détenus aussi, c’est un ensemble", avant d’ajouter : "Une prison, c’est vivant. Il y a des jours avec et des jours sans, vous ne pouvez jamais prévoir".

La cellule de réflexion, aussi appelée le cachot
La cellule de réflexion, aussi appelée le cachot ©Mélanie Joris

Au même moment, un détenu est emmené vers le cachot suite à une altercation. Il y passera le temps décidé par le directeur de la prison. Pascal Barry : "L’agent a demandé au détenu de se calmer, de tempérer, il n’a pas voulu. Par mesure de sécurité, nous le mettons en cellule de réflexion". Il reste donc évidemment des moments de tension au sein de la prison : "Ça peut monter à n’importe quel moment, suite à des mauvaises nouvelles de la famille par exemple", explique le surveillant pénitentiaire.

Marc Dizier, directeur de la prison de Namur
Marc Dizier, directeur de la prison de Namur ©Melanie Joris

Pour Marc Dizier, le directeur de la prison, la rénovation de la prison était nécessaire, mais elle ne résout pas tous les problèmes inhérents à la prison : "On reste dans une architecture du 19e siècle donc il y a toute une série de missions qui ne peuvent pas être rencontrées dans un établissement qui n’a pas été refondu totalement". Et le directeur précise : "Il s’agit des missions liées au régime de vie. Il faut des locaux adaptés pour donner des cours, permettre la formation ou le travail des détenus. Cela nécessite une infrastructure dont on ne dispose pas même si l’établissement a été rénové", constate-t-il.

La prison de Namur a donc fait peau neuve, mais des missions importantes pour la réinsertion restent en carence. D’autres prisons ont été rénovées ces dernières années, d’autres sont construites et bientôt prêtes à entrer en fonction comme celle de Haren. Mais certaines restent dans une situation proche de l’insalubrité. Avec un problème majeur : celui de la surpopulation carcérale. Actuellement, le nombre de détenus tourne autour des 11.000 pour moins de 10.000 places. Une situation qui ne devrait pas s’améliorer. Dès le mois de septembre, les courtes peines devront normalement être exécutées en prison. Les directeurs et directrices de prison s’attendent donc à une nouvelle forte pression sur leurs établissements.

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