Sur les 82.000 contaminations de Covid-19 recensées dans le monde, plus de 33.000 cas ont été guéris de la maladie. Une guérison obtenue jusque-là grâce à une prise en charge des patients par le personnel médical. Pour l’instant, aucun traitement n’a prouvé son efficacité… Mais il y a une molécule qui est pour l’instant étudiée dans le milieu scientifique : la chloroquine. Ce traitement contre le paludisme a montré des signes d’efficacité contre le nouveau coronavirus. "C’est un antiviral et un immunosuppresseur, ça peut atténuer la réaction de notre corps contre la maladie", explique Marc Van Ranst, virologue à la KULeuven.
L’espoir d’un traitement…
L’action possible de ce traitement est "une excellente nouvelle" pour le professeur Didier Raoult, directeur de l’Institut Méditerranée Infection à Marseille. Ce spécialiste français a traité 4000 patients avec la chloroquine. Il connaît donc très bien ce traitement. "Je sais comment ça circule dans le sang et je sais comment la manier", ajoute le professeur.
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Selon une étude préliminaire menée en Chine et publiée le 19 février dernier, des essais cliniques sur plus de 100 patients sont menés dans une dizaine d’hôpitaux chinois et les résultats sont encourageants. "Ça a un impact positif sur les patients qui sont stérilisés, poursuit le professeur Raoult. Les virus disparaissent au bout de 4 jours si on donne de la chloroquine. Ça a une efficacité sur les malades sur plusieurs paramètres : l’hospitalisation et la durée de la fièvre notamment."
… Mais pas d’emballement
Ce traitement est disponible dans tous les pays du monde et il est bon marché, selon les spécialistes. Une bonne nouvelle donc, mais plusieurs experts internationaux refusent pourtant de s’emballer. Cette étude n’a pas encore été validée par un comité d’experts scientifiques. "Il faut attendre les recherches en cours en Chine, les études ne sont pas finalisées", relativise Marc Van Ranst. Lorsque des résultats seront publiés, alors la molécule pourra être utilisée, selon le spécialiste belge. Mais un médecin français nuance. "Il faut être extrêmement circonspect et prudent, note François Maignen, docteur en pharmacie français et spécialiste de santé publique. Une fois les résultats disponibles, il faut une phase de publication […] pour que les données soient évaluées de façon critique" par des experts, notamment les scientifiques de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), poursuit-il.
La chloroquine contre le Sras
Ce n’est pas la première fois que la molécule est envisagée dans le traitement d’une épidémie. En 2004 déjà, des chercheurs de la KULeuven, dont le professeur Van Ranst, se sont penchés sur ce médicament pour lutter contre l’épidémie de Sras (ndlr : syndrome respiratoire aigu sévère). "Le but de notre recherche en 2004 était de trouver des médicaments qui existaient déjà et qui n’avaient pas des effets indésirables", souligne le professeur belge. Mais à l’époque, l’épidémie avait disparu avant même d’administrer le médicament aux patients.
D’autres pistes sont également étudiées. "On a quelques médicaments contre le VIH qui semblent également actifs contre le coronavirus", ajoute le virologue Marc Van Ranst. Ces molécules sont en test actuellement.
Et un vaccin alors ?
Si la chloroquine s’avérait efficace contre le Covid-19, il ne faut pas pour autant abandonner les recherches d’un vaccin. Plusieurs sociétés et plusieurs pays travaillent actuellement sur un traitement. "Pour prévenir la maladie, le vaccin est la meilleure solution", insiste le virologue Marc Van Ranst. Le professeur français Didier Raoult est plus sceptique. "La réponse vaccinale à une crise en infection sanitaire, je n’ai jamais vu que ça marche", estime-t-il. Selon lui, les crises sanitaires sont bien souvent limitées. "Ce n’est pas inintéressant que des gens travaillent sur la mise au point du vaccin, mais dans nos pays, entre le moment où on pense qu’il y a un vaccin qui marche et le moment où on est susceptible de l’utiliser, il y a des années, poursuit Didier Raoult. Dans un an, on ne sait pas s’il y aura encore du coronavirus chinois."
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Le professeur Raoult plaide donc pour l’utilisation de la chloroquine. "Si on peut utiliser un médicament dont on connaît la toxicité et qui ne coûte rien, plutôt que d’utiliser une nouvelle molécule qui coûte très cher et qui n’a jamais été utilisée sur une certaine ampleur, on va utiliser le plus simple. J’adhère à ce point de vue", explique-t-il. "Je pense qu’on va trouver de nouvelles molécules plus efficaces", estime, de son côté, le virologue belge Marc Van Ranst.
La chloroquine est dans de nombreuses pharmacies, mais il faut rester prudent. La molécule est "très dangereuse en cas de surdosage", insiste François Maignen. Il reste primordial de consulter un médecin avant de prendre le médicament, d’autant que, pour l’instant, les tests n’en sont qu’à un stade intermédiaire.