Il faudra plus de temps pour fournir de l’aide
Quand une famine est déclarée dans un pays, organiser l’aide humanitaire prend du temps. "Il faut en général entre 3 et 4 mois pour que l’aide humanitaire puisse se mobiliser. On n’a pas un système international performant qui permet, par exemple, au Programme alimentaire mondial des Nations Unis d’intervenir immédiatement, dans les jours qui suivent le constat de famine pour venir au secours des populations. Les PAM, comme d’autres organismes, doivent faire appel à des donateurs internationaux. Ils doivent acheter des tonnes de denrées comme des céréales ou du riz que l’on peut distribuer aux populations touchées. Et c’est seulement après avoir ensuite réglé les problèmes logistiques d’acheminement que l’aide peut arriver aux personnes qui en ont besoin."
"Et ce délai de 3 à 4 mois est extraordinairement long pour les populations qui souffrent d’insécurité alimentaire grave et de famine. C’est donc tout à fait inacceptable qu’on ne mette pas en place, à l’échelle internationale, un mécanisme d’urgence, performant, qui permette au Programme alimentaire mondial, par exemple, d’être assuré de pouvoir fournir rapidement en aide alimentaire les personnes qui sont en détresse".
Une aide plus difficile à obtenir pour les agences internationales
Le problème, selon Olivier De Schutter, c’est que la crise actuelle risque de faire augmenter ces délais d’intervention. "Les pays qui sont traditionnellement les pays donateurs et viennent au secours des besoins humanitaires du Programme alimentaire mondial sont des pays qui, comme tous, subissent aussi les impacts de la crise et ne sont pas nécessairement les plus enclins à apporter de l’aide dans ce contexte. Donc, clairement, nous ne sommes pas dans une situation où la crise est limitée à tel ou tel territoire affecté par exemple par un tremblement de terre, une sécheresse ou une inondation. La crise est aujourd’hui généralisée car le prix des céréales a explosé pour tous les pays du monde. Et donc l’aide est d’autant plus difficile à obtenir et à distribuer.
"On peut citer les Etats-Unis, le Canada ou l’Union européenne. Mais ces pays ont été traditionnellement plus généreux en période de prix bas quand il était question de secourir des populations en détresse affectées par un conflit ou par un phénomène climatique, par exemple. Lorsque les prix sont élevés, ces pays sont par définition moins enclins à aider. En outre, les Etats-Unis, comme d’autres pays comme l’Australie ou l’Inde, ont annoncé des récoltes relativement faibles pour l’année 2022. Et donc la marge disponible pour aider est plus faible que d’habitude. On comprend que le caractère généralisé de cette crise fait qu’on peut s’attendre à ce que l’aide soit plus difficile à obtenir pour les agences internationales".