La banque centrale chinoise (PBOC) a abaissé mardi ses taux d'intérêt, pour la cinquième fois depuis novembre : un nouvel effort pour soutenir une économie à la peine et pour rassurer les investisseurs, sur fond d'effondrement des Bourses locales.
A partir de mercredi, le taux des prêts à un an et celui des dépôts à un an seront réduits de 25 points de base et ramenés respectivement à 4,60% et 1,75%, a annoncé l'institution sur son site internet.
Simultanément, la banque centrale va abaisser de 50 points de base les ratios des réserves obligaAtoires imposés à certains établissements financiers, une mesure censée leur permettre de prêter davantage.
Ces nouveaux assouplissements monétaires étaient largement attendus, la conjoncture ne cessant de s'assombrir dans la deuxième économie mondiale.
Entre autres, les exportations chinoises -un pilier de la croissance- ont chuté de plus de 8% en juillet, la production industrielle ralentit fortement, et l'activité manufacturière s'est fortement contractée en août selon un indicateur PMI de référence tombé au plus bas en six ans...
"On s'y préparait, mais cette nouvelle baisse des taux arrive plus tôt que prévu", a indiqué à l'AFP Wendy Chen, analyste de Nomura. "C'est une décision sans doute liée aux statistiques moroses, mais aussi à la débandade boursière des derniers jours".
La Chine incapable de stabiliser ses Bourses ?
De fait, la Bourse de Shanghaï a dévissé de 7,63% mardi, après s'être déjà effondrée lundi de 8,49% -sa plus forte baisse sur une journée en huit ans- dans un climat d'affolement général. Elle a perdu plus de 40% depuis mi-juin.
Pire : ces plongeons répétés ont attisé les craintes sur l'essoufflement de l'économie chinoise, faisant décrocher de concert lundi les marchés mondiaux.
De quoi s'interroger sur l'impuissance de la Chine à stabiliser ses Bourses, en dépit d'interventions répétées des autorités, notamment via des achats massifs de titres par des organismes publics.
"Le gouvernement semble avoir changé de tactique", réagissait Mark Williams, du cabinet Capital Economics.
"La décision de la PBOC pourrait en effet stopper la dégringolade boursière", même si "la principale motivation reste peut-être surtout de rétablir la confiance perdue dans la situation de l'économie", ajoutait-il.
Un scepticisme croissant
Certes, les autorités ont multiplié les mesures de soutien à l'activité, et la banque centrale a elle-même abaissé ses taux d'intérêt par quatre fois entre novembre 2014 et juin 2015, mais sans grand succès, entretenant un scepticisme croissant sur la politique suivie.
A telle enseigne que, selon des analystes, les liquidités ainsi dégagées ont plus contribué à gonfler la bulle des marchés boursiers qu'à aider l'économie réelle.
Dans ce contexte, la soudaine dévaluation du yuan il y a deux semaines -largement perçue comme une tentative désespérée de Pékin de doper ses exportations- n'a fait que nourrir l'angoisse générale.
"La croissance économique reste sous pression" et ces nouveaux assouplissements "soutiendront le développement durable de l'économie réelle", a affirmé la PBOC mardi dans son communiqué.
Ainsi, "le coût des emprunts va diminuer pour ceux qui souscrivent un prêt bancaire, y compris pour les prêts immobiliers", notait Mark Williams.
"Cela devrait donner un coup de pouce supplémentaire au marché immobilier chinois (qui amorce un très timide rebond) ainsi qu'aux entreprises d'Etat", très gourmandes en prêts souscrits auprès des banques.
La Chine a enregistré au deuxième trimestre une croissance économique de 7%, conforme à l'objectif annuel que s'est fixé le gouvernement pour 2015. Ce qui serait tout de même la plus faible performance de ce géant asiatique en un quart de siècle.
Mais de l'avis général, même cet objectif de croissance de 7% pourrait s'avérer difficile à atteindre, à moins de fortes interventions supplémentaires du gouvernement, notamment en termes de relance budgétaire et de dépenses publiques.
Pékin met volontiers en avant ses efforts de rééquilibrage économique destinés à accorder un rôle accru au marché dans l'allocation des ressources...mais veut à tout prix éviter un "atterrissage brutal" de sa croissance.
Wall Street rebondit nettement à l'ouverture
Wall Street rebondissait à l'ouverture mardi, au lendemain de sa pire séance depuis quatre ans, rassurée notamment par l'annonce par la Banque centrale chinoise (PBOC) de nouvelles mesures de soutien: le Dow Jones prenait 2,13% et le Nasdaq 2,65%.
Vers 13H40 GMT (15H40 en Belgique), l'indice vedette Dow Jones Industrial Average gagnait 338,39 points à 16 209,74 points, et le Nasdaq, à dominante technologique, 119,96 points à 4 646,20 points.
L'indice élargi S&P 500, très suivi par les investisseurs, prenait 2,16%, soit 40,95 points, à 1 934,16 points.
Wall Street avait lourdement chuté lundi, pour la troisième séance de suite, déstabilisée par les inquiétudes liées au ralentissement économique chinois, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average lâchant 3,58% à à 15 871,28 points, et le Nasdaq 3,82% à 4 526,25 points au terme d'une journée très agité.
Apple gagnait 5,1%, boostant la bonne performance du Nasdaq. Bank of America gagnait quant à elle 4,8%.
Le pétrole ouvre sur un net rebond technique à New York
Les cours du pétrole montaient nettement mardi à New York, se rééquilibrant après leur chute de la veille, mais se maintenaient sous le seuil des 40 dollars le baril faute d'actualité susceptible d'alimenter un rebond durable.
Vers 13H05 GMT, le cours du baril de référence (WTI) pour livraison en octobre gagnait 1,31 dollar à 39,55 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), après avoir chuté la veille de plus de deux dollars et atteint son plus bas niveau en six ans et demi.
Les inquiétudes sur l'économie chinoise frappent particulièrement les cours de l'or noir, car le pays est le deuxième consommateur mondial de pétrole après les Etats-Unis et donc l'un des principaux espoirs de relance de la demande face à une offre excessive.
Le Royaume-Uni n'est pas à l'abri de la crise boursière chinoise
Le ministre britannique des Finances George Osborne s'est inquiété mardi des conséquences de la situation en Chine, reconnaissant que l'économie du Royaume-Uni n'est pas à l'abri des chocs externes.
"Ces mouvements spectaculaires des derniers jours nous disent qu'il y a beaucoup de risques dans l'économie mondiale et qu'il y a des inquiétudes particulières en ce qui concerne la Chine", a-t-il déclaré, au lendemain d'une journée noire pour les marchés, et notamment la Bourse de Londres, qui a perdu près de 10% en dix séances.
"Qu'est-ce que cela signifie pour le Royaume-Uni ? Que nous ne sommes pas immunisés contre ce qui se passe ailleurs dans le monde. Nous le savons", a ajouté le ministre.
La Chine est un facteur de risque pour la reprise mondiale
Le ministre français de l'Economie Emmanuel Macron a considéré mardi à Berlin que la Chine était actuellement un facteur de risque particulièrement important pour la reprise économique mondiale, sans toutefois être une menace pour la croissance française 2015.
"L'économie mondiale se redresse mais pas autant que nous l'espérions (...) c'est un processus très long (...). D'un côté, nous avons des opportunités" (pétrole bon marché, taux d'intérêt bas, etc.), "mais de l'autre côté, il y a beaucoup de risques, et particulièrement la Chine aujourd'hui", a-t-il déclaré à l'occasion de la Conférence des ambassadeurs allemands à Berlin.
L'homme le plus riche de Chine perd 3,2 milliards d'euros
La première fortune de Chine, le chef d'entreprise Wang Jianlin, a perdu 3,6 milliards de dollars (3,2 milliards d'euros) en une seule journée lundi, après l'écroulement des bourses mondiales.
M. Wang, président et fondateur du groupe Dalian Wanda, spécialisé dans l'immobilier et le divertissement, a perdu plus de 10% de sa fortune, selon l'indice des milliardaires établi par Bloomberg, qui suit la fortune des personnes les plus riches de la planète.
Malgré la grosse perte de lundi, la fortune de M. Wang a augmenté cette année de 6 milliards de dollars (5,3 milliards d'euros). Jack Ma, la deuxième fortune de Chine, fondateur du géant du commerce électronique Alibaba, a perdu lundi "seulement" 545 millions de dollars (soit 479 millions d'euros), selon l'indice.