Les demandes des brevets déposées par des sociétés, universités et instituts de recherche belges auprès de l’Office européen des brevets sont en augmentation. Une hausse de 3,3% en 2021 par rapport à 2020. Les inventeurs basés en Belgique ont rempli 2485 demandes de brevets, le nombre le plus élevé jamais enregistré. Chez nous, ce sont surtout les secteurs actifs dans le domaine de la santé qui ont déposé le plus de brevets. Cette hausse était attendue par les acteurs de terrain. Samuel Denis, codirecteur du département brevets au bureau Gevers explique : "Ce n’est pas juste un effet rebond après l’année covid, c’est une tendance lourde observée ces dernières années, le nombre de brevets déposés augmente chaque année."
Un brevet, c’est quoi ?
Un brevet c’est un titre de propriété qui va reconnaître la paternité d’une invention à un inventeur ou à une entreprise. Ce brevet va lui conférer un monopole pendant une durée limitée. Grâce au brevet, on peut interdire à des tiers de faire la même chose, sauf s’ils ont l’autorisation du titulaire du brevet. Le titulaire peut choisir de garder son monopole, il n’y a que lui qui peut utiliser son invention. Le titulaire peut aussi octroyer des licences contre rémunération.
Cela sert à quoi ?
Un brevet sert à sécuriser un investissement en recherche et en innovation. Le brevet va conférer le monopole sur l’invention pendant une certaine durée. Grâce au brevet on peut ne pas être copié pendant une certaine durée sur un territoire couvert par le brevet. Pour Yann Ménière, chef économiste de l’Office européen des brevets : "Les demandes de brevets témoignent des investissements de long terme dans la recherche avec des retours sur investissement à 5 ou 10 ans pour l’industrie. Ce sont des technologies nouvelles qui vont graduellement inonder l’industrie. C’est un atout pour l’économie d’un pays."
Quels secteurs déposent le plus de brevets ?
Au niveau européen, c’est le secteur des technologies digitales qui dépose le plus de brevets avec deux grands acteurs qui sont la Chine et les États-Unis. C’est un secteur qui connaît une très forte croissance mais dans lequel les Européens ne percent pas. Samuel Denis, du bureau Gevers, le regrette : "Dans ce domaine les Européens et en particulier les Belges sont à la traîne. C’est dommage car il y a bon nombre d’inventeurs en Belgique mais ils déposent peu de brevets."
Au niveau belge, c’est l’industrie pharmaceutique qui dépose le plus de brevets. Les dépôts ont crû de 34,3% entre 2020 et 2021. Le secteur des biotechnologies est arrivé deuxième, suivi par les techniques médicales en troisième position. Cela ne surprend pas David Gering directeur de la communication chez Pharma.be : "La situation de la Belgique est assez unique au niveau de la recherche et du développement, il y a un très gros écosystème qui se compose des firmes pharmaceutiques, de chercheurs universitaires et qui est tirée par le monde politique."
La Belgique, championne des brevets ?
Si l’on regarde le nombre de demande brevets par million d’habitants, la Belgique occupe la huitième position au niveau mondial. Cependant il y a des fortes disparités au niveau régional en Belgique : La Flandre a déposé 65% des demandes de brevets au niveau européen. La Wallonie en a déposé 20% et Bruxelles 15%. Le brevet est un outil économique et la Flandre reste la région la plus développée au niveau économique et innovation même si la Wallonie continue de progresser et soutient ces innovations. Samuel Denis, codirecteur du département brevets au bureau Gevers nuance : "A notre niveau, on a six bureaux en Belgique sur l’ensemble du territoire, on ne constate pas de si grandes disparités entre régions. On est très sollicités du côté francophone pour des demandes de brevets."
Instituts de recherche et universités à la pointe
En Belgique, c’est l’entreprise Solvay qui a déposé le plus de brevets européens, suivie par le Centre de microélectronique et de nanotechnologies IMEC, basé à Louvai et Umicore. En incluant l’Université catholique de Louvain, l’Université de Gand, l’Institut flamand de biotechnologie (VIB) et l’Université d’Anvers, cinq des dix plus grands demandeurs belges sont des universités ou instituts de recherche. Ensemble, ils représentent 40% des brevets des dix plus grands demandeurs en provenance de Belgique, une part supérieure à la plupart des autres pays. "Cela témoigne d’un tissu universitaire de recherche fondamental important et innovant dans le système d’innovation belge", explique Yann Ménière, chef économiste de l’Office européen des brevets.
Exemple de Solvay
L’entreprise Solvay dépose plus de 250 brevets par an. 300 millions d’euros sont investis dans l’innovation. Il s’agit des brevets liés notamment à allégement des matériaux pour l’automobile, l’aérospatial ou encore les drones. Les autres recherches concernent la modélisation de batteries, les scanners de matériaux et les ultrasons. Kazuhiko Yokota, directeur recherche pour Solvay : "Nous voulons créer la connaissance, archiver et protéger notre connaissance et ensuite valoriser notre connaissance. Nous pouvons le faire grâce à la protection des brevets. Nous réinvestissons l’argent que nous procurent les brevets dans l’innovation. 3% de notre chiffre d’affaires est consacré à la recherche."