Georges-Louis Bouchez : pourquoi les statuts du MR (mais pas que) font que la situation est compliquée

Georges-Louis Bouchez, contesté mais toujours en place.

© HATIM KAGHAT - BELGA

Par RTBF

"Le/la Président(e) du Mouvement Réformateur est élu(e) au suffrage universel des membres." Et puis plus loin: "Le mandat du/de la Président(e) a une durée de quatre ans." Voilà comment le responsable du Mouvement réformateur est désigné, quand on lit l'article 12 des statuts du parti.

Mais rien dans les textes ne prévoit une procédure de destitution ou d'une démission forcée d'un ou une président (e), en cas de fronde interne, comme c'est le cas actuellement au sujet de celle qui s'abat sur Georges-Louis Bouchez, depuis la formation du nouveau gouvernement fédéral. 

Tout au plus, les statuts indiquent qu'en cas "de vacance, quelle qu'en soit la cause, de la fonction de Président(e), la fonction est exercée à titre intérimaire par le Bureau". Encore fallait-il préciser la nature politique, si c'est le cas, de la vacance...

Tensions au sein du MR : vers un encadrement du président Georges-Louis Bouchez pas une démission

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Ce lundi se réunit le bureau de parti du MR. But: faire avaliser l'option d'une mise sous tutelle de Georges-Louis Bouchez par quatre "belles-mères": les ministres Wilmès et Borsus, le ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles Pierre-Yves Jeholet et la cheffe de groupe du MR au Parlement bruxellois Alexia Bertrand. Mais des ténors n'acceptent pas cette option. 

Sabine Ruelle demande, à mots à peine voilés, de mettre fin à la présidence Bouchez. "Je n'en peux plus des despotes, du népotisme et de ce qui ressemble à des plans mafieux", a-t-elle indiqué ce lundi avant le bureau du MR faisant référence à la nomination de Mathieu Michel, frère de Charles, fils de Louis, à un secrétariat d'Etat au Fédéral.

Les critiques sont également venues de l'ex-ministre Daniel Bacquelaine et du ministre wallon Jean-Luc Crucke. "Il faut voir si la confiance existe encore", déclare ce dernier qui réclame la fin de l'autocratie.

Le clan Michel 

Une des victimes des récentes décisions du président Bouchez, Denis Ducarme, renvoyé au gouvernement wallon en lieu et place de Valérie De Bue, avant une marche arrière catastrophique, s'est également exprimé. "J'ai des doutes sérieux, et je lui ai dit, sur la capacité de Georges-Louis Bouchez à se maintenir au pilotage" du MR, a-t-il affirmé ce lundi matin, sur LN24.

Des grandes voix du parti qui en appellent à la fin de la courte ère Bouchez. Mais ce n'est pas suffisant pour procéder au changement de leader. En raison des statuts, on l'a dit.

Ensuite, Georges-Louis Bouchez conserve toujours le soutien du clan Michel. Celui-ci n'est pas mince, malgré un Charles Michel aujourd'hui président du Conseil européen et un Louis Michel retiré des affaires. Avec Mathieu Michel, président du Conseil provincial du Brabant wallon désormais visible au niveau national depuis son entrée au gouvernement, le clan et celles et ceux qui gravitent autour dirigent la Jeune province. Un bastion et une machine politique. 

Mais la nomination de Mathieu Michel, homme fort du BW, est contestée. L'omniprésence de la famille Michel est remise en cause. Au niveau national, beaucoup de mandataires et militants sont prêts à se détourner de Georges-Louis Bouchez et du clan Michel. Même s'il est inconcevable et irresponsable de réclamer le départ de Mathieu Michel, qui vient de prêter serment devant le Roi.

La chute de Didier Reynders il y a dix ans

Enfin, les meneurs de la fronde anti-Bouchez n'ont aucune alternative à proposer, en la personne d'un ou une successeur(e). Ce week-end, les noms de Sophie Wilmès et Jean-Luc Crucke ont circulé, notamment dans La Libre. Mais aucune officialisation à ce stade.

Rien à voir donc avec ce qui s'est passé entre 2009 et 2011, entre la mise sur pied du groupe "Renaissance" et l'accession à la présidence du MR de Charles Michel, faisant alors tomber Didier Reynders. Rappel des faits.

Le 11 octobre 2004, Didier Reynders devient président du MR. Un mandat marqué trois ans plus tard par une victoire aux élections: les libéraux sont la première force politique à La Chambre. Didier Reynders rempile comme ministre des Finances.

Par contre, en 2009, aux régionales, c'est la cata: le MR est accroché par le PS et Ecolo. Didier Reynders est  contesté en interne, sa double casquette au fédéral et à la présidence du parti ne plaît plus.

Brutal en interne, Reynders l'est aussi lors ses sorties médiatiques, se fâchant avec le PS. Charles Michel épaulé par Hervé Jamar et Willy Borsus monte alors le groupe "Renaissance". Il y a aussi la présidente du Sénat, Christine Defraigne. Publiquement, celle-ci taille à un costard à Didier Reynders. Elle critique la confiscation du pouvoir par une "nano-oligarchie" aux ordres de Didier Reynders qui la fait sauter de son perchoir.

"Renaissance", Defraigne...

C'est l'humiliation de trop. La contestation atteint son paroxysme. La situation est explosive. Une lettre signée par plusieurs mandataires réclament du changement à la tête du parti. Des réunions s'enchaînent pour tenter de calmer le jeu. On échange des noms d'oiseaux. Après la défenestration de Defraigne, nombre réclament le départ de Reynders. Ce dernier ne démissionne pas, appelle à l'unité, à la collégialité. 

En 2010, nouvelle défaite du MR lors des législatives avec un PS premier parti de Wallonie. C'en est trop pour "Renaissance" qui passe à l'attaque. Objectif: déboulonner Didier Reynders.

C'est chose faite lorsque ce dernier se résout à quitter la présidence du parti, en novembre. Une élection interne est rapidement organisée. Charles Michel se déclare officiellement candidat. Il l'emporte en janvier 2011 devant le Liégeois Daniel Bacquelaine.

On le voit: cette séquence a duré plusieurs mois. A l'époque, le MR était également en fédération avec le FDF qui montrait déjà des signes de distanciation. Le contexte national et la montée du nationalisme flamand ne facilitaient pas non plus une gestion sereine des appareils politiques. Le climat était tendu à plus d'un titre chez les Réformateurs.

Cette séquence qui a conduit à la chute de Didier Reynders en 2010 peut-elle se reproduire aujoud'hui avec la présidence contestée de Georges-Louis Bouchez? En tout cas, en l'espace d'une décennie, étonnant que le MR n'ait pas pensé à revoir ses statuts pour éviter un jeu de massacres en public...

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