Dans ce contexte, les récentes attaques de la ministre britannique de la Culture contre la BBC résonnent particulièrement : Nadine Dorries a ainsi indiqué vouloir "un vrai changement" au sein de l’institution, que le gouvernement conservateur accuse régulièrement de ne pas refléter la diversité du pays et de manquer d’impartialité, comme pour sa couverture du Brexit. "J’ai clairement indiqué que la BBC devait s’attaquer aux questions d’impartialité et de pensée communautaire", a-t-elle ajouté.
Le paradoxe de l’attachement
Des coups de boutoir et des menaces à peine voilées, et pourtant, cela peut passer pour un paradoxe, mais disposer d’un service public audiovisuel fort est souvent reconnu comme indispensable par le public lui-même.
"Chaque année, le Reuters Institute de l’Université d'Oxford publie une étude sur la confiance du public dans les médias audiovisuels, explique Jean-Paul Philippot, et on le constate notamment en Belgique mais aussi dans la plupart des pays en Europe : les médias publics recueillent le plus haut niveau de confiance. C’est valable en Wallonie et en Flandre. C’est une contradiction. Et pourtant, ça s’explique, je pense. Dans un monde qui est devenu essentiellement audiovisuel, ne pas avoir un producteur local de contenu culturel, de contenu qui traduit les cultures, les identités, les histoires locales, c’est comme s’interdire d’exister et donc de rayonner et de transmettre. Ne pas avoir un acteur qui soutient celles et ceux qui démarrent dans la création audiovisuelle, c’est comme s’interdire d’exister."
Supprimer la redevance de la BBC, on en parle ici depuis 35 ans, et je ne l’ai jamais vu : c’est comme le monstre du Lochness
Marc Roche ne dit pas autre chose lorsqu’il explique la volte-face de Nadine Dorries : "Si la ministre de la Culture est revenue sur ses déclarations sur la fin de redevance, c’est parce qu’elle a dû se faire taper sur les doigts par le Foreign Office (Bureau des Affaires étrangères et du Commonwealth, ndlr) qui lui a dit probablement ‘la BBC, c’est notre principale arme à l’extérieur de développement de l’influence britannique, ce sont les armes de la diplomatie britannique qui permettent au Royaume-Uni de boxer au-delà de sa catégorie pugilistique'’ Sans cela, c’est une puissance moyenne style Italie ou Espagne. Avec les universités telles Cambridge ou Oxford et le sport, la BBC est un important élément dans la mécanique du soft power britannique. Ce qui fait que, à mon avis, ils vont garder cette redevance, quitte à l’aménager ! Supprimer la redevance de la BBC, on en parle ici depuis 35 ans, et je ne l’ai jamais vu : c’est comme le monstre du Lochness" ironise le journaliste qui vit à Londres.