La justice de proximité a du plomb dans l'aile. Depuis les réformes récentes, les justices de paix ont perdu, comme les autres tribunaux, 10 à 15 % de leurs moyens. Très concrètement cela signifie moins de juges et moins de greffiers. En Province de Namur, par exemple, le nombre de juges de paix est passé de 9 à 8 le premier mai dernier. Et certains sièges ont été supprimés : Philipeville, Walcourt, Gedinne, Beauraing et Rochefort. Ce qui signifie que les personnes doivent se déplacer davantage, faire parfois plusieurs dizaines de kilomètres pour déposer une requête ou répondre à une convocation.
"On ressent la paupérisation"
Les moyens diminuent mais le nombre d'affaires à traiter reste impressionnant : 400.000 nouveaux dossiers chaque année pour les quelque 180 juges de paix du pays. Le juge de paix, c'est le magistrat du quotidien : conflits de voisinage, de propriété, petites factures impayées, arriérés de loyers... "La précarité économique déverse son lot de dossiers sur notre bureau, commente Jean-Paul Goffinon, juge de paix suppléant au canton de Ciney. Des factures de gaz, d'électricité, de téléphone... On ressent l'effet d'une paupérisation de la population."
Mais aujourd'hui, ce qui prend le plus de temps au juge de paix, ce sont les mesures de protection judiciaire. "Quand une personne n'est plus capable de gérer ses biens ou tout simplement de se prendre en charge, nous désignons un tuteur, qui peut être un avocat ou une personne de confiance dans la famille", explique Pierre Dellieu, juge de paix au canton de Ciney-Rochefort. Mesure délicate s'il en est qui revient, sur le plan du droit, à faire retomber une personne en enfance. Pour exercer cette compétence, le juge est souvent amené à se déplacer pour entendre la personne concernée, et se forger une conviction. "Nous allons souvent en maison de repos", explique Pierre Dellieu.
L'arriéré judiciaire menace
Mais c'est sans doute au greffe du tribunal que l'augmentation de la charge de travail se fait le plus ressentir. "Rien que pour le canton de Ciney-Rochefort, la protection judiciaire représente plus de 600 dossiers ouverts, résume le greffier en chef, David Simon. Cela représente énormément de travail car ce sont des dossiers vivants, qu'il faut régulièrement sortir de l'armoire, par exemple, si un tuteur décide de vendre un bien appartenant à la personne protégée ou veut simplement prélever une somme sur le compte épargne". Concrètement, les délais de traitement des dossiers ont tendance à s'allonger. "Avant, une demande de mise sous protection judiciaire était traitée dans les 15 jours. Il faut maintenant compter un mois ou un mois et demi."