Le développement des technologies et outils numériques, s'ils nous facilitent (souvent) la vie, sont aussi source d'exclusion pour toute une partie de la population, des personnes âgées, porteuses d'un handicap ou peu ou pas lettrées. Sylvie Pinchart dirige l'ASBL « Lire et écrire », alerte sur cette problématique, sur notre plateau de Jour Première.
« Il y a toute une série de relations des individus, des citoyens, avec l'État, avec les différents services publics, mais aussi les services privés, qui sont digitalisés. Donc, qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire qu'il faut à la fois maîtriser des compétences digitales, mais en plus maîtriser la lecture et l'écriture, puisque c'est ça le support, la lecture et l'écriture. Donc, les personnes analphabètes sont de plus en plus confrontées à une multiplicité d'écrits, et des écrits qui sont de plus en plus complexes et qui sont en plus sur supports digitaux. Ça veut donc dire qu'il n'y a plus d'interface interpersonnelle qui permet de s'expliquer. »
Face à leur écran, les personnes analphabètes se retrouvent donc très vite démunies, ce qui peut avoir de nombreuses conséquences dans des actes quotidiens. « Ça va de l'achat d'un billet de train, l'inscription des enfants à l'école, le suivi de sa situation administrative. Les personnes peuvent être confrontées à de très forts décrochages, voire à de la marginalisation, mais surtout elles n'ont pas accès aux droits et aux ressources collectives auxquels elles ont droit. Je rappelle quand même que plus de 50% des personnes analphabètes sont au travail et participent activement à ces biens publics. » La numérisation des services est donc un accélérateur de la marginalisation de ces populations.
Faciliter l'accessibilité
La réflexion doit donc être menée, et plusieurs axes d'action sont possibles. « Je pense qu'il faut continuer les efforts de formation en alphabétisation et en incluant les nouvelles technologies et les outils digitaux comme savoirs de base nécessaires minimum dans une société. Il faut donc accentuer ça et il faut travailler avec les services publics pour voir comment, avec les outils existants ou d'autres à créer, faciliter l'accessibilité pour les personnes en difficulté de lecture et d'écriture. C'est tout à fait possible, c'est tout à fait faisable et ça se fait déjà de manière locale ou plus généralisée. Il faut intensifier cette dynamique. »
« Suivant le niveau de scolarité de base, les personnes vont avoir différents usages des outils digitaux. Ils utilisent certainement beaucoup plus Facebook que moi, par exemple. Donc oui, ce sont des outils dont les personnes illettrées s'emparent. Ils ne s'en emparent pas de la même manière et les administrations et les services publics s'en emparent aussi d'une certaine manière. Donc, à un moment donné, il faut réconcilier les deux. »