Depuis plusieurs années, beaucoup de transmigrants se rassemblent ici à la nuit tombée pour faire la fête ou tout simplement retrouver des compatriotes. Ils sont souvent en situation illégale en Belgique, espèrent un jour passer en Angleterre et en attendant, pour survivre, ils s’adonnent parfois à des petits trafics. Ce qui oblige aussi la police à renforcer ses patrouilles.
Plusieurs témoins, croisés les jours précédents, m’ont affirmé que nombre de ces personnes en transit rejoignent le quartier Nord le soir, en train. Vérification faite, dans le convoi qui arrive ce soir-là voie 8 un peu après 22h30, ceux qui descendent à la gare du Nord sont surtout de jeunes hommes noirs. Dans les couloirs sous voies également, je croise presque uniquement des jeunes de ce type, dont certains semblent un peu perdus.
Maintenant, on les dégage et je pense donc qu’ils restent à la rue
Nous sortons tous par les portes situées rue d’Aerschot. Premier constat, dans la rue, il y a beaucoup de lumière, beaucoup de monde et pas mal d’animation. Le quartier semble bel et bien vivre (aussi) la nuit. Quelques instants de marche plus tard à travers les rues alentours et une autre évidence me saute aux yeux : parmi la foule présente, il n’y a que des hommes. Les seules femmes que je vois sont soit les prostituées derrière leurs vitrines, soit l’une ou l’autre serveuse dans l’un des quatre bars ouverts cette nuit-là.
Justement, dans l’un de ces cafés, la patronne au comptoir accepte de me parler. Blonde, la trentaine et un petit accent de l’est, elle surveille l’intérieur de l’établissement, ainsi que la terrasse. "Il y a plein de voleurs dans la rue. Ils volent des portefeuilles, des téléphones, tout. C’est le problème maintenant avec tous ces jeunes gens. Ils restent toute la nuit ici parce qu’ils n’ont pas d’endroit pour dormir. Et puis, il y a aussi le trafic de drogue. Mais dans la rue. Dans le café, on ne les laisse plus entrer. Avant, ils rentraient, demandaient un café, s’installaient et commençaient à vendre leurs trucs. Maintenant, on les dégage et je pense donc qu’ils restent à la rue".