Journée de lutte contre le sida : "les traitements sont plus efficaces", mais attention à la banalisation

Par Estelle De Houck d'après l'Invité dans l'actu de Sophie Brems

Ce premier décembre marque la Journée mondiale de lutte contre le sida. Depuis 1981, ce virus peut être détecté grâce au dépistage et au traitement à base d’antirétroviraux. On ne meurt donc plus du sida en Belgique aujourd’hui. Et pourtant, il faut faire attention à la banalisation : notre pays dénombre 720 nouveaux cas en moyenne chaque année.

Commençons par rappeler quelques notions de base. Le VIH, c’est le virus qui s’attaque au système immunitaire. Un patient atteint du VIH est alors porteur, mais n’est pas malade. "Et cela ne se voit pas non plus", ajoute Thierry Martin, directeur de la plateforme Prévention Sida.


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Ce n’est qu’après quelques années, lorsqu’il détruit le système immunitaire, que le patient devient malade du sida. "Sans traitement, la personne va développer ce qu’on appelle des maladies opportunistes, c’est-à-dire des cancers, par exemple", ajoute-t-il.

Une IST ?

Le VIH est une infection sexuellement transmissible. En Belgique, il se transmet d’ailleurs 98% du temps lors des relations sexuelles sans préservatif.

"Les 2% restants, c’est notamment lors d’injection de drogues par voie intraveineuse. Mais chez nous, notamment grâce au comptoir d’échange de seringues, c’est un pourcentage très faible. Alors que dans d’autres pays, comme les pays de l’Est, ce sont des pourcentages beaucoup plus élevés."

Pas de vaccin, mais des traitements

Les traitements ont donc une réelle importance dans la lutte contre le VIH. "Et les traitements sont tellement efficaces aujourd’hui qu’ils rendent la charge virale indétectable", explique Thierry Martin. Cela signifie qu’une personne séropositive qui prend un traitement n’aura presque plus de virus dans l’organisme. Tellement peu qu’elle ne le transmet plus.

L’espérance de vie est quasi normale

Aujourd’hui, le VIH est donc considéré comme une maladie chronique. "Une maladie avec laquelle on peut vivre très longtemps. L’espérance de vie est quasi normale."

A noter qu’il existe également des traitements préventifs. "Si je suis séronégatif, je peux aussi prendre un traitement qui va me protéger d’une potentielle infection. C’est ce qu’on appelle la PrEP", précise Thierry Martin. Autre outil : le traitement post-exposition. Il permet d’empêcher une potentielle infection s’il est pris dans les 48 heures après une prise de risque potentielle.

Toujours pas de guérison

Jusqu’à présent, ces traitements doivent se prendre à vie. En effet, on ne guérit toujours pas du sida.

Par contre, Thierry Martin tient à préciser que ces traitements ont bien évolué au niveau de leur efficacité. "On est arrivé à combiner différentes molécules. Si bien que maintenant, on prend en général un à deux médicaments par jour."


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"Ce qui arrive maintenant aussi, c’est que ces traitements vont pouvoir être injectés par voie intraveineuse. Ils pourront durer deux mois, ce qui veut dire que la personne ne prendra effectivement plus une pilule tous les jours, mais devra aller régulièrement tous les deux mois chez son médecin pour avoir le traitement de manière injectable."

Attention à la banalisation

Un écueil dans la lutte contre le VIH, c’est la banalisation. "Les traitements sont plus efficaces et ça entretient un sentiment comme quoi c’est moins grave aujourd’hui", explique Thierry Martin.

L’enjeu est de rendre ces armes accessibles au plus grand nombre

Pourtant, 2,5 cas sont détectés chaque jour en Belgique. Certes, cela représente une évolution puisque l’épidémie a reculé depuis 2017. Mais ce chiffre reste toutefois très élevé. D’où l’importance de la prévention (préservatifs, dépistages, traitements, etc.) "On a les armes pour lutter et faire reculer l’épidémie. Maintenant, l’enjeu est de rendre ces armes accessibles au plus grand nombre."

D’autant plus que, selon Thierry Martin, 2000 personnes ignoreraient leur séropositivité en Belgique.

La discrimination

Outre la prévention, la plateforme Prévention Sida souhaite véhiculer un message de solidarité, "parce qu’on voit encore aujourd’hui que la discrimination envers les personnes séropositives reste importante", explique Thierry Martin.

"Autant les traitements ont évolué, autant le regard de la société par rapport aux personnes séropositives reste figé dans les années 90, les années noires du sida. Le sida continue vraiment de faire peur, et notamment chez les professionnels de la santé."


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Il est donc important de rappeler qu’une personne séropositive sous traitement aura une charge virale indétectable. Elle ne transmettra donc plus le virus.

"Il n’y a aucun risque, par exemple, de soigner une carie d’une personne séropositive. On prend en général beaucoup plus de risques avec une personne qui est séropositive mais qui ne le sait pas", conclut Thierry Martin.

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