La Grande Forme

La dysmorphophobie : cette crainte obsessionnelle d’être moche

© Getty Images

Par Daphné Fanon via

Quelques kilos en trop, nez crochu, boutons… Pour certaines personnes, ces petits défauts ne sont pas très importants. Pour d’autres, ces complexes tournent à l’obsession. Et cette obsession a un nom : la dysmorphophobie. Mais d’où vient cette crainte obsédante d’être moche ou d’avoir une malformation physique ? Qu’est-ce que c’est ? Et peut-on la soigner ? Réponses dans cet article avec le Dr Caroline, psychiatre référent dans "La Grande Forme."

La dysmorphophobie est un trouble mental, caractérisé par une idée obsessionnelle qu’une partie de son corps - ou son corps au complet - est remplie de défauts. Cela peut concerner une imperfection légère : problème de poids, un grand nez, des cicatrices d’acné… Mais ces imperfections sont en réalité minimes, voire imperceptibles par la plupart des gens. Dans certains cas, les défauts sont même totalement imaginaires.
Cette maladie touche environ 1% de la population et concerne de manière équivalente les deux sexes. Il y a évidemment une gradation dans la gravité du trouble ; chez certaines personnes, elle a un impact limité et cela ne les empêche pas de vivre. Mais chez d’autres, elle est réellement invalidante.
 
Même si les personnes atteintes se rendent compte que cette crainte est irrationnelle – et même en les rassurant - elles gardent la certitude inébranlable que le défaut les défigure ou les rend monstrueux. La cause de cette maladie reste peu connue. Cependant, on la retrouve souvent chez des personnes qui ont subi un abus sexuel dans leur enfance.

La dysmorphophobie : cette crainte obsessionnelle d'être moche

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Quelles sont les conséquences de ce trouble ?

Ce trouble entraîne des comportements tels que :
  • Eviter les miroirs, voire complètement les couvrir ;
  • Recherche constante d’être rassuré (“et là, je suis normal ?”) ;
  • Se regarder pendant des heures dans le miroir pour tenter de se rassurer (cela provoque pourtant l’effet inverse) ;
  • Être totalement déconnecté des autres parce qu’on est perdu dans ses pensées obsédantes sur ses défauts ;
  • Se mutiler pour enlever les défauts, se gratter, s’arracher les poils ou les prétendus boutons ;
  • Réaliser des opérations de chirurgie esthétique pour enlever le défaut.
En plus, ces personnes peuvent développer :
  • Une exclusion sociale, car elles n’osent plus se montrer ;
  • Une anxiété majeure ;
  • Une dépression qui va jusqu’aux idées suicidaires ou au suicide.
Ce n’est donc pas un trouble à prendre à la légère. Les individus souffrant de ces obsessions ont la certitude d’avoir le visage, ou une partie de leur corps monstrueuse. Ils ont une image dégradée et déformée d’eux-mêmes et des craintes déraisonnables de rejet à cause de l’interprétation qu’ils font de leur apparence et du regard des autres.

Existe-t-il un traitement ?

On retrouve le syndrome de la dysmorphophobie dans trois grandes pathologies et le traitement dépendra de la pathologie principale.
  • Les troubles obsessionnels compulsifs (TOC)

Les pensées intrusives sur les défauts sont des obsessions. Elles amènent à des comportements qu’on ne peut s’empêcher de réaliser (comme se regarder dans le miroir) qui sont des compulsions.
Dans ce cas, les thérapies cognitivo-comportementales peuvent aider puisque justement, elles se centrent sur les pensées et les compulsions. En cas de dépressions, on peut prescrire des antidépresseurs.
  • Les troubles du comportement alimentaire, comme l’anorexie (TCA)

Ce trouble concerne principalement les femmes. La dysmorphophobie participe à causer l’anorexie : on se trouve trop gros.se quand on se voit dans le miroir. Ce qui donne envie de maigrir et peut entretenir le cercle vicieux de l’anorexie : quel que soit son poids on continue à se trouver trop gros et à vouloir maigrir.
Le traitement est donc d’abord celui de l’anorexie. Soit en ambulatoire chez un professionnel, soit en hospitalisation, si la perte de poids est trop importante.
  • Trouble délirant et psychose

Dans ce cas, il s’agit d’une véritable hallucination visuelle qui déforme la vision que l’on a de son corps.
Le traitement est alors médicamenteux avec ce que l'on appelle, "des neuroleptiques."

Quelques trucs pour s’en sortir

  • Essayer de mettre du doute/de la souplesse dans cette conviction qu’on est monstrueux. L’objectif n’est pas de vous faire changer d’avis à propos de votre apparence, mais plutôt se dire que tout le monde ne le voit pas comme vous, que ça ne vous empêche de vivre, que ce n’est pas SI important.
  • Accepter de vivre avec ses imperfections, qu’elles soient réelles ou imaginaires, comme nous tentons tous (nous êtres humains) de le faire. Peu importe ce que vous pensez de votre apparence, vous avez le droit de vivre une vie libre et épanouie.
  • Ne plus uniquement regarder le détail qui vous obsède (le nez), mais bien l’ensemble du visage. Limiter le "body checking" qui ne fait jamais du bien : s’observer de trop près, pendant trop longtemps.

Retrouvez "La Grande Forme" en direct du lundi au vendredi de 13 heures à 14h30 sur VivaCité. Vous avez manqué l’émission ? Nous vous invitons à la revoir sur Auvio ainsi que sur différentes plateformes de Podcast.

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