Belgique

Jean-Luc Crucke à propos de sa démission : "Georges-Louis Bouchez ne me pousse pas vers la sortie. Je suis libéral et je reste dans la famille libérale"

Par Estelle De Houck sur base de l'Invité de Matin Première de Thomas Gadisseux

Épisode inédit dans la politique belge. Jean-Luc Crucke quitte son poste de ministre wallon du budget parce qu’il ne trouvait plus sa place au MR. "Mes convictions ne sont plus en pleine adéquation avec la ligne de mon parti", a-t-il déclaré. Alors, que dit cette démission ? Et en quoi les lignes politiques entre les libéraux s’opposent ?

Au micro de Thomas Gadisseux, le libéral explique son geste. Jean-Luc Crucke dit avoir démissionné "par conscience."

Un problème idéologique

"On reproche trop souvent aux hommes et femmes politiques de ne pas être en adéquation avec leur conscience. Là j’ai des différences sur le plan idéologique par rapport à la ligne du parti. Et quand on est à ce point-là comme ministre, on ne peut pas être le porte-parole le plus fidèle de la ligne du parti", explique-t-il.

Alors, comment expliquer ces différences idéologiques avec son parti ? Qui du MR ou de l’ex-ministre du budget a évolué ? "Sans doute les deux", répond Jean-Luc Crucke.


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Selon lui, le parti libéral rassemble des personnes plus conservatrices et d’autres plus progressistes. "L’évolution du temps fait aussi qu’on peut aborder différemment les dossiers. Il y a dix ans, on ne parlait pas assez du réchauffement climatique. Pour moi, aujourd’hui, ne pas mettre ça en priorité à l’agenda, c’est une difficulté."

Le libéral évoque rapidement les différences avec son président de parti, Georges-Louis Bouchez. A propos du nucléaire, tout d’abord. Mais aussi d’un point de vue institutionnel : "Georges-Louis est plus belgicain. C’est son droit et c’est la ligne du parti. Ce n’est pas mon cas, moi je suis régionaliste convaincu et je crois que la Wallonie doit d’abord compter sur elle-même pour s’en sortir."

Georges-Louis Bouchez ne me pousse pas vers la sortie. Je suis libéral et je reste dans la famille libérale.

Alors, est-ce le président actuel qui pousse Jean-Luc Crucke vers la sortie ? Ce dernier s’en défend : "Georges-Louis Bouchez ne me pousse pas vers la sortie. Je suis libéral et je reste dans la famille libérale."

Jean-Luc Crucke a connu plusieurs présidents de parti au sein du MR. La façon de faire de la politique a-t-elle changé ? "Sans doute que l’expression quand elle est plus radicale est plus compréhensible et médiatiquement plus audible. Moi je crois que c’est le contraire qui fait la richesse du consensus", explique-t-il.

Abandonne-t-il la Wallonie ?

La Wallonie fait face à d’immenses défis : les inondations, la crise sanitaire… Peut-elle se permettre un changement ministériel en ce moment ? Jean-Luc Crucke quitte-t-il le navire en pleine tempête ? A cela, il répond qu'"il n’y a jamais de bon moment pour démissionner."

"Simplement et modestement, je crois avoir mis en place, notamment sur le plan budgétaire, l’ensemble des éléments qui permettront dans quelques semaines de prendre la bonne décision. J’aurais aimé être à la table pour prendre cette décision. Mais je préfère que ceux qui sont à la table aient toute la confiance des partis respectifs pour pouvoir le faire", rassure-t-il.


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D’un point de vue budgétaire, la Wallonie est également dans une situation catastrophique. La mission du prochain ministre wallon du budget ne sera donc pas aisée. "Je ne dis pas que la situation sera facile. La situation budgétaire est délicate mais les éléments sont sur la table", tient-il à rassurer.

"Il y a une réelle prise de conscience en Wallonie. L’opposition n’est pas d’accord avec ça mais c’est le rôle de l’opposition. Mais cette manière de faire va permettre de prendre les bonnes décisions pour autant qu’on s’y tienne sur les dix années à venir."

En route vers la Cour constitutionnelle

Jean-Luc Crucke, juriste de formation, sera le candidat du MR pour devenir juge à la Cour constitutionnelle. Mais comment assumer d’être nommé par un parti s’il ne s’y reconnaît plus ? "Je n’ai jamais dit que je ne me reconnaissais plus dans le parti libéral", précise-t-il.

"Je suis libéral et je veux crever libéral un jour. On peut avoir des divergences sur certains dossiers et c’est pour moi la noblesse du débat politique", ajoute Jean-Luc Crucke.


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"C’est clair que la Cour constitutionnelle, c’est autre chose. Ça va me demander plus de réserve et de retenue dans mon expression. Mais c’est aussi un combat pour nos valeurs, pour la démocratie. C’est un combat qui ne se fait plus de manière politique mais de manière juridique."

"J’ai été avocat pendant quasiment 30 ans. Et finalement, se dire que j’ai commencé ma vie professionnelle dans le droit et pouvoir la terminer dans le droit, ce n’est pas le moins mauvais des futurs", conclut le libéral.

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