La vitamine D
Egalement objet d’innombrables études, la vitamine D retient de plus en plus l’attention. Voilà maintenant que 73 experts francophones et 6 sociétés savantes françaises appellent à donner un supplément en vitamine D à l’ensemble de nos voisins français comme élément protecteur contre le Covid-19.
Comme le rapporte France inter, ces experts ne prétendent pas que la vitamine D empêchera les décès, mais ils estiment nécessaire de fournir ce qui pourrait être une "arme de plus face au Covid", comme le rapporte à nos confrères Cédric Annweiler, chef du service de gériatrie au CHU d’Angers, à l’origine de l’appel.
Nicolas Dauby, spécialiste en maladies infectieuses au CHU Saint-Pierre et chercheur FNRS, est circonspect : "La vitamine D, on pourrait trouver une association avec elle dans pratiquement toutes les pathologies…", dit-il en arborant un sourire en coin. "Il y a beaucoup d’études qui montrent une relation entre la carence en vitamines D et le Covid-19 sévère, mais à chaque fois, il y a des potentiels biais qui sont par exemple le niveau socio-économique, la couleur de la peau, le fait de faire partie d’une minorité, … Et à chaque fois qu’on donne de la vitamine D aux gens, dans d’autres pathologies, comme pour la tuberculose, on se rend compte qu’il n’y a pas d’effet. On pensait qu’il y avait un rôle de la carence de la vitamine D pour la tuberculose (avec les sanatoriums), et quand on a commencé à donner des suppléments, on voyait qu’il n’y avait pas d’effet. IL y a une étude australienne qui est sortie récemment, sur des milliers de personnes, et qui montre que la supplémentation en vitamine D n’a pas d’impact sur les affections respiratoires.
Pour Nicolas Dauby, il faut donc en rester aux recommandations de base pour la vitamine D, émises par le Conseil supérieur de la santé, et que les médecins généralistes doivent suivre.
Pourquoi tant de violence, si c’était l’évidence ?
La polémique sur les traitements précoces dont l’hydroxychloroquine a été présentée comme le premier, n’est cependant pas morte illico presto et elle a revêtu des accents violents. Agressions verbales ou menaces physiques de chercheurs démentant l’efficacité de l’hydroxychloroquine, règlements de comptes entre croyants et partisans d’une méthode scientifique, tout se passe comme si l’émotion et le populisme avaient pris le dessus sur la raison.
Le 13 novembre, dernier, une équipe de chercheurs franco-suisses, composée notamment de Nathan Peiffer-Smadja, Mathieu Rebeaud et Thibault Fiolet, a rapporté ces agressions à la revue The Lancet, après avoir publié une méta analyse concluant à l’absence d’effet significatif de l’hydroxychloroquine sur la mortalité. Cette analyse incluait 11.932 participants traités par hydroxychloroquine, 8081 par hydroxychloroquine et azithromycine et 12.930 patients dans un groupe témoin.
Comme ils l’expliquent, "plusieurs auteurs de cet ouvrage ont subi une violente campagne de cyberharcèlement sur les réseaux sociaux, recevant des centaines d’insultes, de messages xénophobes, d’appels téléphoniques anonymes et d’intimidation, y compris des menaces de mort. Ces actions se sont accompagnées du partage public des coordonnées, y compris l’adresse postale des auteurs, sur des groupes Facebook de centaines de milliers de membres."
Pour conclure : tout le monde aimerait, mais…
Si un traitement était validé scientifiquement, pourquoi donc les infectiologues s’en passeraient-ils ? Et pourquoi l’émotion et la violence prennent-elles le dessus sur la raison ? Dans ce débat, ce n’est plus tant de l’efficacité qu’on discute, mais malheureusement souvent de croyances, mêlées de biais de confirmation, qui font que les croyants ne lisent que ce qui conforte leurs convictions.
Tous les médecins aimeraient trouver une molécule qui évite les hospitalisations et les complications chez les malades atteints de COVID-19. Cependant, à ce jour, les plus cliniciens spécialistes de la maladie estiment qu’aucun n’a prouvé son efficacité.
Jean-Christophe Goffard, chef de service des maladies infectieuses à l’hôpital Erasme : "On serait tous très heureux d’avoir des traitements efficaces dès les phases précoces de la maladie, pour éviter les hospitalisations, ce serait une solution assez élégante, mais malheureusement, on a aucune démonstration d’une efficacité des différents traitements qui ont été soit réellement essayés dans des phases précoces, comme l’hydroxychloroquine, soit pour lesquels on a quelques petits essais qui ont été faits mais qui n’ont pas été convaincants tels que l’ivermectine. Ce n’est pas pour autant qu’il faut abandonner, on a besoin de les développer, et la recherche continue à tous les niveaux, aussi bien pour recycler des médicaments existants, que pour développer des médicaments innovants."
Aujourd'hui, les patients Covid-19 hospitalisés et ayant besoin d'oxygène sont traités par dexaméthasone. C'est le seul traitement ayant fait preuve d'une efficacité pour ce type de patients. Aucun traitement prophylactique ou précoce n'est recommandé, tant que des études complémentaires n'en ont pas prouvé l'efficacité.