Cette semaine, notre PODCAST "Déclic – Le Tournant" se penche sur les finances publiques de la "maison-Belgique" et le moins que l’on puisse dire c’est que la situation est délicate et même critique si on regarde plus particulièrement le sud du pays. Petit état des lieux en compagnie de Xavier Debrun, chef du service des études de la Banque Nationale de Belgique (BNB).
Une situation insoutenable
Quand on lui demande tout d’abord de résumer en quelques mots le tableau de bord budgétaire de la Belgique, la réponse de Xavier Debrun est sans ambages : "c’est une situation qui n’est pas soutenable, qui ne peut pas s’inscrire dans la durée. La dette est équivalente aujourd’hui à 105% du PIB et, plus grave encore, au niveau des déficits, nous sommes tout au fond de la classe européenne ". Le déficit, pour rappel, c’est la différence entre ce qui rentre dans les caisses de l’État et ce dont il a besoin pour ses dépenses. Le trou annuel, en ce moment, tourne autour des 4 – 5%. " On ne peut pas prétendre stabiliser son ratio d’endettement avec des déficits pareils, dit encore Xavier Debrun, ce n’est pas possible ! C’est de l’arithmétique, la contrainte budgétaire elle s’impose à tout le monde, même aux Etats".
Ceci dit, quand on regarde le détail des chiffres, on voit que la situation n’est pas la même pour toutes les entités du pays. Elle est beaucoup plus critique pour la Wallonie que pour la Flandre. Si l’on compare, pour chacune des entités, la dette aux recettes… les ratios sont bien différents. En Flandre, la dette représente 58% des recettes, en Wallonie la dette équivaut à 257% des recettes. Soit pratiquement 5 fois plus.
Flandre – Wallonie : le grand écart
Si l’on regarde maintenant les chiffres : la dette de la Wallonie est en augmentation vertigineuse. En 2015 elle représentait, dans les comptes, environ 8 milliards €, en 2024 elle devrait atteindre les 40 milliards. Il faut noter que cette augmentation est en partie liée à une révision du périmètre de la dette wallonne qui aujourd'hui intègre les dettes de toute une série d'organisme liés directement à l'exécutif. Il n'en reste pas moins que même sans cela, le dérapage est très conséquent.
Le problème, dit Xavier Debrun, c’est que l’on a en plus des tendances de fond qui affectent les finances publiques de tous les pays développés en ce moment : "le vieillissement, la nécessaire lutte contre le réchauffement climatique, une déglobalisation qui renchérit le coût des produits et le retour de la guerre à nos portes qui nécessite à nouveau de plus larges dépenses militaires".
Alors, imaginons le scénario du pire… qui n’est malheureusement pas improbable : les taux (qui viennent de passer en quelques mois de 0 à 3%) grimpent encore, les agences de notations s’inquiètent de la solvabilité de la Wallonie (et de sa capacité à réformer à temps), elles dégradent la note wallonne… et du coup aussi celle de la Fédération Wallonie Bruxelles. Du coup, les deux entités doivent payer de plus en plus pour se refinancer, ce qui alourdit encore la dette… ce qui nous amènerait à un intenable 'effet boule de neige'.
"On n’en est pas encore là" rassure l’économiste de la BNB "mais il est temps d’agir et de faire des choix. Nous sommes face à un tournant. On a encore la possibilité de le négocier nous-même en réduisant les vitesses… mais si on ne fait rien on va se voir imposer une austérité bête et méchante". On n’est donc pas encore dans la situation de la Grèce en 2010. Mais nier le problème ou le considérer comme mineur, c’est d’évidence se mettre la tête dans le sable.
Si vous voulez comprendre la situation de manière fine et surtout aussi explorer les pistes de solutions pour mieux utiliser les moyens et retrouver un équilibre budgétaire, prenez 45 minutes pour écouter ce nouvel épisode de "Déclic – Le Tournant".