Ce sont les Ukrainiens qui l'affirment: Moscou prépare une offensive majeure et retentera, tôt ou tard, de prendre Kiev. Mais après dix mois d'une guerre qui ne cesse de s'enliser, la perspective est difficile à confirmer.
Dans un article de l'hebdomadaire britannique The Economist paru jeudi, le chef d'état-major ukrainien Valery Zaluzhny a estimé qu'une attaque majeure pourrait intervenir "en février, au mieux en mars et au pire fin janvier".
Les Russes pourraient selon lui viser le sud, le Donbass, ou la capitale elle-même. "Je n'ai aucun doute qu'ils retenteront leur chance à Kiev", a assuré l'officier.
Les raisons sont nombreuses d'en douter.
L'échec de mars
L'hypothèse se heurte d'abord aux leçons du passé. En attaquant l'Ukraine le 24 février, le Kremlin espérait voir le pouvoir ukrainien se déliter, son armée s'effondrer et le peuple l'accueillir en sauveur.
L'inverse s'est produit. Les forces ukrainiennes ont résisté, le peuple s'est soulevé et les Russes ont témoigné de faiblesses que nul n'imaginait: logistique défaillante, unités sans initiative, coordination militaire insuffisante, renseignement inefficace. Entre autres.
Une attaque sur Kiev début 2023 ? "En théorie c'est possible", indique à l'AFP l'analyste militaire russe indépendant Alexandre Khramtchikhine. "Clairement, ça devra être mieux réfléchi, sans cette idée insensée que tout se passera (sans combattre) comme cela avait été le cas pour la Crimée en 2014"
Le piège des villes
Ces derniers mois, le rouleau-compresseur russe s'est avéré efficace en associant bombardements intenses et progression lente des forces au sol. Le tout plutôt hors des agglomérations.
"Prendre une ville sans la détruire est difficile, sauf en cas de décision de reddition, comme Paris en 1940", note Alexandre Khramtchikhine.
"Toutes celles qui ont été prises en Ukraine par un camp l'ont été par surprise (...) ou après un encerclement ou une menace d'encerclement", confirme Michel Goya, ex-colonel de l'armée française et historien de la guerre. "Aucune grande ville n'a pu être saisie alors qu'elle était reliée à son camp et que le défenseur pouvait toujours ravitailler et relever ses forces".
Le siège de Marioupol (sud-est), entre février et fin mai, a réduit la ville en poussière. Un assaut sur Kiev serait plus long et plus difficile encore, avec un enjeu stratégique fondamental.
La mobilisation russe insuffisante ?
Certains analystes occidentaux soulignent que l'armée russe peut gagner en efficacité avec la nomination début octobre du général Sergueï Sourovikine comme commandant des opérations russes en Ukraine.
Il "travaille à l'unification de l'armée" et "prépare presque certainement des plans de bataille ciblés, à la différence des assauts passés qui avaient dispersé les troupes russes", écrit l'ex-général australien Mick Ryan sur le site Foreign Policy.