Selon l’anthropologue Nasima Moujoud, il y a souvent une vision binaire dans les travaux sur "genre et migrations" qui oppose les deux univers, occidental et non occidental. Ce langage fondé sur la binarité entre deux sociétés de départ et d’arrivée renvoie d’emblée les migrantes à une altérisation radicale. Un langage qui peut être parfois évolutionniste et postule que pour s’émanciper, les migrantes doivent s’affranchir des éléments culturels de leur société d’origine et intégrer ceux des femmes de la société d’arrivée.
Dans le sillage de l’évolutionnisme apparait également le relativisme culturel qui fait une distinction entre les femmes de son groupe et les femmes des autres. Ce relativisme ignore l’histoire du féminisme dans les pays d’origine des immigrées et qu’il est traversé, comme partout ailleurs, d’oppositions liées à la classe, à la "race", à la sexualité, à l’attitude par rapport à la religion, etc. Dans les deux approches l’expérience des femmes immigrées est considérée comme "naturellement différente" de celles des occidentales d’où un problème de simplification, de généralisation et de stéréotypes.
Cette opposition entre Occident et Orient sur la question des femmes sert, selon l’anthropologue Laura Nader et la politologue Françoise Armengaud, à maintenir leur subordination dans les deux sociétés. Elle évoque l’importance de la compréhension de la subordination des femmes dans une perspective dynamique où les idéologies concernant le genre n’émergent pas seulement comme le produit d’un débat interne sur les inégalités mais des débats entre les idéologies dominantes de sociétés différentes.