"Je suis venu te dire que je m’en vais"… 2 mars 1991, Serge Gainsbourg part cette fois sans crier gare. Une crise cardiaque, foudroyante, alors qu’il est chez lui, seul, à Paris. "L’homme à la tête de chou" a 62 ans.
C’est le week-end de la fin de la guerre du Golfe. La nouvelle tombe dans la nuit du samedi au dimanche : "Serge Gainsbourg est mort, apprend-on de bonne source auprès des sapeurs-pompiers de Paris", annonce à 00h35 l’AFP.
Dans la soirée, devant la maison du 5 bis rue de Verneuil, Bambou, sa dernière compagne, s’est inquiétée quand il n’a pas répondu – personne n’a les clefs quand il compose – et a alerté les secours. On le retrouve gisant nu à même le sol.
Un choc mais pas une surprise tant l’auteur de "Je t’aime moi non plus" a brûlé la vie par les deux bouts. Les dernières années, Gainsbourg a cédé beaucoup de place à Gainsbarre, son Mr Hyde, augmentant encore sa consommation d’alcool et de gitanes et s’abîmant dans le monde de la nuit.
►►►lire aussi : Serge Gainsbourg : huit buzz télévisés avant l'arrivée d'Internet
Il y a eu déjà des alertes, la mort a frappé à sa porte. 1973, première crise cardiaque ; 1989, lourde opération du foie ; puis autre infarctus et nouvelle hospitalisation.
Dernièrement, le roi de la provocation a pourtant essayé de trouver paix et repos. Pour composer son dernier album, qu’il va enregistrer au printemps à La Nouvelle-Orléans, il se réfugie pendant six mois chez le chef étoilé Marc Meneau à Vézelay (Yonne).
Il parle beaucoup de la mort, omniprésente dans sa vie – enfant, il a porté l’étoile jaune — et son œuvre. Elle le terrorise. Comme un ultime pied de nez, il a scénarisé une vraie fausse interview posthume que Libération publie le jour venu.
Bon, je suis mort […] C’est le cœur qui a lâché. Non, c’est plutôt une overdose de plomb. C’était assez foudroyant. Et puis, j’étais exceptionnellement faible
présage-t-il alors.
Beaucoup n’apprennent son décès qu’au petit matin. Le dimanche, des centaines de personnes, silencieuses, viennent déposer des fleurs ou écrire des messages sur la façade blanche de la maison déjà pleine de graffitis. Bientôt un lieu de pèlerinage.
"On est loin des grandes foules rassemblées devant les domiciles de Piaf, Claude François ou Dalida, quelques heures après leur disparition. Rue de Verneuil, pas de scènes d’hystérie, pas de sanglots, pas de portraits brandis. Plutôt une résignation devant cette mort annoncée depuis longtemps par Gainsbourg lui-même", témoigne un journaliste de l’AFP.