Hot Chip : Toujours hot ?

Chemises multicolores, kimono, t-shirts à pois ou monture de lunettes extra larges vissée sur le nez, les cinq musiciens de Hot Chip ont le look pour s’imposer en finale des mondiaux de Tetris. Un peu geeks, vraiment nerds, ces gars-là se contrefichent de leur apparence, des tendances et de l’ensemble des règles relatives au bon goût. Depuis 2004, le groupe anglais fait ce qui lui plaît.

À l'heure du huitième album studio, Hot Chip se tape se tape une fixette sur "More Than Enough", un tube disco-funk enregistré en 1980 par Universal Togetherness Band. Ce groupe à la durée de vie limitée (1979-1982) revit aujourd'hui à travers un sample utilisé sur le morceau d'ouverture. "Down", mixé par Soulwax, plante le décor d'entrée de jeu : Hot Chip est bien là pour se faire plaisir, sans-gêne ni a priori, avec des sons chipés dans la grande garde-robe synth-pop. C’est chic et sexy, parfois un peu kitsch, voire même cheesy.

L'émergence de l'album "Freakout/Release" tient d'abord à un lieu : le tout nouveau studio Relax & Enjoy. Erigé et inauguré par Hot Chip en plein cœur de l'est londonien, ce quartier général a vu les troupes se retrouver au lendemain du confinement pour enregistrer dans l'instant et, surtout, à l'instinct. Sans plan de vol prédéterminé ni idée préconçue, les cinq musiciens ont donné libre cours à leurs envies. Entre lâcher-prise de l'extrême et prises extrêmement improvisées, Hot Chip se détend et se prélasse volontiers dans une zone de confort assumée. C'est tout l'intérêt du nouvel album. Là où les trois précédents centralisaient des envies individuelles pour feindre l'unité, le récent "Freakout/Release" est le fruit d'un véritable travail d'équipe. De quoi remettre au goût du jour les goûts communs de musiciens obsédés par les paillettes, le groove et la mélancolie post-afterparty.

Depuis ses débuts avec l'album "Coming On Strong", Hot Chip embrasse toujours la perfection... sur trois chansons. Source de délectations, mais aussi de profondes frustrations, la règle se vérifie à tous les coups : les albums fonctionnent avec trois locomotives et un peu de remplissage dans les wagons. "Freakout/Release" respecte ce cahier des charges. D'abord via la chanson du même nom : un titre aussi électronique qu'électrique, entièrement ficelé aux côtés de Soulwax. La touche est inimitable, l'effet immédiat. Dans un autre registre, "Eleanor" rime avec "Evermore" pour façonner un hit irradié de mélancolie. Le genre de morceau que seul Hot Chip semble en mesure de composer. Et puis, il y a aussi les références vers lesquelles seul Hot Chip ose se tourner. Parfaitement produite, emballée avec soin, la mélodie de "Broken", par exemple, surfe sans complexe sur la new wave des Pet Shop Boys. Sur le reste de l'album, Hot Chip laisse entrevoir de belles choses, mais aussi quelques péchés mignons : des chansons un peu passe-partout et qui, parfois, ne vont vraiment nulle part.

À l'une ou l'autre occasion, Hot Chip se déhanche aux abords du dancefloor avec de curieux invités. L'ancien batteur de Sepultura, Iggor Cavalera, claque de la baguette sur "Eleanor", tandis que la DJ et chanteuse Lou Hayter donne de la voix ici et là ("Hard To Be Funky", "Guilty"). Plus loin, le rappeur canadien Cadence Weapon se fend également d'une prestation honorable sur "The Evil That Men Do". Même si Hot Chip apprécie la compagnie de ses invités, le groupe se suffit à lui-même dès qu'il s'agit d'activer la machine à danser. À cet égard, les meilleurs morceaux de "Freakout/Release" constituent des pièces de premier choix pour compléter le puzzle scénique mis au point par Hot Chip. En concert, la formation anglaise reste une valeur sûre : un rouleau compresseur prêt à retourner les salles du monde entier. À commencer par la Brixton Academy de Londres. Où le groupe jouera quatre soirs d’affilée. Pour apercevoir Hot Chip chez nous, rendez-vous le 3 octobre du côté de l’Ancienne Belgique. Histoire de danser. Over And Over.