High tech

Huawei, géant chinois des télécoms et champion controversé de la 5G

Huawei a livré 206 millions de smartphones dans le monde sur l'année 2018, derrière le sud-coréen Samsung et au coude-à-coude avec l'américain Apple

© STR / AFP

Par RTBF Tendance avec AFP

Qu’est-ce que Huawei ?

Fondé en 1987 à Shenzhen (sud de la Chine) par un ex-ingénieur de l’Armée populaire de libération, Ren Zhengfei, Huawei est un géant des télécommunications, présent dans 170 pays, revendiquant 180.000 employés, et dont le chiffre d’affaires a dépassé 100 milliards de dollars en 2018.

Huawei s’est aventuré hors de ses frontières dès 1997, ciblant l’Asie du Sud-est, l’Afrique et l’Europe de l’Est, évitant le face-à-face avec ses concurrents occidentaux, pour s’assurer parts de marché et marge de manœuvre financière.

Son expansion géographique et ses lourds investissements en recherche et développement (plus de 10% de ses revenus) l’ont positionné comme un acteur clé de la 5G (génération ultrarapide de l’internet mobile) et en font un enjeu stratégique crucial pour les ambitions technologiques de la Chine.

 

Mastodonte des smartphones

Huawei a livré 206 millions de smartphones dans le monde sur l’année 2018, derrière le sud-coréen Samsung et au coude-à-coude avec l’américain Apple, selon le cabinet IDC. De même source, au 3e trimestre 2019, les ventes du géant chinois ont bondi de 28% sur un an, à 66,6 millions d’unités, dépassant Apple (46,6 millions d’unités) pour se rapprocher du leader Samsung (78,2 millions de smartphones).

Une envolée dopée notamment par les qualités affichées des objectifs photos de ses appareils. Mais le groupe a récemment connu un repli de ses ventes en Europe, reflet des controverses dont il est l’objet.

 

Géant de la 5G

La future génération de technologie mobile est censée rendre les connexions quasi instantanées et accroître la capacité de transmission des données. Par ses investissements, Huawei a su se rendre indispensable dans la fourniture des équipements pour ces réseaux, devenant le premier équipementier mondial devant le suédois Ericsson et le finlandais Nokia.

Huawei a annoncé mi-octobre avoir passé la barre des 400.000 antennes 5G livrées dans le monde auprès de 56 opérateurs ayant déjà entamé les déploiements, dont une trentaine d’opérateurs européens.

 

Pourquoi inquiète-t-il ?

Le passé militaire de Ren Zhengfei, son appartenance au Parti communiste et la culture d’entreprise opaque chez Huawei ont largement alimenté les soupçons sur l’influence de l’Etat chinois sur le groupe. Accusations démenties par Huawei, qui martèle être un groupe privé dont le capital appartient entièrement à ses employés -- une affirmation invérifiable selon les universitaires américains Christopher Balding et Donald Clarke.

Les États-Unis ont également affiché leur crainte de voir les services de sécurité chinois utiliser les réseaux de Huawei à des fins d’espionnage ou de cyberattaques, redoutant que la législation chinoise oblige Huawei à coopérer -- inquiétude partagée par plusieurs pays occidentaux.

Cette éventualité est réfutée obstinément par le groupe, qui assure qu’il n’accepterait jamais de telles consignes et qu’il respecte les lois des pays où il opère.

 

Offensive des Etats-Unis

Washington en a cependant fait une affaire personnelle, avec l’arrestation en décembre au Canada, à la demande de la justice américaine, de la fille de Ren Zhengfei et directrice financière du groupe, Meng Wanzhou, soupçonnée de violation des sanctions américaines en Iran.

Les Etats-Unis ont par ailleurs placé le géant chinois sur liste noire au printemps 2019, interdisant aux sociétés américaines de services et de composants de commercer avec la firme chinoise : un coup très dur pour Huawei, qui se voit également privé d’accès au système d’exploitation Android de l’américain Google.

En novembre, Huawei, ainsi que son compatriote ZTE, ont été exclus d’un fonds de 8,5 milliards de dollars géré par la FCC, le régulateur américain des télécoms, cette dernière évoquant "une menace pour la sécurité nationale". Huawei a répliqué par deux plaintes déposées aux Etats-Unis.

 

L’Europe divisée

Plusieurs pays dont l’Australie et le Japon ont interdit à la firme chinoise de participer au déploiement de la 5G, tandis que les Etats-Unis faisaient pression sur les pays européens pour faire de même. La Nouvelle-Zélande, elle, a fait marche arrière pour laisser la porte ouverte à Huawei.

L’Europe apparaît divisée : Londres a indiqué vouloir prendre en considération l’importance des relations en matière de renseignement avec les Etats-Unis avant de décider d’exclure ou non Huawei de ses infrastructures ; l’Italie a elle élargi ses pouvoirs pour examiner les recours aux équipementiers 5G.

Mais l’Allemagne n’a pour l’heure pas exclu Huawei des appels d’offres, adoptant une résolution autorisant l’accès à l’infrastructure 5G à des entreprises "qui respectent de manière vérifiable un catalogue de sécurité clair" -- mais des parlementaires y exigent une interdiction.

En France, la loi sur la sécurité des réseaux n’interdit pas formellement Huawei mais le principe de validation des équipements laisse au gouvernement le dernier mot quant à l’utilisation éventuelle des équipements Huawei par les opérateurs.

 

Et en Belgique ?

 

En ce qui concerne la 5G, c’est la Sûreté de l’Etat qui a été chargée d’évaluer le niveau de risques des différents fournisseurs. Cette évaluation s’est basée sur des éléments techniques mais également sur des "critères géostratégiques" (le caractère autoritaire ou non du pays d’où proviennent les équipements, l’indépendance par rapport à l’autorité nationale, etc.). Il est assez facile de savoir lequel des 5 pays (Suède, Finlande, Corée du Sud, Chine, Etats-Unis) d’où proviennent les équipements pourrait poser problème bien que le nom de Huawei n’est jamais cité par les renseignements belges.

Aucune action ni décision ne sont prévues avant la publication d’"une boîte à outils" par la Commission européenne.

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