Concours Reine Elisabeth

La Finale du Concours Reine Elisabeth en son 3D

Dès mardi matin, le sigle 3D apparaîtra sur les vidéos à écouter au casque pour profiter du son 3D, ambiophonique ou binaural

© RTBF

Cette année, la Finale du Concours Reine Elisabeth sera retransmise en direct sur RTBF Auvio, en son 3D.

C'est la première fois qu'un événement de cette ampleur bénéficiera sur les antennes de la RTBF, de la technologie de l'ambiophonie, le son d'ambiance, en 360°, et pour comprendre le pourquoi, le comment, et tous ses avantages, voici l'interview de Laurent Flémal, ingénieur son, et coordinateur-projet à la Direction technologique de la RTBF.

Quelle est la valeur ajoutée du son 3D pour la finale du Concours Reine Elisabeth ?

Avec une captation stéréophonique normale, sur des hauts parleurs, on apporte plus ou moins l’orchestre dans son salon.  Donc, si la prise de son est bien faite, et si on a un bon matériel sonore, on entend l’orchestre, on sent une certaine profondeur, mais on ne perçoit pas spécialement l’étagement de l’orchestre, avec les premiers violons devant les harmonies, les harmonies sont devant les percussions, etc.

Par contre avec le système qu’on met en place pour la finale du Concours Reine Elisabeth, on va prendre l’auditeur et le téléspectateur vu que ce sera retransmis sur Auvio avec les mêmes images que la captation normale, et on va l’emmener avec nous quasiment  la place du chef d’orchestre. Et donc avec ce type de technique, l’auditeur va percevoir non seulement l’étendue de l’orchestre, les rangs de l’orchestre, donc l’étagement de l’orchestre et sa répartition dans l’espace. On n’a plus simplement une latéralisation gauche-droite, mais on apporte en plus une notion de profondeur, d’abord de l’orchestre mais en plus, la perception de la salle de concert. Et on va se rendre compte aussi l’acoustique de Bozar, qui est une salle magnifique, vraiment c’est comme si on était là, à la place du chef d’orchestre, ou dans les premiers rangs et ça sonne beaucoup plus naturel.

Par exemple, nous avons fait des tests pendant la demi-finale sur le violoncelle, et nous avons eu l’occasion de comparer les deux types de captation : d’un côté, on avait le violoncelle capté de manière normale, un très beau violoncelle qui sonnait très très bien,  et de l’autre côté, avec notre dispositif ambiophonique, c’était aussi un beau violoncelle qui sonnait très très bien mais en plus, on sentait la masse de l’instrument, on le sentait vibrer, on sentait ses plaques de bois qui vibraient, de manière physique.

Mais quelle installation est nécessaire pour que le public puisse profiter chez lui de cette nouvelle technologie, et de la qualité de la diffusion ?

Ce qui est en plus vraiment génial, avec ce type de captation, c’est que tout le monde peut en profiter, mais à une seule condition, celle d’écouter au casque. Si on écoute sur des haut-parleurs, on va entendre de la musique,  mais ça fera peut-être un peu bizarre. Par contre, au casque, comme on rapproche le haut-parleur des oreilles, on transporte l’auditeur aussi en se mettant le plus proche possible de ses oreilles, et en plus, il va pouvoir nous écouter de manière indifférente, sur son ordinateur, sur sa télé, ou même sur un Smartphone, et la qualité sera la même pourvu qu’il mette un casque.

Est-ce qu’il faut un casque spécial ?

Non, même un casque " pas cher ", ça marche aussi. Ça sonnera moins bien évidemment, c’est comme des petits haut parleurs marchent moins bien que les gros. Mais avec un casque de qualité moyenne, on a fait des tests avec des casques fournis par des fabricants de Smartphone, et ça marche... Le sentiment d’immersion est déjà vraiment bien présent, avec un casque d’un prix moyen d’une 20taine d’euros. Si on est un peu puriste, le budget d’un casque peut aller de 100 jusqu’ à 3000 euros !!

Comment doit-on appeler ce son ? Binaural ? Ambiophonique ? 3D ? Quelle est l’appellation la plus correcte ?

Pour ce type de technologie qu’on utilise, l’appellation la plus correcte est "ambiophonique", du fait de l’ "ambiance". Au niveau de la captation, le terme "binaural" renvoie plutôt à la manière dont est gérée la prise de son, et ici à la RTBF, vu que c’est relativement nouveau pour nos publics, on a décidé d’utiliser le terme 3D pour que ce soit plus parlant, avec la notion d’espace et de hauteur aussi, les 3 dimensions avec la hauteur située dans l’espace.

 

Le microphone qui sera utilisé pour la captation
Le microphone qui sera utilisé pour la captation © DR

Qu’est-ce que ça implique techniquement pour les équipes chargées de la captation au Palais des Beaux-arts ?

Ça implique d’avoir un peu de matériel dédié à ça. On ne va pas utiliser tous les mêmes microphones, par contre nous allons récupérer  la grande majorité des microphones que les ingénieurs du son de Musiq’3 utilisent pour la captation normale.  On va récupérer les sons qui sortent de ces micros là  et puis le procédé qu’on va utiliser, comporte un PC, un logiciel, et des plugins dédiés à l’ambiophonie ou son  3D. Et ces plugins ont la particularité de pouvoir situer les sons à 360°. Alors que d’habitude, lorsqu’on utilise une table de mixage normale, le bouton qui permet de situer une source dans la rampe sonore, c’est au mieux à gauche ou à droite, ce qui ne représente jamais que 180°. Ici, d’autres petits boutons vont permettre de situer les sources du son dans l’espace.

Est-ce qu’il faut des micros spéciaux ?

En fait, on en aura 1. Il sera positionné avec ce qu’on appelle en jargon technique, le couple principal de la prise de son stéréo, deux microphones qu’on positionne vers 3 ou 4 mètres de haut, dans la salle Le Bœuf à Bozar, et qu’on éloigne un peu de la scène avec des câbles, pour pointer vraiment vers l’orchestre. Et c’est ce couple stéréo, en fait en technique traditionnelle, qui va capter l’ensemble de l’orchestre. Ensuite, on aura des microphones au cœur de l’orchestre, qui permettent de préciser certains instruments, certaines sources sonores, et on installera notre micro spécial à la même position que le couple principal. Et c’est ça qui va donner cette notion de salle, d’espace, d’étagement, qu’on pourra préciser avec les plugins installés dans le logiciel de prise de son.

Tout ça a l’air si simple, avec des plugins dans un logiciel de prise de son, et des micros partout dans la salle, .. Pourquoi ne l’avons-nous pas fait avant ?

En fait, ce genre de technologie n’existe que depuis fort peu de temps. Même si les principes de l’écoute binaurale datent de la fin des années septante, où des fabricants renommés de microphone ont fait beaucoup de recherche psycho-acoustique,  afin de rendre toujours le mieux possible ce que perçoit un auditeur dans un lieu donné et de pouvoir le traduire sur un support donné. La technique qui utilise ce genre de microphones un peu spéciaux commence seulement  à se développer. Dans les salons techniques auxquels on participe plusieurs fois par an, ce genre de microphones est vraiment apparu l’année dernière même si on en avait déjà entendu parler un peu plus tôt. Quant au logiciel, c’est aussi tout nouveau. Avant leur apparition, on pouvait travailler avec une tête artificielle, maintenant on fait ça avec l’aide de microphones spécialisés. Et pourquoi c’est apparu maintenant ? on est de plus en plus dans une tendance à la réalité virtuelle, l’enregistrement vidéo en 360°, etc. Quand on associe ce genre de micro à une caméra 360°, quand on fait tourner l’image, le son doit bouger avec l’image, des procédés logiciels que Google, Facebook, Viméo.. ont mis en place, ça fait seulement depuis quelques mois qu’ils peuvent le faire de manière native, et maintenant en live en plus.

L’image et le son s’entraînent l’un l’autre pour arriver à proposer une immersion totale..

A la RTBF, En tant qu’institution publique, nous sommes relativement précurseurs dans le domaine, parce qu’à ma connaissance, la BBC l’a utilisé pour la Classic Proms, l’année dernière, idem pour Radio France qui a un site où ils collectent toutes leurs expériences, en caméra 360° ou en son 3D. Et ce site a un an ou deux.

Un autre facteur qui nous a poussés à le proposer, c’est que l’écoute devient de plus en plus nomade. Le public écoute nos streaming sur des Smartphones, et la culture du casque et des écouteurs revient en force, un peu comme dans les années 80’s avec nos walkmans. Si en plus on lui adjoint l’image, on est mûrs technologiquement pour proposer un son 3D à nos auditeurs. C’est pour ça qu’on ne l’a pas fait avant, il fallait que le public soit mûr aussi, et que la manière d’écouter  commence à changer. On n’est qu’au début de ces écoutes nomades, mais quand on prend le métro, on voit de plus en plus de gens qui ont un casque sur les oreilles, alors que les gens qui lisent seulement un bouquin sont devenus des extra-terrestres..

 

Retrouvez dès lundi, sur Auvio, à 19h55 le streaming de la Finale du Concours Reine Elisabeth, et le lendemain, les prestations des finalistes.

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