Cette chronique a été écrite pour l'émission radio "Les Grenades, série d'été", à retrouver chaque samedi de l'été sur La Première, de 9h à 10h.
Episode 8 : Le grand retour du plaisir féminin avec les réseaux sociaux
Pour préparer cette chronique sur le plaisir, je me suis tournée vers mes amies pour leur demander de me citer le premier mot qui leur venait à l’esprit quand elles entendaient "plaisir féminin". Résultat ? Des réponses comme "clitoris", "orgasme"… mais aussi "complexité", "retenue"… ou "le monde de Narnia" !
Des mots qui évoquent une Terre inconnue, un monde étrange et merveilleux… Bref, le plaisir féminin c’est pas une simple affaire, et ce autant pour les hommes que pour les femmes elles-mêmes. C’est vrai que l’orgasme féminin a connu différents "mythes" : nécessaire à la conception, inexistant, double, caché dans le point G…
"Je ne savais pas que les femmes pouvaient jouir"
Un court-métrage de Carole Roussopoulos "Y a qu’à pas baiser" montrait déjà en 1971 l’étendue des dégâts. Une femme y racontait avoir pleuré la première fois qu’elle avait joui, après des années de rapports sexuels sans orgasme. L’homme avec qui elle couche ce jour-là lui répond : "Oh, je ne savais pas que les femmes pouvaient jouir !"
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Il est donc grand temps de refaire les présentations : qui est donc l’orgasme féminin, cette chose si mystérieuse ?
Je vais vous raconter son histoire qui débute il y a environ 300 000 ans – en même temps que les premiers homo sapiens. Les historiennes pensent que ce serait par accident : une petite fille aurait gratté une piqûre de moustique près du périnée un peu trop longtemps (une théorie qui me semble personnellement tout à fait valable).
Le premier mot qui leur vient à l’esprit quand elles entendent "plaisir féminin"? Des réponses comme "clitoris", "orgasme"… mais aussi "complexité", "retenue"… ou "le monde de Narnia"
Orgasme Féminin passe son enfance dans la Grèce antique, et il a deux papas : Aristote et Galien. Le premier est philosophe, le second est médecin, et ce sont eux les premiers à le définir : L’orgasme est le point culminant de l’expression du désir.
Son étymologie vient du verbe grec "orgao" (enfler, être empli de) qui vient lui-même du mot "orgé" (agitation, colère). Il n'a aucun aucun rapport avec les mots "organe" ou "orgie". Mais les deux papas ne sont pas toujours d’accord. Par exemple, papa Aristote pense que Orgasme Féminin n’est pas nécessaire à la procréation. Tout le contraire de papa Galien, qui lui dit qu’il est nécessaire à la libération d’une "semence féminine" sans laquelle il est impossible de faire des enfants.
Durant le Moyen-Âge, Orgasme Féminin est un jeune ado. Stimulé par les conseils de papa Galien, il décide partir en voyage. Au Moyen-Orient, il est hébergé chez Ibn Sinna - dit Avicenne en Français. Philosophe et médecin persan, Avicenne connaît bien papa Galien. Du coup, non seulement il est super content de le recevoir chez lui, mais il va offrir à Orgasme Féminin une place de choix dans son livre, le "Canon de la Médecine", un ouvrage très populaire chez les médecins d’Occident jusqu’au 15ème siècle.
Dans ce livre, tonton Avicenne dit en gros la même chose que papa Galien : si Orgasme Féminin n’est pas invité à la fête, ce sera une fête stérile. Et comme notre mission sur Terre est de nous reproduire, la fête stérile, c’est péché. Orgasme Féminin est donc la meilleure option pour éviter la damnation, en faisant des enfants.
C’est comme ça que Orgasme Féminin a rencontré Clitoris, et qu’ils sont devenus meilleurs amis
La rencontre avec Clitoris
Au 16ème siècle, Orgasme Féminin est en pleine puberté quand, pendant un voyage scolaire en Italie, un gros bouton lui pousse sur le visage. Après s’être fait examiner par tous les médecins du pays (tous des hommes bien sûr), le docteur Realdo Colombo lui dit que ce bouton est tout à fait normal, et qu’il est là pour lui faciliter la vie. C’est comme ça que Orgasme Féminin a rencontré Clitoris, et qu’ils sont devenus meilleurs amis.