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L'UE met le Hezbollah sur sa liste des organisations terroristes

Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah

© EPA/ASSAAD AHMAD

Par Jean-François Herbecq

La pression sur tous les Européens pour élargir au mouvement chiite libanais soutenu par Téhéran et aidé par le régime syrien des sanctions internationales, cette pression devenait trop forte, d'autant que certains membres de l'Union avaient déjà franchi le cap.

Depuis ce matin, l'ensemble des Européens a donc accepté de se joindre au front constitué des Etats-Unis, du Royaume Uni, des Pays-Bas et de l'Australie. Mais ce front n'a pas adopté la même attitude. Pour les 28 Européens, la cible de leur décision n'est que la branche armée du mouvement, dirigé par le très puissant et charismatique Hassan Nasrallah, un mouvement lancé par les chiites iraniens et soutenus par le régime syrien il y a 30 ans pour contrer Israel.

Le mouvement  comprend une direction politique qui s'est imposée au Liban même et dans l'ensemble de la région, mais aussi une branche militairement active.

Aujourd'hui des combattants chiites libanais combattent au côté du régime syrien menacé depuis deux ans et demi par une révolte populaire. Les Européens n'ont pas oublié non plus que des militants du Hezbollah ont été impliqués dans plusieurs attentats en Europe et à travers le monde. C'est la raison de la difficile unanimité qui a prévalu ce lundi matin entre ministre des affaires étrangères européens.

"Avec cette mesure prise aujourd'hui, l'UE envoie un message fort au Hezbollah, qui ne peut agir en toute impunité", a déclaré le secrétaire d'Etat américain John Kerry. "Ses actions entraîneront des conséquences, notamment à la suite de l'attentat meurtrier de Burgas, en Bulgarie, et pour avoir planifié des attaques identiques à Chypre", a ajouté le secrétaire d'Etat.

"Distinguer le bras armé ne sera pas simple"

"On ne peut pas rester inactif face à un attentat sur le sol européen", a-t-il déclaré à l'agence Belga.

Si elle n'est pas citée parmi les motifs officiels de la décision européenne, l'implication croissante du Hezbollah dans le conflit syrien, aux côtés de l'armée du régime, a également joué un rôle, selon Didier Reynders. "Quand on voit l'évolution de la situation en Syrie, il devenait inimaginable de ne pas répondre".

Distinguer le bras armé du parti politique ne sera "pas simple", concède le chef de la diplomatie belge. "Il va falloir identifier des personnes et des groupes de personnes", souligne-t-il, en évoquant un "travail permanent". Mais l'Europe a une "pratique" en la matière, insiste-t-il. Le bras armé de l'organisation basque ETA a en effet déjà été placé sur la liste terroriste.

L'avis de Didier Reynders n'a pas unanimement partagé en Belgique. La sénatrice Open Vld Martine Taelman juge ainsi "particulièrement difficile" de séparer la branche armée du parti politique. Elle appelle le gouvernement à suivre l'exemple des Pays-Bas, qui considèrent depuis 2004 l'organisation dans son ensemble comme un groupe terroriste. Tous les dons versé par les partisans belges devraient ainsi pouvoir être gelés. La sénatrice appelle aussi à des mesures de sécurité supplémentaires pour la centaine de militaires belges actuellement déployés au Liban.

"Nous aurions souhaité de la part des pays de l'Union européenne une lecture plus avisée des faits, (mais) la société libanaise, dans toutes ses composantes, continuera à entretenir les meilleurs relations avec (ces pays)", a affirmé pour sa part le chef du gouvernement démissionnaire Najib Mikati. Il a précisé que son pays "poursuivra la discussion sur ce sujet par les canaux diplomatiques".

 

Londres a mis en avant des preuves montrant l'implication de la branche militaire du Parti de Dieu dans un attentat à la bombe contre un car de touristes israéliens en juillet 2012 dans une station balnéaire de Bulgarie. Cinq Israéliens et leur chauffeur avaient trouvé la mort.    

L'implication croissante du Hezbollah dans le conflit syrien, aux côtés de l'armée du régime, n'est pas citée par l'UE. Le gouvernement libanais avait appelé ces derniers jours les Européens à ne pas sanctionner le Hezbollah, en faisant valoir que le puissant mouvement représentait une "composante essentielle" de la société du pays.

Les ministres, réunis à Bruxelles, ont cependant affirmé leur volonté de "poursuivre le dialogue" avec tous les partis politiques libanais, y compris le Hezbollah, qui joue un rôle de premier plan.

"Il est bon que l'UE ait décidé d'appeler le Hezbollah pour ce qu'il est: une organisation terroriste", a confirmé le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Frans Timmermans, dans un communiqué. "Nous avons franchi une étape importante aujourd'hui en sanctionnant la branche militaire, en gelant ses actifs, en perturbant son financement et ainsi en limitant sa capacité à agir", a-t-il ajouté.

Désormais les avoirs financiers des responsables de la branche armée peuvent être gelés et des interdictions de circuler sur le sol de l'Union peuvent les frapper. La difficulté cependant sera de sanctionner les dirigeants qui font partie d'une mouvance, où ils occupent à la fois des responsabilités sur le plan politique mais aussi militaire!

Willy Vandervorst avec Reuter et AFP

 

 

 

 

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